Remaniement surprise pour apporter du sang neuf dans le spatial européen en pleine mutation: Stéphane Israël, patron du groupe français Arianespace ayant joué un rôle clé dans le développement de la fusée Ariane 6, sera remplacé en janvier par David Cavaillolès.
Le départ de Stéphane Israël, 53 ans, intervient quelques mois après le succès du vol inaugural, en juillet, d'Ariane 6, qui garantit l'accès de l'Europe à l'espace. Il souhaite quitter le groupe le 31 décembre pour "se consacrer à un nouveau projet professionnel", ont annoncé jeudi Arianespace et sa maison mère ArianeGroup, détenue à part égales par Airbus et Safran, dans un communiqué.
Son remplaçant David Cavaillolès est un polytechnicien de 36 ans qui a été conseiller ministériel chargé de la politique spatiale française de 2017 à 2019 avant de s'occuper des opérations stratégiques à Capgemini Financial Services France. "Il y a une grosse dimension politique dans cette nomination" qui a pour objectif de "redonner du souffle à Arianespace qui est à un tournant de son aventure face à de nouveaux enjeux qui arrivent", a déclaré à l'AFP Pierre Lionnet, directeur de recherche à Eurospace, fédération qui rassemble les industriels européens de l’espace.
Le nouveau patron "est particulièrement jeune, c'est du sang neuf", au moment où Arianespace est face à la "concurrence extrême" de l'entreprise américaine SpaceX d'Elon Musk, mais aussi d'une multitude de petits lanceurs ayant vocation à devenir grands et développés en Europe, poursuit l'expert.
Ariane 6 est par ailleurs "le client immédiat" pour le déploiement de la constellation de satellites européenne Iris² qui a pris du retard et dont le lancement a été annoncé à Bruxelles lundi, ajoute-t-il.
Départ sur une note positive
Ce remaniement est annoncé alors que la deuxième mission d'Ariane 6, qui sera son premier vol "opérationnel" avec le satellite d'observation militaire français CSO-3, initialement prévu en décembre, aura lieu à partir de la mi-février.
Après avoir eu à gérer les retards dans le développement d'Ariane 6 et l'échec du premier vol commercial du petit lanceur Vega C, Stéphane Israël part sur une note positive.
Il "a marqué l'histoire d'Arianespace à travers des étapes décisives, depuis l’apogée d’Ariane 5 jusqu’au vol inaugural d’Ariane 6 (...). Son bilan témoigne de sa vision stratégique et de sa capacité opérationnelle à porter l'excellence d’Ariane sur la scène mondiale", a déclaré Martin Sion, président exécutif d’ArianeGroup dont Arianespace est devenue filiale en 2017.
Le lanceur Vega C, cloué au sol pendant deux ans après l'échec de sa première mission commerciale ayant causé la perte de deux satellites, est pour sa part revenu en vol avec succès début décembre.
Dans l'attente d'Ariane 6, l'Europe avait été privée pendant un an d'accès à l'espace alors que les Soyouz n'étaient plus utilisés après l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022.
Après avoir consolidé la gamme de lanceurs Ariane 5, Vega et Soyouz, et soutenu le développement des lanceurs de nouvelle génération, Ariane 6 et Vega C, Stéphane Israël a réorienté l’offre d'Arianespace en passant des lancements doubles de satellites géostationnaires à des solutions adaptées aux grandes constellations en orbite basse et à la diversité croissante des satellites.
Ces initiatives ont permis d’atteindre en 2021 une cadence record de 15 lancements et de constituer un carnet de commandes de 30 lancements pour Ariane 6 et de 15 autres pour Vega C, souligne ArianeGroup.
Stéphane Israël aura supervisé depuis avril 2013 108 lancements, dont, récemment, des missions emblématiques comme celles du télescope James Webb de la NASA et de la sonde Juice de l’ESA. "Je suis heureux de laisser à mon successeur une entreprise qui peut s’appuyer sur un solide carnet de commandes pour multiplier les lancements à partir de 2025, et qui saura saisir avec Ariane 6 les opportunités d’un marché dynamique en pleine mutation", a souligné Stéphane Israël cité dans le communiqué.
Avec AFP