TRIBUNE. « La France des trois Océans : réinvestir notre patrimoine dans sa diversité » par Stéphanie Atger

TRIBUNE. « La France des trois Océans : réinvestir notre patrimoine dans sa diversité » par Stéphanie Atger

Dans une tribune sur « la transmission d’une histoire commune », la députée de l’Essonne, Stéphanie Atger appelle à « penser l’évènement pour ne pas succomber à l’actualité », citant la philosophe Hannah Arendt. Elle cite notamment les exemples de Mémorial ACTe en Guadeloupe, du Grand livre des discriminations, la place des cultures ultramarines dans les programmes scolaires ou encore, l’entrée au Patrimoine immatériel du Gwo Ka et du Maloya. 

La transmission d’une histoire commune est une question éminemment politique. Les récents évènements l’ont montré, la population française, notamment en Outre-mer, entretient une relation complexe avec son récit national. Toutefois, pour citer la philosophe Hannah Arendt, dans les tourments de l’immédiateté, il faut penser l’évènement pour ne pas succomber à l’actualité. C’est l’exercice auquel nous, responsables politiques, devons-nous atteler.

Dans un monde en mouvement où la constance du changement est la seule donnée pérenne, l’enjeu est moins le déboulonnage de statues, mais le constat de la persistance d’obstacles dans la transmission et l’appropriation de notre récit commun. Durant ces moments, il convient de se concentrer sur ce qu’il y a de plus solide et fédérateur au sein de notre République : Nos institutions.

À cet effet, s’appuyer sur notre patrimoine est idoine. Je parle de nos écoles, de nos musées, de nos centres culturels et associatifs qui s’attèlent à rendre notre récit national visible et lisible. En conséquence, notre responsabilité est de s’émanciper de labels réducteurs et permettre à tous les français de voir des carrefours en lieu et place des obstacles.

En ce qui concerne nos départements et régions d’Outre-mer, nous devons identifier les moyens de réserver une place aux héros et aux héroïnes emblèmes de ces territoires.

À l’échelon local, nos territoires nous montrent l’exemple. Inauguré en Guadeloupe en 2015, le Mémorial ACTE se veut être un espace à visée émancipatrice. À ce titre, sa mission se décline en plusieurs activités : la recherche académique, les ateliers pédagogiques ou encore l’expression d’artistes.

Le Grand Livre des discriminations, résultat d’une mission portée par la délégation aux Outre-mer à l’assemblée nationale, met en exergue les initiatives de la ville de Bordeaux 2017 pour mieux expliquer l’appellation des rues portant les noms d’esclavagistes avec des QR codes mentionnant les fonctions et le nombre d’expéditions financées.

En complément, ce même rapport préconisait de réserver une place aux cultures ultramarines dans les programmes scolaires nationaux, à la fois en histoire, géographie mais aussi en littérature ; tout en évoquant la possibilité d’inscrire ces questions aux concours nationaux.

Enfin, en 2015, la révision des programmes scolaires a intégré l’histoire de l’esclavage dans différentes matières dans ces départements, notamment en littérature avec la connaissance des lettres créoles. L’apprentissage de ces langues, qui portent les mémoires de l’esclavage en leur sein, est un socle pour inculquer cette histoire de manière ludique.

Le renforcement de leur instruction pourrait passer par une augmentation du nombre d’heures pratiquées pourrait permettre une transmission plus fluide et plus dense des cultures de notre France des Trois Océans. Je parle, à titre d’exemple, du Maloya réunionnais ou du Gwo Ka guadeloupéen, genres musicaux entrés au patrimoine immatériel de l’humanité de l’UNESCO respectivement en 2009 et 2014.

Ce tour d’horizon, non exhaustif, nous montre néanmoins que nous disposons d’alternatives accessibles. Il ne nous reste plus qu’à nous en saisir. 

Stéphanie Atger, députée de la 6ème circonscription de l’Essonne.