Nouvelle-Calédonie : Sans aide nouvelle, la fermeture de certains sites de nickel « paraît inévitable », selon un rapport

Nouvelle-Calédonie : Sans aide nouvelle, la fermeture de certains sites de nickel « paraît inévitable », selon un rapport

En Nouvelle-Calédonie, la fermeture de sites d'extraction et de transformation du nickel « paraît à ce jour inévitable » à défaut d'une « nouvelle intervention des acteurs privés et des pouvoirs publics », et malgré des soutiens « récents et massifs », indique un rapport remis mardi à la Première ministre Élisabeth Borne.

Le rapport de diagnostic, commandé par Matignon à l'Inspection Générale des Finances (IGF) et le Conseil Général de l'Économie (CGE) dans le cadre des travaux sur l'avenir institutionnel de l'archipel, est rendu public moins d'une semaine après le retour d'Emmanuel Macron d'une visite en Nouvelle-Calédonie, durant laquelle il a promis un « projet nickel d'avenir » pour rendre rentables les usines qui exploitent ce minerai.

Les éléments de diagnostic contenus dans le rapport alimenteront les réflexions d'un groupe de travail sur le nickel, qui, avec l'ensemble des parties prenantes, devra proposer « d'ici l'automne » des mesures pour « consolider l'avenir de la filière nickel », a indiqué Matignon dans un communiqué accompagnant la sortie du rapport.

Selon le texte, la « défaillance simultanée » des trois usines actuelles « conduirait à une augmentation du chômage sur le territoire d'environ 50% », à un « déséquilibre » des comptes sociaux de la Nouvelle-Calédonie, et à des coûts environnementaux importants qui devraient être soutenus au moins partiellement par les pouvoirs publics.

Une telle faillite serait d'autant plus dommageable qu'au plan mondial le nickel est l'un des métaux les plus recherchés de la transition énergétique en cours, surtout pour remplir les batteries des voitures électriques. La filière du nickel en Nouvelle-Calédonie pourrait « théoriquement représenter » à terme, « jusqu'à 85% » des besoins des giga-usines françaises de batteries en 2030, ou « 14% des besoins de l'UE en 2035 », explique le rapport.

Or « l'activité métallurgique n'est pas rentable » en Nouvelle-Calédonie, déplorent les experts : les trois industriels qui constituent l'essentiel de la filière (SLN, KNS et PRNC) « réalisent tous des pertes depuis plus de 10 ans ».

Les mines et usines métallurgiques calédoniennes ne produisent pas assez et trop cher, résume le rapport. Surtout face à « l'émergence d'autres opérateurs industriels », notamment en Indonésie, qui bénéficient d'une énergie beaucoup moins chère, subventionnée par l'État, et de coûts de main-d'œuvre cinq fois inférieurs à celui de la Nouvelle Calédonie, analyse le rapport.

Et deux d'entre elles sont confrontées à « un épuisement progressif » de leurs gisements les plus riches. Or, ces entreprises ont bénéficié de financements publics « considérables » : depuis 2016, l'État a octroyé « près de 700 millions d'euros de prêts » à deux d'entre elles en ouvrant « 540 millions d'euros de garanties ».

Création d'une « agence des participations de Nouvelle-Calédonie »

La filière néo-calédonienne se divise entre plusieurs entreprises qui exploitent du minerai brut pour l'exportation (sans activités métallurgiques), pour la plupart rentables, et trois entreprises intégrées qui possèdent à la fois des activités minières et métallurgiques. Elles emploient 5 035 salariés, soit 7,5% du total des salariés du secteur privé de l'archipel.

La Société Le Nickel (SLN) dont l'actionnaire majoritaire est le groupe français Eramet, est basée à Nouméa. Koniambo Nickel SAS (KNS), détenu à 51% par un actionnaire public et à 49% par le groupe minier anglo-suisse Glencore, est située en province nord, et Prony Resources Nouvelle-Calédonie (PRNC), dont l'actionnaire de référence est public et dont l'entreprise de négoce international de matières premières Trafigura possède 19% du capital, est située vers la pointe sud.

Pour assurer la viabilité du secteur, le rapport plaide pour des « transformations profondes » de la filière, via notamment une « intégration verticale » avec des acteurs européens, et la création d'une « agence des participations de Nouvelle-Calédonie » pour rationaliser l'actionnariat public en le réduisant progressivement.

Chacune de ces entités sera confrontée, « à plus ou moins long terme », à des besoins de financement. Selon le rapport, la SLN aura besoin d'une nouvelle aide de trésorerie dès « début 2024 ». Les besoins de financement de KNS sont estimés à « près d'un milliard de dollars d'ici 2026 ». Pour PRNC le besoin s'élèverait « entre 200 et 250 millions d'euros ».

Pour consulter le rapport  : Rapport sur l’avenir de la filière nickel en Nouvelle-Calédonie

Avec AFP