10 auteur(e)s des Outre-mer à offrir pour Noël

10 auteur(e)s des Outre-mer à offrir pour Noël

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Noël approche à grands pas et il vous manque encore quelques présents dans votre hotte ? Pire encore, face à la multitude de cadeaux possibles, votre imagination fait défaut ? A une semaine du jour-j, Outremers360 vous propose un tour d’horizon de belles plumes ultramarines, ou d’auteur(e)s et autre chercheurs passionnés des Outre-mer, pour que cette année, Noël soit aussi synonyme de Culture et de Littérature.

Titaua Peu

C’est la sensation littéraire de la fin 2016 en Polynésie française. En octobre, Titaua Peu sort son deuxième roman, Pina: une plongée fracassante dans le quotidien d’une famille désemparée, vivant dans « les misères contemportaines » de la Polynésie. « Aux antipodes du politiquement correct, ce roman crie la rage trempée dans la sueur, le sang, le sperme,… et les larmes », confie l’éditeur Au Vent des Îles. Avec Titaua Peu, la prose est violente et franche, et les mots sont simples et percutants, pour une meilleure immersion dans un univers réel et oublié « d’une Polynésie déchirée où deux mondes parallèles se côtoient sans se voir ». En 2003, Titaua Peu faisait déjà couler de l’encre avec son premier roman Mutisme (éditions Haere Po): portrait d’une Polynésie en proie au « manque de paroles dans les familles tahitiennes », responsable « de frustration et de conflits ».

Titaua Peu ©Tahiti-infos

Titaua Peu ©Tahiti-infos

Chantal Spitz

Première écrivaine tahitienne à avoir publié un roman en 1991, Chantal Spitz est une insoumise, détestant les injustices silencieuses et les mythes caricaturaux. A sa sortie, L’Île des Rêves écrasés reçoit « des félicitations les plus élogieuses aux condamnations les plus frénétiques » mais hisse Chantal Spitz au Panthéon des auteurs tahitiens reconnus. Le roman est une saga familiale avec l’amour en fil conducteur, dans une Polynésie nucléarisée et plongée dans un « malaise omniprésent ». Début 2016, Chantal Spitz sort Cartes postales, un recueil de nouvelles inspiré de faits réels qui ont ébranlé la Polynésie, comme l’affaire « Farnham »: « Cette affaire m’a marquée. Parce que ce genre de crime est rarissime. Je me suis longtemps demandé le chemin de vie qui mène à ce drame (..). Le privilège de l’écrivain me donne la possibilité de créer des personnages et d’imaginer chaque chemin », explique-t-elle. Lire Chantal Spitz, c’est abandonner toute normes grammaticale, « mon style d’écriture s’est imposé à moi au fil du temps. Il est l’outil le plus adapté à ce que je veux dire et à la façon dont je veux le dire ». En d’autres termes, Chantal Spitz écrit avec ses entrailles, ce que les Polynésiens nomment mafatu: le centre d’impulsion des émotions.

Chantal Spitz ©Matareva

Chantal Spitz ©Matareva

Alexandre Juster

Ethno-linguiste, Alexandre Juster est un mordu de l’Océanie, de ses Cultures et ses Histoires. En 2010, il publie La transgression verbale en Océanie où il se penche sur « la parole interdite » dans les langues tahitienne et nengone. « Le livre parle de la transgression verbale, des insultes, de la parole interdite. Il porte sur la société interdite, cachée, sur la parole », explique Alexandre Juster. « Ce livre est un moyen de prouver, par les insultes, qu’il y a un rapport avec l’autre, par rapport à la terre et la famille aussi ». En 2016, Alexandre Juster publie L’Histoire de la Polynésie française en 101 dates dans lequel il élague « toute l’Histoire, même celle qui repose dans la littérature orale, décrivant la période pré-européenne » et décrit « tous les événements, des plus graves comme les engagements des Poilus tahitiens de la Première Guerre Mondiale aux plus légers, comme la quatrième place remportée par Tahiti face au Brésil, à la coupe du monde de Beachsoccer ». Cette semaine devrait sortir le tout dernier opus de l’ethno-linguiste, La mythologie tahitienne pour tous: une immersion parmi les grands dieux et déesses qui peuplent les légendes fondatrices de la Polynésie ancestrale.

