Desserte aérienne : Le retour des liaisons avec Melbourne "répond à un enjeu majeur pour Aircalin et pour la Nouvelle-Calédonie"

Les rotations avec Melbourne doivent reprendre les mardis, vendredis et dimanches. © Anthony Tejero

Desserte aérienne : Le retour des liaisons avec Melbourne "répond à un enjeu majeur pour Aircalin et pour la Nouvelle-Calédonie"

La réouverture de la ligne Melbourne-Nouméa doit permettre à la compagnie Aircalin de retrouver ses flux d’avant Covid tout en redynamisant la filière touristique en Nouvelle-Calédonie, déjà portée par le marché australien. Qu’attendent les acteurs économiques de ce rétablissement de liaison ? Réponses avec notre partenaire Les Nouvelles Calédoniennes. 



Avec plus de 30 000 passagers transportés par an, dont 7 000 touristes australiens à destination du Caillou avant la pandémie, la ligne Melbourne-Nouméa répond à un "un enjeu majeur tant pour la compagnie que pour la Nouvelle Calédonie", glisse Georges Selefen, le directeur général d’Aircalin, qui a rouvert sa ligne avec la capitale du Victoria, vendredi matin.

Avec jusqu’à trois rotations par semaine, cette ligne permettra ainsi aux Calédoniens de renouer avec Melbourne, notamment à l’approche des vacances scolaires. Mais elle doit surtout permettre à la compagnie de monter en puissance et de retrouver "son niveau de sièges" d’avant Covid. Alors que les flux annuels représentent respectivement près de 40 000 voyageurs avec Sydney et 50 000 avec Brisbane, le rétablissement de Melbourne doit être l’occasion de dépasser allègrement la barre des 100 000 voyageurs transportés par an rien qu’avec l’Australie.

Un levier important pour actionner davantage de liens entre le Caillou et l’île continent, avec un objectif affiché : renforcer le développement de la Nouvelle-Calédonie. C’est pourquoi à l’issue du vol inaugural de vendredi, une grande réunion de travail a été organisée entre de nombreux acteurs du monde économique (dont les chambres consulaires) des deux pays. "Nous travaillons depuis plusieurs mois avec différents acteurs de l’État du Victoria et de la ville de Melbourne, poursuit Georges Selefen, afin que cette ouverture puisse être une vraie réussite. Cest la raison pour laquelle nous avons initié l’organisation de ce rendez-vous afin que les synergies, les partenariats et les potentiels de développement économique puissent se faire."

Au premier rang de ces invités : les acteurs du tourisme, ravis de cette réouverture de ligne, qui pourrait doper davantage encore la filière sur le Caillou. "C’était hyperimportant et c’est une grande opportunité qui marque un véritable retour à la normale", analyse Julie Laronde, directrice de Nouvelle-Calédonie tourisme (NCT), qui rappelle qu’avant la pandémie, la rotation avec Melbourne drainait près du tiers des voyageurs australiens.

Un rétablissement de ligne plus que bienvenu alors que le Caillou n’a jamais autant accueilli d’Australiens. "De janvier à octobre 2023, leur fréquentation est en hausse de 14 % par rapport à la même période en 2019, qui était déjà une année un record. Et ces chiffres ont été atteints avant même la reprise des vols avec Melbourne. Ces trois nouvelles liaisons hebdomadaires ne pourront que faire progresser davantage encore le marché australien."

"Il faut remettre la Nouvelle-Calédonie à l’esprit du grand public"

D’autant plus qu’avec près de 5 millions d’habitants, la capitale du Victoria représente le deuxième "vivier" de voyageurs potentiels, derrière Sydney. Mais encore faut-il leur (re) donner envie de venir sur le Caillou. "L’avantage, contrairement à Singapour lorsqu’on a ouvert la ligne, c’est que sur cette rotation de Melbourne, qui a été en service de juin 2014 à mars 2020, on ne part pas de rien. Dès cette époque, on avait déjà matraqué, mené des campagnes de communication, éduqué les tour-opérateurs, etc. Mais il faut rééduquer quand même et remettre à l’esprit la Nouvelle-Calédonie auprès du grand public, explique la directrice de NCT. Depuis le mois d’août, on a donc déployé un plan d’action ambitieux avec Aircalin axé autour de campagnes de notoriété (dont " Get closer to what you love"), de tarifs attractifs, de mise en place de grands panneaux dans Melbourne, de sujets à la radio, à la télé, etc."

