Dans son nouveau rapport annuel sur la conjoncture financière des collectivités territoriales, les analyses de la Cour des comptes sur les Outre-mer portent sur les départements et régions d’Outre-mer (DROM) qui relèvent de l’article 73 de la Constitution, à savoir la Guadeloupe, la Guyane, Mayotte, la Martinique et La Réunion. L’étude constate une situation financière stable pour l’année 2024, en dépit de problèmes de trésorerie pour un grand nombre d’entités locales.
En 2024, les produits réels de fonctionnement des DROM ont connu une progression modérée (+2,2%). Leur évolution a été ralentie par la poursuite de la baisse des recettes de droits de mutation à titre onéreux (DMTO, -14,2%, soit un niveau similaire à celui des collectivités hexagonales). « Les charges réelles de fonctionnement (8,7 milliards d’euros) ont moins progressé que les produits (+1,9%). Dans ces conditions, l’épargne brute (1,3 Md€) a augmenté (+4,3%). L’épargne nette des remboursements d’emprunts (0,8 Md€) a en revanche diminué (-4,8%) », indique le rapport.
« L’encours de l’endettement financier (6,2 Md€) a un peu diminué (-0,4%), tandis que la trésorerie (1,7 Md€) a un peu augmenté (+2,5%). Fin 2024, elle représente en moyenne 2,3 mois de charges de fonctionnement », ajoute l’étude. Dans l’ensemble, le ratio de désendettement des DROM s’est amélioré au cours de la période récente. Sur l’année 2024, il est plus favorable que celui des collectivités de la France hexagonale. Les collectivités de Martinique et de La Réunion conservent cependant un ratio plus élevé que leurs homologues de l’Hexagone.
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Au niveau des recettes de fonctionnement, la Cour des comptes observe qu’en 2024, les DROM ont perçu 4522 euros par habitant, soit 19% de plus que les collectivités de l’Hexagone. Cet écart recouvre cependant d’importantes différences. Ainsi la Guadeloupe, la Martinique et La Réunion ont reçu plus de recettes que les régions de France hexagonale (41%, 24% et 38% respectivement). Par contre Mayotte fait figure de parent pauvre, avec 26% de recettes par habitant de moins que dans l’Hexagone. « L’appréciation du niveau des recettes des collectivités d’Outre-mer doit toutefois tenir compte des écarts des prix d’achat des biens et services par rapport à la métropole, avant même l’application de l’octroi de mer et de la TVA, et des écarts de rémunération d’une partie de leurs fonctionnaires et agents contractuels (« sursalaires » pouvant atteindre jusqu’à 40 % du traitement indiciaire et même 53% à La Réunion) », note le rapport.
Malgré leurs recettes relativement avantageuses, le poids des charges de personnel et les surcoûts liés aux achats de biens et services freinent la capacité des DROM à investir. Selon la Cour des comptes, le niveau d’épargne brute du « bloc communal » ultramarin est nettement inférieur à la moyenne du « bloc communal » hexagonal (11,6% des produits de fonctionnement contre 17% pour l’année 2024).

Le rapport souligne que malgré des progrès, des situations de trésoreries demeurent fragiles pour un grand nombre de DROM. Cela concerne essentiellement des communes et des « entités satellites » telles que les centres communaux d’action sociale et les caisses des écoles. Par ailleurs, les territoires ultramarins sont surreprésentés dans les avis budgétaires des chambres régionales des comptes (CRC). « Les difficultés financières des communes ultramarines concernées sont telles que les CRC sont saisies dans le cadre du contrôle budgétaire pour vérifier l’équilibre budgétaire, l’ampleur du déficit et le plus souvent proposer un plan de redressement sur plusieurs années, puis, chaque année, vérifier que les collectivités prévoient les mesures suffisantes pour le rétablissement de leur équilibre financier », précise la Cour.
En plus des tensions de trésorerie, les retards de paiement à leurs fournisseurs constituent un problème pour les DROM. Ils dépassent en moyenne soixante jours dans plus d’une entité locale (notamment un sur cinq en Guadeloupe et un sur quatre en Martinique). En outre, « au regard des éléments communiqués à la Cour par le réseau des Urssaf, des collectivités d’Outremer et des satellites de ces dernières étaient redevables de près de 67 M€ de cotisations et de contributions sociales fin 2024, au titre d’années d’exigibilité remontant parfois jusqu’à 2018 », déplore le rapport.
PM