©Loïc Venance / Jean-François Monier / AFP
François Fillon, Alain Juppé et les Outre-mer. Les enjeux économiques, institutionnels, sociaux et environnementaux sont décisifs, tant pour ces Collectivités de la République que pour tout le pays. Ils n’ont pourtant provoqué aucun débat pendant cette campagne. À 5 jours du 2ème tour de la primaire de la droite et du centre, Outremers360 est allé interroger les états-majors de chaque finaliste. Quelles seraient leurs stratégies, quelles priorités retiendraient-ils, quels choix feraient-ils et quelles sociétés ultramarines voudraient-ils contribuer à développer s’ils parvenaient à fonction suprême en mai prochain? Voici les réponses d’Olivier Magnaval et de Laurent Laviolette, respectivement membres des équipes de François Fillon et de Alain Juppé, interrogés ensemble à Paris dans un climat apaisé.
Questions à :
Olivier Magnaval, membre de l’équipe de campagne de François Fillon pour l’Outre-mer
A l’issue du premier tour de la primaire de la droite et du centre quel est votre état d’esprit ?
Il y a eu beaucoup de joie et d’émotion partagées avec l’équipe du QG. François Fillon y a toujours cru : il a communiqué cette force extraordinaire à ses équipes. Après le premier débat, on a senti que les français découvraient qu’ils avaient enfin un candidat, solide et sérieux, qui propose une véritable alternative pour redresser notre pays. Le vote de dimanche n’est pas un vote par défaut, c’est une véritable adhésion qui explique ce score que personne n’avait prévu. Aujourd’hui, nous sommes totalement concentrés sur le second tour. Comme tous les compétiteurs, François Fillon sait qu’un match n’est jamais gagné avant le coup de sifflet final !
Comme à l’accoutumé les Outre-mer sont le parent pauvre des débats des primaires de la droite et du centre comment expliquez-vous cette situation ?
Il ne faut pas confondre la couverture que proposent les médias de métropole et le travail ou les préoccupations des candidats. Or, les Outre-mer sont bien présents dans le programme de François Fillon! Regardez son programme accessible sur son site. Aucun autre territoire de la République ne bénéficie d’un programme spécifique – attention je ne dis pas différent – qui ajoute aux mesures nationales des propositions pour répondre aux problématiques particulières de nos compatriotes ultramarins. Mais, c’est vrai, on ne peut pas nier le risque de décalage. Sur ce point j’ai deux préoccupations : comprendre la faible participation au premier tour des primaires en Outre-mer, et contrer les conclusions hâtives et polémiques qu’ont pu susciter les propos de François Fillon sur la « colonisation ». Il s’en est expliqué clairement devant tous les Français lors du deuxième débat, en répondant calmement à l’interpellation caricaturale d’Elie Domota qui, elle, n’a sûrement pas servie les Outre-mer. Je regrette d’ailleurs que cette semaine soit celle du dénigrement du programme de François Fillon qui ne sert ni le débat, ni la cause de ceux qui emploient cette méthode. Mais, François Fillon est en tête et il est devenu la cible !
François Fillon, lors de son déplacement aux Antilles et en Guyane, a dit clairement qu’il ne remettrait pas en cause les sur-rémunérations des fonctionnaires
Quelles perceptions les Outre-mer, les ultramarins ont de votre candidat ?
François Fillon est perçu par les ultramarins, comme par tous les Français, comme un homme politique sérieux, solide et intègre, fidèle à ses convictions gaullistes. Ils ont apprécié le Premier ministre – rappelez-vous sa popularité. Ils ont découvert pendant la campagne des primaires l’homme tenace, qui a tracé son sillon avec constance. Sa sérénité, son calme et sa force de conviction auront marqué les débats du premier tour. Sa stature d’Homme d’Etat est désormais une évidence pour tous.
En cas de victoire à l’élection présidentielle de 2017, comment François Fillon répondra-t-il aux attentes des Outre-mer en matière de chômage et d’attractivité économique ?
Le programme économique de François Fillon, ce sont des mesures inédites par leur ampleur pour lutter contre le fléau du chômage qui mine les Outre-mer.
François Fillon veut d’abord répondre aux besoins concrets des entreprises, avec une réduction massive du coût du travail grâce aux allègements de charges sociales qui sont plus efficaces que le très lourd CICE inaccessible aux PME et aux TPE, une simplification de la défiscalisation pour relancer l’investissement productif, une simplification de toutes les normes qui brident l’activité et ne sont pas adaptées aux spécificités des Outre-mer.
II veut ensuite attirer dans les Outre-mer les talents et les capitaux, avec une orientation de l’épargne nationale vers le financement des PME ultramarines, pour pallier le manque de capitaux des entreprises, et une dotation de continuité territoriale pour les créateurs d’entreprises pour faire revenir de jeunes diplômés ultramarins.
François Fillon fait le choix de l’innovation avec une adaptation du « Programme d’investissement d’avenir » pour, par exemple, l’introduction effective du très haut débit sur les zones d’activité tertiaire, la création de formations numériques d’excellence ou encore le développement et la mise en réseau des structures d’accompagnement de startups Outre-mer.
François Fillon veut enfin développer les secteurs-clefs des Outre-mer comme le tourisme, l’agriculture, la transition énergétique et environnementale et le BTP qui restent des pourvoyeurs importants d’emplois.
En cas de victoire allez-vous suivre les recommandations de votre parti sur la suppression progressive de la sur-rémunération des fonctionnaires en Outremer ?
