Ancien ingénieur-chercheur dans le nucléaire, il y a six ans, Mohamed El Mazzouji décide de s’installer à La Réunion. Depuis, il œuvre pour rendre l'excellence éducative accessible aux familles modestes à travers Educ-Up, entreprise sociale et solidaire qu’il a fondée. La structure, qui connaît une croissance exponentielle, multiplie les distinctions. Mohamed El Mazzouji intègre ainsi cette année le palmarès Choiseul Outre-Mer 2025 en partenariat avec la BRED BANQUE POPULAIRE, qui distingue les 40 ultramarins de moins de 40 ans dynamisant l’économie locale. Une reconnaissance qui couronne six années de travail acharné à faire de l'inclusion éducative le cœur d'un modèle économique.
Comment passe-t-on de l'énergie nucléaire à l'éducation inclusive ? C’est la question que nous avons posée à Mohamed El Mazzouji, fondateur d’Educ-Up, entreprise visant à démocratiser l'éducation via des services de garde éducative, d'accompagnement scolaire ou encore de formation dédiée aux professionnels de l'accompagnement. « Il y a eu deux événements déclencheurs dans ma vie », explique-t-il. « Le premier, c'est que je viens d'une famille très modeste où mes parents sont analphabètes tous les deux. J'ai constaté que les enfants avec lesquels j'ai grandi autour de moi ont arrêté l'école à 15 ans, 16 ans. La réussite scolaire n'existait pas. Je suis ce qu'on appelle une anomalie statistique. J'avais envie de créer quelque chose qui permettrait à des enfants, mais aussi à des parents issus du même milieu que moi, de renforcer la réussite éducative. »
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La conviction se renforce lorsque Mohamed El Mazzouji devient parent. « J'ai été confronté moi-même aux enjeux éducatifs à la maison, comprendre comment je pouvais, en tant que parent, proposer un meilleur environnement éducatif à mon enfant. Je me suis intéressé à ce qui existe en termes d'accompagnement à domicile et je me suis rendu compte qu'il n'y a pas grand-chose. On parle de garde d'enfants, on parle de nounous, et ce n'est pas du tout éducatif. Je me suis dit que je ne suis pas le seul, en tant que parent, à avoir ce type de besoin. C'est là que j'ai créé ce type de service accessible à tout le monde, notamment aux familles modestes, avec une approche éducative éprouvée, celle de Maria Montessori. »
En 2019, il décide de quitter l’Hexagone pour La Réunion. « J’avais fini ma dernière mission en région parisienne et j’avais besoin de changer d’environnement. J'avais entendu beaucoup de bien de l'île de La Réunion et j'ai choisi de m'y installer à titre personnel. Depuis, je m’épanouis professionnellement et personnellement sur ce territoire qui m’a accueilli. »
Un impact social massif
Lorsque Mohamed El Mazzouji décide de se lancer pleinement dans l’aventure entrepreneuriale, le Réseau Initiative Réunion lui accorde un prêt d'honneur de 30 000 euros. « Je dis souvent que le plus important, ce sont les premiers 30 000 euros qui m'ont donné confiance. » À ce soutien financier s’ajoute rapidement l’accompagnement du Village by CA Réunion, accélérateur de start-up du Crédit Agricole, qui joue un rôle clé dans la structuration du projet. L’intégration de cet écosystème entrepreneurial permet à Educ-Up de consolider son modèle, de bénéficier d’un réseau de partenaires et de s’inscrire durablement dans un environnement bienveillant, propice au développement de l’innovation sociale. Portée par cet écosystème réunionnais, l’entreprise amorce alors une trajectoire de croissance rapide, alliant impact social et performance économique, jusqu’à devenir l’une des entreprises ultramarines les plus dynamiques de sa génération.