Alexandre Juster ©Outremers360

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Déwé Gorodé

Femme politique indépendantiste et écrivaine Kanak de Nouvelle-Calédonie, Déwé Gorodé sort en septembre 2016 Se donner le pays – Paroles jumelles, un recueil poétique à quatre mains, écrit avec l’écrivaine Imasango. « Pendant de longs mois, deux femmes de Nouvelle Calédonie ont entretenu un dialogue par la poésie » explique l’éditeur Bruno Doucey. « Deux femmes de générations, de conditions et de couleurs différentes, qui partagent la même terre et veulent parcourir ensemble les mêmes chemins de paix ». Déwé Gorodé a publié son premier livre en 1985, un recueil de poèmes intitulé Sous les cendres des conques. Depuis, l’écrivaine a enchaîné les publications, jusqu’en 2014 avec A l’orée du sable, « un fil est tendu entre terre et mer, un lien comme un vol d’oiseau pour pétrir de mots les douceurs d’un instant, les douleurs de la vie ».

Dewé Gorodé ©DR

Dewé Gorodé ©DR

Nathacha Appanah

L’écrivaine et journaliste mauricienne, installée en France depuis 1998, sort en 2016 Tropique de la Violence qui relate l’histoire d’un enfant qui perd sa mère adoptive et se retrouve livré à lui même à Mayotte, dans un contexte où l’insécurité et le chômage massif dominent. Avec ce dernier roman, Nathacha Appanah remporte le premier Prix Femina des lycéens et arrive deuxième au Prix Femina, en plus d’avoir été sélectionnée pour les prix Goncourt et Medicis. Nathacha Appanah publie son premier roman en 2003: Les Rochers de Poudre d’or aux éditions Gallimard. Il lui a valu le Prix RFO et le Prix Rosine-Perrier. Peu de temps après Tropiques de la Violence, elle publie Petit éloge des fantômes: un recueil de « sept récits courts et agréablement composés » dans lequel « elle mélange les lieux, les familles, les souvenirs, les tranches de vie fictives pour appréhender le cartésien problème de l’inexistence des fantômes ».

Nathacha Appanah ©Joël Saget

Nathacha Appanah ©Joël Saget

Ali Zamir

Première publication de l’écrivain comorien Ali Zamir, Anguille sous roche est un roman « étourdissant » ne comptant qu’une seule phrase qui s’étend sur 320 pages. Dans l’océan Indien, une femme se noie et se remémore son existence. Le point final du roman est un point d’exclamation: celui du dernier souffle de la narratrice. Sélectionné pour le Prix de Littérature Francophone Senghor 2016, le Prix du Roman Fnac 2016, le Prix du Livre sur la place à Nancy et le prix Hors Concours 2016, Ali Zamir remportera finalement le Prix Senghor 2016. Définitivement un bel exploit pour ce jeune auteur talentueux et « Ovni » de la rentrée littéraire 2016.

Ali Zamir ©DR

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Jean-Jacques Martial

En 2001, Jean-Jacques Martial, d’origine réunionnaise, publie Une enfance volée, le récit personnel et poignant d’un passé douloureux, plus connu sur le nom de l’affaire des Réunionnais de la Creuse. En effet, de 1963 à 1981, plus de 1600 enfants réunionnais ont été arrachés à leur famille et leur île natale afin d’être transférés dans plusieurs départements ruraux de l’Hexagone, où ils seront parfois victimes de racisme et pire encore, d’une totale méconnaissance de leurs passés, leurs racines et même leurs noms. Jean-Jacques Martial en fait partie. Il a six ans lorsqu’il est enlevé à sa famille. Il menait alors une existence insouciante à Saint-André de La Réunion, au nord-est de l’île. Il sera d’abord transféré à Guéret dans la Creuse avant de se retrouver en Normandie, dans sa famille adoptive où il vivra à 14 ans un drame à la douleur sans égale: le viol par son père adoptif. Lors de sa publication, Une enfance volée permet de faire la lumière sur les Réunionnais de la Creuse et tous ces destins brisés pas le déracinement, qui cherchent encore aujourd’hui leurs passés respectifs.

