L’Institut français des relations internationales (IFRI) vient de publier un rapport intitulé « L’Inde, un partenaire incontournable pour la France dans l’Indopacifique ? », rédigé par les chercheurs Mélissa Levaillant et Jérémy Bachelier. Ils observent que New Delhi, avec une population et un potentiel économique croissant, est devenu un pilier de la stratégie française en Indopacifique. L’Inde a dorénavant un rôle majeur dans les relations internationales et constitue un contrepoids important aux velléités chinoises dans la région.
Au fil des années, la France et l’Inde ont rapidement renforcé leurs relations. En 1998, Paris a été le premier pays à signer avec New Delhi un partenariat stratégique. En 2023 et 2024, leurs deux présidents se sont rencontrés à l’occasion de leurs fêtes nationales respectives. « L’Inde, par son poids démographique, sa position géopolitique et son potentiel économique est dorénavant un partenaire incontournable de la France au sein de la « méga-région » indopacifique », souligne l’IFRI.
Les deux pays partagent une feuille de route initiée en 2023 et intitulée « Horizon 2047 : tracer l’avenir du partenariat stratégique entre l’Inde et la France ». Cette dernière a pour objectif de fixer le cap de la relation bilatérale jusqu’au centenaire de l’indépendance de l’Inde. « Au-delà des ventes d’armes et des coopérations dans le domaine du nucléaire civil, la relation bilatérale se renforce par une convergence d’intérêts en Indopacifique dans des domaines aussi variés que la sécurité maritime, le cyber, le spatial, la lutte contre le terrorisme, le changement climatique, le développement durable ou l’économie bleue », précise le rapport de l’IFRI.
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« Alors que la Chine fait face à un vieillissement accéléré, l’Inde l’a dépassée depuis 2023 et représente un sixième de la population mondiale », écrivent les auteurs. Sa diaspora est active et influente dans les pays du Commonwealth, dans l’océan Indien, en Afrique de l’Est et en Asie du Sud-Est. Sur le plan économique, New Delhi représente le 5e produit intérieur brut mondial (PIB). « Sur le plan stratégique, s’ils partagent le même rejet d’une hégémonie chinoise en océan Indien, la France et l’Inde s’accordent aussi sur une approche « non antagoniste » envers Pékin, les deux pays ne souhaitant s’engager pas dans une confrontation directe, militaire ou économique », ajoutent les chercheurs.
Malgré leurs convergences, les ambitions de l’Inde en Indopacifique pourraient toutefois contrarier les intérêts français. « La doctrine indienne de « multi-alignement » géopolitique avec une grande hétérogénéité d’acteurs, pourrait aussi mettre à mal la cohérence des politiques entre Paris et Delhi », remarque l’IFRI. L’Institut observe notamment une proximité croissante avec les États-Unis, l’Australie, et le Japon, qui pourrait aboutir à terme à une éviction progressive de la France comme partenaire majeur. « Compte tenu de sa centralité dans la « stratégie indopacifique » française, la mise à mal de la relation bilatérale serait aujourd’hui difficile à compenser et aboutir à un risque de déclassement significatif dans la région. »
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Mais le niveau de confiance demeure quand même solide. Afin de renforcer la relation, il s’agirait notamment selon l’IFRI de mieux coordonner les actions de Paris et New Delhi dans les sommets régionaux, de diversifier la coopération industrielle, et de rééquilibrer une coopération opérationnelle jusqu’alors excessivement en faveur de l’Inde. En outre, « au-delà de l’IA et des technologies informatiques et numériques pour lesquels l’Inde est déjà identifiée en France, l’ampleur des défis auxquels fait face le sous-continent indien dans les domaines de l’agriculture, de l’eau, de la transition énergétique et de l’urbanisation, présentent autant d’opportunités pour les entreprises françaises », indique le rapport.
En conclusion, le ce dernier formule quelques recommandations pour renforcer la relation franco-indienne, entre autres : « mettre en place une stratégie française spécifiquement dédiée à l’Inde, afin de l’intégrer pleinement dans le débat stratégique français ; améliorer l’interarmisation et l’interopérabilité du partenariat, en s’appuyant sur les exercices franco-indiens déjà existants tels que Varuna, Shakti ou Frinjex ; établir une cartographie des points de convergence entre les deux pays, afin de mieux se soutenir mutuellement dans les grandes instances régionales ; et promouvoir une plus grande présence des entreprises françaises en Inde, à travers des mesures incitatives telles que des avantages fiscaux et des facilités administratives permettant d’y encourager les investissements français ».
PM