Depuis, Educ-Up a été désignée Champion de la croissance dans l’éducation par Les Echos et Statista, et ce pour la troisième année consécutive. L’entreprise sociale et solidaire est également dans le classement 2025 du Mouvement Impact France en tant que licorne à impact. L’indice met en lumière les 120 start-ups à impact françaises les plus prometteuses. Educ-Up a aussi été désignée Prix Coup de cœur Medef Business Awards 2025. « L’objectif a toujours été de concevoir et développer des programmes éducatifs innovants qui permettent d'accompagner toutes les familles dans une démarche qualitative et inclusive, et cela peu importe les spécificités des enfants. Nous nous inscrivons aussi dans une démarche d'accessibilité, c'est-à-dire peu importe les revenus des familles. » Le groupe déploie aujourd'hui quatre programmes : Domissori propose des services de garde d'enfants éducatifs et du soutien scolaire à domicile. « On recrute des éducateurs ou des intervenants à domicile, formés et accompagnés pour délivrer ce service hautement qualitatif. Aujourd'hui, c'est près de 250 salariés équivalents temps plein. En nombre physique, on est à près de 700, parce que la majorité sont à temps partiel. » La structure est présente dans 15 départements, de La Réunion à l’Hexagone.
Edacademy, le deuxième pilier, forme en ligne les professionnels de la petite enfance et du service à la personne. « On a un taux de réussite aux diplômes de 100 % et un taux de mention très bien de près de 50 %. Ce format innovant et accessible permet d'obtenir des résultats nettement supérieurs à ceux d'une école physique. En 2024, un peu plus de 1 000 apprenants sont passés par l'école. » Pour garantir l'accessibilité financière, le dispositif Ed’ Solidaire « a pour vocation d'identifier les parents en situation de précarité, de les accompagner et de leur accorder des bourses financières leur permettant de bénéficier de prises en charge à 100 % des services à domicile ». Enfin, Mariia, lancé en 2025, est un coach parental par intelligence artificielle « entraîné avec toute l'œuvre de Maria Montessori, accessible 24 heures sur 24 par téléphone, pour sortir les parents de l’isolement parental, notamment les familles monoparentales ».

Une structure en pleine croissance
Après avoir réalisé, en 2023, la plus grosse levée de fonds jamais enregistrée par une start-up des Outre-mer, Educ-Up maintient le cap. « On est passé d'une start-up qui brûle du cash à une entreprise mature, autonome, avec un modèle économique performant », se réjouit son fondateur. Le groupe vient d'intégrer un programme de Bercy dédié aux PME à fort potentiel. « Ce programme accompagne des PME à devenir des ETI, des entreprises de taille intermédiaire qui font plus de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires. L'objectif, c'est de devenir un acteur national capable de proposer ces services sur l'ensemble des territoires. »
Et pour 2026, Mohamed El Mazzouji nourrit de grands projets. « Pour accélérer notre développement, on a décidé de franchiser Domissori. L'un des moyens de toucher des territoires plus rapidement est d'identifier un potentiel entrepreneurial local, aligné avec nos valeurs, qui pourrait développer l'entreprise en tant que franchisé. On ne crée pas seulement des emplois, on crée aussi des patrons qui développent une économie locale au travers de nos activités. » Si le fondateur d’Educ-Up vise l’Hexagone en termes d’expansion, le département voisin de La Réunion est aussi, pour lui, un territoire prioritaire. « Il y a des enjeux éducatifs énormes à Mayotte. Le département fait partie des territoires prioritaires sur lesquels on aimerait intervenir dans les prochaines années. »
En attendant, c’est depuis Saint-Denis, où se situe le siège de la structure, que le projet se déploie. Six ans après son arrivée, le chef d'entreprise fait le bilan : « Je suis très reconnaissant de ce que m'a apporté l'île de La Réunion. Je suis arrivé seul, je ne connaissais personne. L'île m'a offert un environnement bienveillant dans lequel je pouvais m'exprimer librement. Je pense que si j'avais tenté de développer mon concept en région parisienne, je n'aurais pas eu le même succès. »
Un ancrage réunionnais qui a permis de faire d'Educ-Up l’une des entreprises françaises les plus prometteuses à suivre dans les prochaines années.























