C’est une première en Polynésie : des constructions qui utilisent un béton contenant du plastique recyclé sont mises en œuvre par un promoteur local, Jean-Luc Cholet de Demeures de Tahiti, à travers sa société de construction MCP. Il souhaite que l’ensemble du secteur adopte ce procédé, pour une économie de 15 à 30% en agrégats. La Brasserie de Tahiti, qui génère et exporte plusieurs centaines de tonnes de déchets plastiques par an, veut aussi s’impliquer dans ce projet. Un sujet de notre partenaire Radio 1 Tahiti.
Réduire le coût des matériaux de construction, limiter le prélèvement d’agrégats dans les rivières et les carrières locales, tout en recyclant des déchets plastiques qui sont habituellement exportés pour traitement : c’est ce qu’ont initié le promoteur Demeures de Tahiti et sa société de construction MCP en mettant en œuvre un nouveau type de béton.
« Sur la base d’un article qui a été écrit au Maghreb il y a une dizaine d’années, j’ai mené une expérience qui est de substituer une partie des agrégats de rivière par du plastique broyé dans la fabrication du béton », explique Jean-Luc Cholet, fondateur de Demeures de Tahiti. Sur le chantier de deux villas, sur les hauteurs de la commune de Punaauia à Tahiti, les ouvriers puisent dans un « big bag » de fragments de plastique pour les mélanger au ciment et à l’eau. Chaque toupie de béton fait l’objet de prélèvements qui sont expédiés au Laboratoire des travaux publics.
« On a reproduit les essais en laboratoire localement et ils sont concluants. On s’est aperçu qu’on avait des bonnes résistances mécaniques du béton obtenu. C’est pour ça qu’on a décidé de l’employer dans les parties non structurelles (non porteuses, ndlr) de nos ouvrages : maisons, immeubles d’appartements, voirie. Ça va être des ouvrages comme le dallage sur remblai, le béton de propreté. On peut même en faire des parpaings ». Ce béton nouvelle formule peut représenter « jusqu’à 20% de l’ouvrage d’une maison, poursuit-il, donc nous espérons économiser entre 15 et 30% des agrégats. »
Clément Le Sourd, chef de projet chez MCP, souligne à la fois l’adhésion des équipes sur le terrain, conscients de participer à un projet novateur, et la dimension durable de la démarche. « Il y a un bon engouement au sein de toute l’équipe de construction, ils sont impliqués », dit-il, et il espère que l’ensemble du secteur en Polynésie bénéficie de cette innovation.
Pour Jean-Luc Cholet, son béton nouvelle formule est l’avenir : « On voulait être les premiers, mais j’espère qu’on va inspirer les autres. Ce qu’il faudrait, c’est inciter toutes les entreprises du BTP à faire de même. Si toutes les entreprises du BTP agissent de la même façon, on pourra recycler 100%, tout au moins s’approcher de recycler l’ensemble des plastiques rejetés dans la nature. Au lieu de les exporter, les faire traiter avec un gros bilan carbone, du fret maritime, etc. »
L’entrepreneur projette de monter une start-up pour sourcer et transformer la matière plastique destinée au béton. Potentiellement, dit-il, il est envisageable de réutiliser aussi les pneus ou les déchets de chantier en PVC. « On va organiser avec la Brasserie de Tahiti (qui représente un gisement de plastiques à recycler de plus de 600 tonnes par an) la collecte de tous les déchets plastiques pour les broyer et les mettre à disposition de toutes les entreprises du BTP. »
Caroline Perdrix pour Radio 1 Tahiti