Le Tahitien Kauli Vaast a obtenu lundi 5 août à Teahupo'o le premier titre olympique du surf français et la première médaille d'or olympique du sport tahitien, en battant avec panache en finale l'Australien Jack Robinson. La Réunionnaise Johanne Defay s’était, plus tôt, octroyée la médaille de bronze.
Habitant tout près du spot et porté par la ferveur de toute la Polynésie, le surfeur de 22 ans a pris les deux plus belles vagues d'une finale très relevée pour s'imposer quelques dizaines de minutes seulement après le bronze remporté par la Réunionnaise Johanne Defay.
« J'ai mis un beau score sur ma première vague et ensuite c'étaient les 15 minutes les plus longues de ma vie. Mais il n'y a eu plus de vague pendant 15 minutes... le mana était avec moi », a dit Kauli Vaast, en référence à la force surnaturelle de la culture polynésienne. « J'ai des étoiles dans yeux. Jamais j'aurais pensé être qualifié un jour et là je gagne. C’est pour tout le monde, c’est pour Vahine (Fierro) qui malheureusement a perdu tôt, c’est pour tout le monde ce résultat parce que c'est avec l'aide de tout le monde que j'ai pu faire ça ».
Prodige tahitien du surf, Kauli Vaast a pris l'ascendant sur la série dès sa première vague, notée 9.50, pour finalement obtenir un total de 17.67, contre les 7.83 de Jack Robinson, résigné lors des derniers instants. Pensionnaire depuis plusieurs années de la 2e division du surf mondial, les Challenger Series, Kauli Vaast a souvent été capable de battre les meilleurs surfeurs du circuit élite sur ce spot, comme en 2022 quand il a atteint la finale du Tahiti Pro sur invitation, après avoir battu en quart la légende Kelly Slater.
Démonstrations de joie
Il a grandi à Mahina, au nord de Tahiti, avant de s'installer avec ses deux parents véliplanchistes face à la vague de la presqu'île, rendue célèbre dans le monde entier au début des années 2000. Sa victoire a suscité rapidement des démonstrations de joie un peu partout à Tahiti. Sa mère, en revanche, n'a pas voulu voir son fils surfer : « Quand il fait les compétitions à Tahiti je fais le jardin », a déclaré Natou Vaast, se fiant aux cris des voisins pour connaître les résultats.
« Il nous a régalés ! Le voir gagner, c’est magnifique, d’autant qu’il y a cet historique derrière. Je suis vraiment fier de lui, après avoir vécu ces moments toute ma vie, c’est incroyable de le voir retransmettre ça », a salué le coach de l’équipe de France de Surf, le Réunionnais Jérémy Flores, lui-même premier français à avoir remporté l’étape tahitienne du WCT, en 2015. « Nous avons beaucoup parlé avec Kauli, je lui disais « si Teahupo’o te choisis, ça sera comme ça » ».
« Je ne pense pas qu’une médaille d’or olympique change tout, C’est magique, c’est un rêve, mais il a ses objectifs : se qualifier en Championship Tour et gagner ici, en CT à Teahupo’o. Alors il va profiter de ce moment, il le mérite et ensuite il va repartir au travail car il est jeune et qu’il y a encore beaucoup de boulot », a poursuivi le Réunionnais au micro de Radio 1 Tahiti. « C’est un bon gars, dans tout ce qu’il fait en dehors du surf. Il a une belle attitude, c’est un exemple pour beaucoup de jeunes, pour toute la communauté locale et pour la France. C’est magnifique et historique ».
Kauli Vaast avait éliminé son ami et coéquipier Joan Duru en quart de finale, puis le Péruvien Alonso Correa en demie. Il succède comme champion olympique de surf au Brésilien Italo Ferreira, titré en 2021 à Tokyo pour la première apparition du sport. Sa victoire dans la nuit de lundi à mardi à Paris, a permis à la France d’obtenir sa 13ème médaille d’or de ces Jeux à domicile.
Si Kauli Vaast a apporté la première médaille d’or au surf olympique français, c’est Johanne Defay qui lui a rapporté sa première médaille, en bronze celle-ci, en s'imposant lors de la petite finale face à la Costaricienne Brisa Hennessy. Johanne Defay a fait la différence (12.66) avec des manœuvres plus engagées que celles d'Hennessy (4.93).
La surfeuse française avait commencé sa compétition dans la douleur aux débuts des Jeux avec une blessure à la tête sur la première vague de sa première série. Elle avait été suturée sur le haut du front, avant de battre deux favorites à Teahupo'o : sa compatriote tahitienne Vahine Fierro, puis la championne olympique en titre Carissa Moore.
Elle a été battue en demi-finale par Caroline Marks, championne du monde 2023, à l'issue d'une série très serrée où les deux surfeuses ont terminé à égalité de points, mais où l'Américaine avait scoré la meilleure vague. C’est d’ailleurs l’Américaine qui a finalement décroché l’or chez les femmes, face à la Brésilienne Tatiana Weston-Webb.
Avec six victoires d'étapes en dix ans au sein du circuit pro et désormais une médaille de bronze olympique, Johanne Defay est largement considérée comme la plus grande surfeuse française de tous les temps. Arrivée dans l'élite à 20 ans après une enfance passée à La Réunion -où elle a appris à surfer-, Defay a été proche du sacre mondial plusieurs fois (3e en 2022, 4e en 2021, 5e en 2018) et avait terminé 9e pour la première apparition olympique du surf à Tokyo.
À Tahiti, elle faisait pourtant figure d'outsider car elle n'y avait jamais brillé. Actuelle 6e mondiale, la Française peut encore espérer jouer le titre de championne du monde le mois prochain aux États-Unis. En attendant, cette double victoire, en or et en bronze, marque la plus belle page de l'histoire surf français et tahitien, berceau de cette pratique devenue discipline olympique.
Avec AFP et Radio 1 Tahiti