Le Royaume-Uni a trouvé un "accord historique" avec l'île Maurice sur la souveraineté de l'archipel des Chagos dans l'océan Indien, qui lui permet de conserver sa base militaire commune avec les Etats-Unis sur l'île principale de Diego Garcia, ont annoncé jeudi les deux gouvernements.
L'accord a aussitôt été salué par le président américain Joe Biden, qui a souligné que cette base jouait "un rôle essentiel dans la sécurité nationale, régionale et mondiale". Selon l'accord, qui met fin à un litige territorial de près de 60 ans, Londres pourra continuer d'opérer cette base au positionnement stratégique entre l'Europe, l'Inde et la Chine."Après deux années de négociations, il s'agit d'un moment charnière dans nos relations et d'une démonstration de notre engagement durable en faveur du règlement pacifique des différends et de l'Etat de droit", ont indiqué le Royaume-Uni et Maurice dans leur communiqué conjoint.
Depuis 1965, l'archipel est administré par Londres, qui y a installé une base militaire commune avec les Etats-Unis sur la principale île. Maurice, qui a obtenu son indépendance en 1968, revendiquait le territoire des Chagos et demandait le retour de l'archipel dans son giron. L'accord trouvé entre le Royaume-Uni et l'île Maurice sur la souveraineté de l'archipel des Chagos dans l'océan Indien marque "un jour inoubliable", s'est félicité jeudi le ministre mauricien des Affaires étrangères, Maneesh Gobin. "3 octobre 2024. Un jour inoubliable. Un jour pour commémorer la pleine souveraineté de la République de Maurice sur l'intégralité de son territoire", a écrit le ministre dans un message sur X, après l'annonce d'un accord entre les deux pays sur ce litige territorial vieux de près de 60 ans.
Des négociations sur la souveraineté de l'archipel avaient débuté en janvier 2023 avec le Royaume-Uni. "Ce gouvernement a hérité d'une situation dans laquelle le fonctionnement sûr et à long terme de la base militaire de Diego Garcia était menacé, avec une souveraineté contestée et des défis juridiques persistants. L'accord d'aujourd'hui garantit l'avenir de cette base militaire essentielle", s'est félicité le chef de la diplomatie britannique, le travailliste David Lammy, cité dans le communiqué.
Le Royaume-Uni reconnaît la souveraineté de l'île Maurice sur les îles Chagos. Mais "pendant une période initiale de 99 ans", Londres sera "autorisé à exercer des droits souverains à l'égard de Diego Garcia", "pour assurer la poursuite de l'exploitation de la base jusqu'au siècle prochain", est-il indiqué dans la déclaration commune.
Le Royaume-Uni a expulsé environ 2.000 habitants des Chagos vers Maurice et les Seychelles pour faire place à cette base. Des Mauriciens originaires des Chagos accusent le Royaume-Uni d'"occupation illégale".
En février 2023, Human Rights Watch (HRW) avait publié un rapport accusant le Royaume-Uni et les Etats-Unis de s'être rendus coupables de crimes contre l'humanité en déplaçant des populations indigènes. La concrétisation de cet accord est encore soumise à la finalisation d'un traité, a indiqué Londres.
Les îles Chagos, un litige international et un drame humain de près de 60 ans
La base de Diego Garcia revêt une importance stratégique considérable pour le Royaume-Uni et les Etats-Unis pendant la guerre froide, alors que la chute de Saïgon et la victoire des Khmers rouges au Cambodge ont amoindri les capacités militaires de Washington en Asie du sud-est, et que la marine soviétique étend son influence dans l'océan Indien. Après leur expulsion, les Chagossiens engagent plusieurs procédures judiciaires. La première, introduite en 1975, aboutit en 1982 au paiement de 4 millions de livres par le Royaume-Uni et l'octroi de terres sur l'île Maurice d'une valeur d'un million de livres. Maurice se tourne finalement vers l'ONU, où une résolution, non contraignante mais à forte valeur politique, est votée en 2019 par l'Assemblée générale, donnant à la Grande-Bretagne six mois pour rétrocéder l'archipel à Maurice. En janvier 2023, les deux gouvernements entament des discussions, qui ont abouti jeudi à un accord "historique". |
Avec AFP