François Fillon, lors de son déplacement aux Antilles et en Guyane, a dit clairement qu’il ne remettrait pas en cause les sur-rémunérations des fonctionnaires pour ne pas fragiliser les économies d’Outre-mer.
Votre candidat remettra-t-il en cause l’existence d’un Ministère des Outre-mer ?
Bien au contraire, François Fillon souhaite une administration forte, capable de mieux faire entendre la voix des Outre-mer à Paris et à Bruxelles. C’est pourquoi il propose deux mesures : d’abord que le ministère des Outre-mer soit rattaché au Premier ministre pour lui donner plus de poids dans les arbitrages, ensuite la création d’un comité consultatif des Outre-mer pour que les collectivités d’Outre-mer puissent, ensemble, être davantage impliquées dans la préparation des lois et des décrets qui les concernent. Mais le programme de François Fillon, c’est aussi restaurer le rôle de l’Etat dans les Outre-mer, un Etat notamment garant de la sécurité et de la lutte sans relâche contre l’immigration irrégulière qui menace aujourd’hui la cohésion sociale de plusieurs de nos collectivités.
Questions à :
Laurent Laviolette membre de l’équipe de campagne d’Alain Juppé pour les Outre-mer.
A l’issue du premier tour de la primaire de la droite et du centre quel est votre état d’esprit ?
Je reste serein et très mobilisé pour le second tour. Je suis à la fois satisfait du résultat d’Alain Juppé dans les Outre-mer où il a globalement devancé ses concurrents et surpris comme beaucoup par la soudaine progression de François Fillon. Cela dit je retiens qu’en dehors de son fief de Gironde, Alain Juppé a fait un excellent score en Seine-Saint-Denis où réside une importante communauté antillaise. Ce n’est pas un hasard, cela signifie que son discours et son programme y reçoivent un écho.
Comme à l’accoutumée les Outre-mer sont le parent pauvre des débats des primaires de la droite et du centre comment expliquez vous cette situation ?
Votre question doit être considérée sous deux angles : médiatique et politique. Il est vrai qu’en dehors de la presse spécialisée, les Outre-mer sont malheureusement un sujet de second ordre, bien que je reste persuadé que François Fillon se souviendra longtemps de son échange télévisé avec Elie Domota sur France 2. Quant à l’angle politique je ne partage pas votre avis en ce qui concerne Alain Juppé. Durant sa campagne, il est allé à la rencontre de tous les français et de la quasi-totalité des Outre-mer. C’est à partir de ces échanges que son programme à été construit. Citez-moi un seul candidat qui se soit autant impliqué pour les Outre-mer ? Citez-moi un candidat autre qu’Alain Juppé qui se soit adressé directement à plusieurs reprises à la communauté ultramarine de l’Hexagone ?
Alain Juppé a une conception moderne des Outre-mer
Quelles perceptions les Outre-mer, les ultramarins ont de votre candidat ?
Lors de ses déplacements Outre-mer, Alain Juppé a régulièrement été interpellé sur la sécurité et la nécessité de restaurer l’autorité de l’Etat. Les ultramarins ont compris qu’il est l’homme de la situation, un héritier du gaullisme. Les résultats parlent d’eux-mêmes, Alain Juppé à globalement devancé ses concurrents dans les Outre-mer à l’issue du premier scrutin, en Seine-Saint-Denis également. Aujourd’hui encore, je suis abasourdi lorsque j’entends François Fillon déclarer que la « colonisation était un partage de culture » à Sablé-sur-Sarthe qui plus est, où un Martiniquais avait été élu maire en 1929. C’est un fardeau dont il aura du mal à se défaire en Outre-mer.
En cas de victoire à l’élection présidentielle, comment Alain Juppé répondra-t-il aux attentes des Outre-mer en matière de chômage et d’attractivité économique ?
Alain Juppé a une conception moderne des Outre-mer. Il ne suffit pas d’inscrire le mot « défiscalisation » dans un programme comme je l’ai tant vu pour être convainquant. Les ultramarins ne sont pas dupes. Outre l’importance de l’apprentissage et de la formation pour parvenir à abaisser un taux de chômage élevé, il sait que dans 10 ans, la moitié des métiers exercés auront été créés pour répondre aux nouveaux besoins de l’économie numérique. Il faudra donc anticiper le développement de ces métiers qui ont toute leur pertinence outremer et créer les filières de formation adaptées. C’est un des leviers d’attractivité pour ces régions. Ne vous méprenez pas, cette stratégie n’est pas incompatible avec le développement de filières plus traditionnelles comme le tourisme, le bâtiment ou l’agriculture, elle est complémentaire et indispensable pour attirer les investisseurs.
En cas de victoire allez-vous suivre les recommandations de votre parti sur la suppression progressive de la sur-rémunération des fonctionnaires en Outre-mer ?
Est-ce une recommandation des Républicains, ou de Nicolas Sarkozy ? En tout cas ce n’est pas la volonté d’Alain Juppé, il a déjà eu l’occasion de le dire.
Votre candidat remettra-t-il en cause l’existence d’un Ministère des Outre-mer ?
Absolument pas, la volonté d’Alain Juppé est de mettre systématiquement les Outre-mer au centre des politiques nationales et de renforcer le positionnement du (de la) Ministre en exercice au sein du gouvernement et plus largement au sein de l’Europe. Il s’attachera à nommer une personnalité politique forte et déterminée à répondre aux préoccupations des ultramarins.
Rédigé par Outremers360