L’Union Maritime de Mayotte obtient gain de cause : la délégation de service public accordée à Mayotte Channel Gateway pour la gestion du port de Longoni sera résiliée en septembre 2026. Le tribunal administratif a reconnu les manquements contractuels du délégataire mais privilégie la continuité du service. Détails avec notre partenaire France-Mayotte Matin.
L’Union Maritime de Mayotte a demandé au tribunal administratif de bien vouloir résilier la délégation de service public (DSP) du port de Longoni, attribuée par le Conseil départemental à Mayotte Channel Gateway en 2013. Elle considère que le délégataire ne respectait pas les termes de son contrat et que les conséquences pouvaient provoquer des troubles manifestes à l’intérêt général. Il y a deux semaines, l’audience a eu lieu au tribunal administratif de Mamoudzou. Le rapporteur public avait conclu à la nécessité de résilier cette DSP dès cet été, considérant que non seulement l’Union maritime était fondée dans sa demande, mais qu’elle avait démontré l’atteinte à l’intérêt général.
Hier, le tribunal administratif a rendu sa décision. Elle est très claire et ouvre une page d’incertitude profonde quant à la gestion du port. Dans un long exposé, le juge des contrats a rappelé tous les manquements du délégataire aux termes de son contrat, soulignant des prises de décision sans en informer le Conseil départemental, en omettant de transmettre des documents contractuels, en appliquant des tarifs aux utilisateurs du port en dehors du cadre légal, et en ne respectant pas des décisions de justice à son encontre. Cependant, le juge a été moins radical que le rapporteur public et n’a pas suivi toutes ses recommandations, insistant sur la nécessité de la continuité du service public, le port étant un outil majeur pour l’approvisionnement de notre île. Il était donc nécessaire de laisser le temps aux différentes parties de s’organiser en conséquence. Ainsi, le juge a donné raison à l’Union Maritime de Mayotte et a décidé de la fin de la DSP en septembre 2026, insistant sur la nécessité pour le Conseil départemental d’ajuster cette date à la réalité opérationnelle, permettant d’organiser l’après-DSP. Pour mémoire, le Conseil départemental et Mayotte Channel Gateway avaient demandé à ce que l’Union maritime de Mayotte soit déboutée.
C’est une décision qui était attendue, mais qui vient bouleverser de manière structurante la vie économique de notre île. Le Conseil départemental avait expliqué qu’il lui fallait trois ans pour trouver une autre solution juridique cohérente. Reste maintenant à savoir comment cette décision de justice va s’inscrire dans la vie économique et dans l’organisation du département, puisqu’il est non seulement question de créer un grand port maritime, mais également de poursuivre un vaste programme d’investissement au port de Longoni. Ce programme permettrait aux infrastructures portuaires de relever le défi du projet gazier, mais aussi de faire de Mayotte ce hub tant attendu dans le nord du canal du Mozambique. Le Conseil départemental n’a pas les moyens de ces investissements, pas plus que l’État. Mayotte Channel Gateway se proposait de réaliser ses investissements contre une prolongation de son contrat.
Comment cette décision sera-t-elle accueillie par le Conseil départemental et par Mayotte Channel Gateway ? Va-t-il y avoir des appels ? Les parties intéressées vont-elles se mettre d’accord sur une phase de transition ? Est-il possible que la délégation de service public se poursuive jusqu’à son terme, qui est, rappelonsle, fixé à 2028 ? Et surtout, comment cette décision de justice vient-elle modifier les termes du contrat, notamment en ce qui concerne les indemnités auxquelles aurait pu prétendre le délégataire ? De la même manière, l’arrêté tarifaire, qui n’a pas été publié par le Conseil départemental et qui a en partie conduit à la situation compliquée sur le port de Longoni, peut-il conduire la délégataire à se retourner contre le Conseil départemental ?
Et enfin, question cruciale pour la population, qui a parfaitement compris aujourd’hui le rôle central du port dans l’approvisionnement des magasins : que va-t-il se passer le 2 septembre 2026 si le Conseil départemental n’a pas réussi à trouver et à mettre en place une autre solution pour la gestion des approvisionnements ? Une décision qui sonne le glas d’une période compliquée au port de Longoni, mais qui avait tout de même permis, depuis l’arrivée de MCG, de repositionner le port dans son environnement et de lui donner une toute autre envergure.
L’avenir est désormais incertain autour d’une infrastructure vitale pour le 101ème département français.
Par France-Mayotte Matin