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Le Web doc « 4 novembre 2018 – Le Temps de l’Identité » revient sur le premier référendum calédonien pour l’accès du territoire à l’indépendance. Un résultat très clivé avec 56,7% de NON contre 43,3% de OUI, pour un scrutin marqué par le fait identitaire entre Kanak et “Non-Kanak”. Le film, à travers les interviews de 15 personnalités calédoniennes et plusieurs faits marquants de l’histoire récente du pays, explore cette question et cette quête des identités en Nouvelle-Calédonie. Interview de Maxime Lebras, réalisateur du documentaire et fondateur de la chaîne ITV NC.
Outremers360 : Côté pratique déjà… Quand va sortir le documentaire ?
Maxime Lebras : C’est un “web-doc” de 55min qui sort ce dimanche 13 septembre sur NCI (www.nci.nc) plateforme de vidéos streaming Calédonienne.
Peux-tu nous raconter la genèse du projet ?
La production du film a été lancée en 2017, avec comme idée de départ de faire le suivi d’un processus inédit dans l’histoire de la décolonisation avec la fin de l’accord de Nouméa et le premier référendum d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie. Et ce à travers des interviews de personnalités politiques, de chercheurs et d’universitaires, capable de nous éclairer sur les futurs institutionnels possibles pour le territoire.
Combien d’interviews ont été menés, pour combien à l’écran ?
Environ 40 personnes au titre du film mais près d’une centaine à travers ITV NC, média web partenaire du projet. Sur le territoire mais également en France, et sur pratiquement tous les aspects de la question : juridique, sociale, historique, économique et culturelle. Pour ce premier film, centré sur la question de l’identité, nous avons retenu une quinzaine de témoins afin que sa durée puisse conserver un format court de 55 minutes.
On distingue des volets bien distincts dans la construction du film, comment as-tu voulu traiter le sujet ?
A travers le score surprise du 4 novembre 2018, tout d’abord. Les instituts de sondage, les politiques loyalistes et les médias nous promettaient un score de 70% voire de 80% de NON à l’indépendance. A ce moment, on nous expliquait que ce serait l’avènement d’un peuple Calédonien, métissée, né des accords de Matignon et de Nouméa. Ou tout simplement que les Calédoniens ne seraient pas assez fous pour se priver des 150 Milliards de Francs injectés chaque année par la métropole sur le territoire. Au final, un score de 56,7% de NON contre 43,3 de OUI…
Un tel résultat, si on le calque sur un corps électoral composé de 54% de citoyens de droit commun (personnes d’origine européennes, océaniennes et asiatiques) et 46% de droit coutumier (kanak), témoigne de la dimension identitaire du clivage.
Le film s’attarde sur cette question, et pas seulement au prétexte du référendum du 4 novembre 2018. La levée du drapeau du FLNKS, la place accordée à l’identité kanak dans l’Accord de Nouméa, la quête identitaire chez les “non-kanak”, ou encore les provinciales de 2019 et l’avènement de l’Éveil Océanien, viennent nourrir la réflexion.
Passant par la relecture de l’Accord de Nouméa, le film s’intéresse ensuite à la question institutionnelle, avec la solution du fédéralisme et de la souveraineté partagée. Enfin, nous tenions à évoquer la question du contrat social, à travers la question des inégalités qui, malgré le temps et les efforts, se maintiennent encore.
Qu’apprend-on dans ce documentaire ?
Ce web-doc, en toute humilité, essaie de tirer certains enseignements du 4 novembre et par là-même de dresser une forme de bilan de l’Accord de Nouméa sur la question identitaire, statutaire et sociale.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans la réalisation du projet ?
Le plus difficile, après plusieurs centaines d’heures d’interviews, fut de choisir les extraits à retenir. On tenait à faire un film court, le plus accessible possible. Et au pays du palabre, ça n’a rien d’évident. On a renoncé à beaucoup d’extraits. Jean-Louis d’Anglebermes sur la question sociale et économique, Philippe Michel et Louis Mapou sur la souveraineté partagée, Luc Steinmetz sur le fédéralisme, Jean-Yves Faberon sur la question du fédéralisme… pour ne citer qu’eux. Mais il fallait procéder par étape, et je tenais d’abord à m’attarder sur cette question identitaire et les interviews retenues l’ont été à ce titre.
Propos recueillis par Amélie Rigollet
Intervenants du documentaire :
– Le docteur Pierre Christophe Pantz, docteur en géopolitique des territoires Kanak
– Pierre Breteigner, négociateur des Accords et ancien proche conseiller de Jacques Lafleur
– Jean-Claude Briault, auteur d’un essai intitulé “CALDIENS, pour une nouvelle identité Calédonienne”
– Emmanuel Tjibaou, directeur de l’ADCK, l’agence de développement de la culture kanak, (Centre Culturel Tjibaou)
– Nicolas Metzdorf, président du parti politique Générations NC et fondateur du collectif “Pour un Drapeau Commun”
– Sonia Backès, présidente de la Province Sud
– Rock Wamytan, président du Congrès
– Didier Poidyaliwane, membre du gouvernement en charge des questions identitaires
– Samuel Gorohouna, chercheur à l’Université de la Nouvelle-Calédonie
– Raymond Guepy (décédé cette année 2020), président de la fondation des pionniers de Nouvelle-Calédonie
– Elie Poigoune, président de la Ligue des Droits de l’Homme et du Citoyen de Nouvelle-Calédonie
– Stéphane Renaud, directeur de l’institut de sondage Quid Novi
– Philippe Germain, ancien président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie
– Brieux Frogier, fils du sénateur Pierre Frogier
– Mila Tukumuli, président de l’Eveil Océanien.