INTERVIEW. Laka, un court-métrage pour un autre regard sur Mayotte

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INTERVIEW. Laka, un court-métrage pour un autre regard sur Mayotte

Il y a quelques jours, près de 200 personnes ont pu découvrir en avant-première le film Laka, un court-métrage réalisé par Germain Le Carpentier et produit par le Mahorais Daniel Chebani Chamssoudine. Derrière ce projet qui sera diffusé dans quelques semaines à la salle de cinéma Alpajo : une équipe de passionnés, des mois de travail et une envie de faire avancer le milieu du cinéma à Mayotte. Outremers360 a rencontré les deux jeunes professionnels qui font tout pour que Laka dépasse les frontières de leur territoire.

Outremers360 : Si vous deviez en quelques mots nous raconter l'histoire de Laka, que pourriez-vous nous en dire ?

Germain Le Carpentier : Laka, c’est un conte mahorais dans le lagon de Mayotte : l'itinéraire d'une fille et son père, confrontés au vol de leur pirogue, sur fond de croyances ancestrales et de réchauffement climatique.

Outremers360 : Comment est née l'idée de ce court-métrage ?

Germain Le Carpentier : Ma rencontre avec mon co-scénariste Mohamed Allaoui, et notre goût commun très prononcé pour les contes et légendes à Mayotte. Mais aussi grâce à la mythique course de pirogues dans notre archipel. L'envie aussi de raconter une histoire, en shimaoré, dans l'un des plus beaux lagons de la planète.

Outremers360 : Pourquoi avoir choisi ce format plutôt qu'un autre ?

Germain Le Carpentier : Le court-métrage est une manière de s'essayer à un récit plus simple, pas forcément plus évident qu'un film long, mais qui nous aide à faire ses premières armes dans le cinéma. Mayotte n'avait pas de courts-métrages qui s'inscrivent dans le patrimoine, je crois qu'on souhaitait y poser une première pour le secteur cinématographique local.

Outremers360 : Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?

Germain Le Carpentier : Faire comprendre aux divers partenaires, la nécessité d'avoir un film représentatif de la culture de notre territoire. Le tournage en mer, n'a pas été de tout repos non plus, même si c'était fascinant chaque jour.

Daniel Chebani Chamssoudine : Produire dans un environnement où tout est décortiqué et où il faut aller chercher et taper à des portes, pour se faire comprendre et entendre, afin de fédérer autour du projet avec d'autres partenaires. Il y a encore énormément de spécificités à Mayotte et on doit se frayer d'autres chemins et innover avec des partenaires, dont ce n'est pas forcément leur mission à la base.

Outremers360 : Qu'est-ce qui vous a le plus marqué ?

Germain Le Carpentier : La place du lagon dans notre archipel volcanique, son mystère et sa beauté. J'avais l'impression chaque jour de l'explorer pour la première fois. Il y a aussi eu cette sensation agréable d'être quasiment seul dans ce grand espace marin, où peu de gens se croisent, à l'inverse de la circulation sur terre.

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Daniel Chebani Chamssoudine : Le huis clos du tournage dans un lagon et le dévouement de toute l'équipe. Ce qui m'a marqué aussi, c'est en tant que producteur, de réussir chaque jour, à ce que chacun rentre tranquillement chez soi après le tournage et ne manque de rien.

Outremers360 : Combien de temps a duré le tournage ?

Germain Le Carpentier et Daniel Chebani Chamssoudine : Le tournage a duré exactement cinq jours. Mais il y a eu deux mois de préparation et plusieurs mois de post-production. Le plus long ce n'est pas le tournage, même si c'est le plus intense. 

Outremers360 : Comment avez-vous constitué votre équipe de tournage ?

Germain Le Carpentier : Comme nous ne sommes pas très nombreux dans le secteur audiovisuel, on a tendance à tous se connaître. Pour ma part, j'ai proposé à des gens volontaires et responsables à l'idée de faire un projet inédit. Le casting a été plus classique. On a fait des annonces, mais finalement, Daniel m'a présenté Hafidati Combo, que j'ai trouvé authentique pour le personnage de Mariama, la fille. Ali Mounir, qui joue le père, est une connaissance, quand on écrivait le scénario avec Mohamed, on pensait à lui. Et puis quand on l'a mis à côté d'Hafidati : Daniel m'a dit, on dirait vraiment un père et sa fille.

Daniel Chebani Chamssoudine : J'ai tenu à travailler sur ce film avec Kader Abdou, que je connaissais depuis des années, à travers des travaux dans la société 2NZENA STUDIO. Il y a aussi Samir Houmadi, avec qui j'ai collaboré sur le spectacle Murmures des Décasés. Et nous avons choisi aussi des anciens élèves du Lycée des Lumières, en section cinéma, comme Mélina Attoumani et Nachmie Ahmed.

Outremers360 : Comment décririez-vous l'univers du cinéma à Mayotte ?

Germain Le Carpentier : Inspirant, mystérieux, mais surtout embryonnaire.

Daniel Chebani Chamssoudine : Il y a tout à faire. Et c'est ce qui est excitant.

Outremers360 : Qu'avez-vous ressenti de savoir que votre œuvre allait être projetée dans une salle de cinéma ?

Germain Le Carpentier : C'était une grande joie, dans l'idée de partager un film avec le plus large public.

Daniel Chebani Chamssoudine : Un rêve d'enfant qui se réalise chez moi. Je n'avais pas osé rêver aussi grand.

Outremers360 : Quelle est la suite après l'avant-première ?

Daniel Chebani Chamssoudine : La sortie au cinéma Alpa Joe à partir du 4 octobre, les Festivals internationaux, différentes projections prévues à La Réunion avec nos distributrices de la Kourmétragerie. Tout cela en accompagnant le mieux possible notre film et allez à la rencontre des publics. Laka va voyager pour représenter Mayotte à l'international. La copie sous-titrée en anglais est déjà entre les mains de certaines personnes.

Propos recueillis par H.A