Autant de moyens qui pourraient permettre à NCT d’atteindre ses objectifs pour l’année prochaine : augmenter de 25 % encore le nombre de touristes australiens en visite en Nouvelle-Calédonie. "Tous marchés confondus, on a déjà récupéré 97 % des flux touristiques perdus après 2019, annonce Julie Laronde. Cette tendance est clairement boostée par l’Australie et la Nouvelle-Zélande, et dans une moindre mesure par la France. Parmi nos axes stratégiques de l’an prochain, on souhaite donc vraiment conforter les marchés de proximité comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande. On s’est fixés comme objectif global d’améliorer de 10 % la fréquentation touristique en 2024."

En 2018 et 2019, la liaison Melbourne-Nouméa représentait 30 000 passagers. © Anthony Tejero

L’Australie offre "une opportunité qui aujourd’hui n’est pas assez exploitée par les Calédoniens"

Raphaël Alla, représentant de la chambre de commerce française à Melbourne © Anthony Tejero 

 

En quoi les échanges peuvent-ils se développer entre la Nouvelle-Calédonie et Melbourne ?

Raphaël Alla, représentant de la chambre de commerce française à Melbourne, est également gérant de deux sociétés basées à Melbourne et Nouméa : À mon avis, il ne doit pas se passer grand-chose actuellement dans la mesure où j’entends assez peu de personnes autour de moi qui opèrent à la fois sur l’Australie et la Nouvelle-Calédonie. Donc déjà, le fait qu’il y ait une liaison aérienne directe entre Melbourne et Nouméa va aider, dans la mesure où elle simplifie le voyage et peut développer ces échanges. Il y a déjà quelques personnes, comme moi, qui travaillent des deux côtés, mais il y a aussi des structures en Australie qui sont francophiles et donc prêtes à accepter des Français comme la chambre de commerce française ou la french tech basée en Australie qui peuvent servir de point de départ pour des gens de Nouvelle-Calédonie qui souhaitent s’implanter ici.

Le marché calédonien peut-il intéresser des investisseurs australiens ?

Raphaël Alla : Intéresser des clients potentiels en Australie qui investiraient en Nouvelle-Calédonie, je ne suis pas sûr. En revanche, ce qu’il faut pour conquérir le marché australien, c’est bien sûr de venir présenter et vendre ses produits. Or de ce côté-là, la Nouvelle-Calédonie est complètement compétente sur certains produits qui sont technologiquement intéressants et compétitifs sur le marché. Si je prends mon exemple personnel, en informatique, quand je suis venu m’installer en Australie, j’ai réussi à vendre mon expérience que j’avais acquise à Nouméa, dans ce secteur.

Est-ce que l’ouverture de cette ligne peut également favoriser des passerelles pour les formations entre le Caillou et Melbourne ?

Raphaël Alla : Au niveau des chambres de commerce, cela peut être intéressant. Tout comme au niveau des étudiants pour qu’ils aient davantage d’échanges entre les deux pays. Cela peut ensuite renforcer des liens, puisque selon moi, aujourd’hui, un des points bloquants de la Nouvelle-Calédonie pour venir s’implanter d’Australie, c’est le problème de la langue. Les Calédoniens parlent mal l’anglais. Or si on envoie des jeunes se former en Australie, cela va à la fois créer des contacts mais aussi créer des compétences en anglais qui n’existent pas aujourd’hui et qui sont pourtant indispensables. Les Australiens sont prêts à accepter les gens qui ont des accents. C’est quand même assez positif dans la mesure où on n’a pas besoin de parler un anglais parfait car l’Australie est un pays d’immigration avec des gens qui viennent de tous les horizons.

Melbourne est-elle une ville que vous conseillerez à des Calédoniens qui éventuellement veulent s’établir ou développer leur activité ailleurs ?

Raphaël Alla : Tout à fait. L’Australie est un pays avec une croissance économique forte. Et c’est assez facile pour quelqu’un qui souhaiterait venir s’installer à Melbourne, à Sydney ou ailleurs d’y développer son activité. L’économie est en très bonne santé mais, surtout, l’échelle n’est pas du tout la même en Australie avec ses 25 millions d’habitants. On est à quelques heures de vol et je pense que c’est une opportunité qui aujourd’hui n’est pas assez exploitée par les Calédoniens.

 

Par Anthony Tejero pour Les Nouvelles Calédonniennes