Jean-Jacques Martial ©Zinfos974

Jean-Jacques Martial ©Zinfos974

José Vatin

L’écrivain guadeloupéen José Vatin revient en 2016 avec un récit témoignage à haute valeur historique: La Vie après l’Indicible. Tout commence par une rencontre, un soir d’automne à Paris. José Vatin fait la connaissance d’Henri Benchoan et très vite, les deux hommes se lient d’amitié. Au plus profond de son âme, Henri Benchoan cache des blessures que José Vatin arrive à déceler: « Qui es-tu Henri ? », « Je suis Juif ». A partir de ce moment, Henri Benchoan se livre: l’arrestation en 1942 de sa mère, lui et son frère fuyant dans les rues parisiennes, la protection qu’ils trouvèrent auprès d’un curé de Torcy et plus encore, la douleur profonde qui déchire encore son cœur. Aujourd’hui, Henri Benchoan est soulagé et le reconnait, « mon Histoire, c’est l’Histoire de l’Humanité ». « En ces temps troubles où les différences sont marquées », dire l’indicible est devenu une nécessité pour « que cela ne se reproduise plus jamais ». « J’ai 83 ans », confiait Henri lors de la présentation du livre, « je me porte bien, je prie Dieu et je veux croire en quelque chose ». La Vie après l’Indicible est devenu pour les deux hommes une mission, un message haut et fort à transmettre aux jeunes générations pour que jamais celles-ci n’oublient ce passé indicible et encore présent dans les mémoires meurtries par la Shoah.

José Vatin ©Outremers360

José Vatin ©Outremers360

Patrick Chamoiseau

L’écrivain martiniquais, auteur de romans, de contes, d’essais et théoricien de la créolité, s’illustre en 1992 en remportant le Prix Goncourt pour Texaco. Avec Patrick Chamoiseau, vous n’aurez que l’embarras du choix. Sa bibliothèque personnelle est riche et variée, de quoi satisfaire tous les goûts et toutes les envies. Plus généralement, ses œuvres décrivent les traits de la culture populaire martiniquaise, celle des petites gens et de leurs combats. Dans son roman Texaco, il explore l’histoire contemporaine de la Martinique et revisite, de façon originale et rafraîchissante, l’épopée du peuple martiniquais à travers le récit du combat des habitants d’un bidonville situé en bord de mer, près des raffineries de Fort-de-France. Il y évoque aussi le combat pour la sauvegarde de certains modes de vie authentiquement créoles, faisant de Texaco l’une des œuvres antillaises majeures de la fin du XXème siècle.

Patrick Chamoiseau ©DR

Patrick Chamoiseau ©DR

Christiane Taubira

Début 2016, l’ancienne ministre de la Justice et garde des Sceaux quitte le gouvernement sur fond de désaccord profond. La déchéance de nationalité est, pour elle, la proposition de trop. L’engagement dans le sang, Christiane Taubira publie dans la foulée Murmures à la jeunesse. Véritable pied de nez à la déchéance de nationalité, elle y explique ses choix et pourquoi cette mesure est, selon elle, inutile et ne sert qu’à la division plutôt qu’à l’union. Avec des mots simples, des faits, des chiffres, elle démonte méticuleusement ce qui parait être pour certain la solution pour contrer le terrorisme. Dans cet essai, elle y apporte aussi ses solutions, humaines, et souligne la responsabilité de la République dans l’errance d’une partie de sa jeunesse oubliée. En ces temps où l’obscurantisme et les instincts primaires gagnent du terrain, Murmures à la jeunesse propose de prendre du recul et de se souvenir des grandes devises qui fondent notre démocratie.

Christiane Taubira ©DR

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