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Le Sénat a voté mardi soir, dans le cadre du projet de loi de simplification Asap, un amendement visant à sécuriser la nouvelle politique mise en œuvre par la Commission d’indemnisation des victimes d’essais nucléaires (Civen) depuis janvier 2018. Cet amendement vient contrer deux décisions du Conseil d’État de janvier, favorables aux victimes.
De 1966 à 1996, les atolls de Mururoa et Fangataufa en Polynésie française (archipel des Gambier) ont été le théâtre de 193 essais nucléaires, qui ont eu des effets sur la santé et l’environnement des populations. Les indemnisations des maladies liées aux essais nucléaires sont régies par la loi Morin de 2010. En 2017, la loi EROM a supprimé la notion de « risque négligeable » qui empêchait jusqu’alors quantité de malades d’être indemnisés au motif que le risque d’un lien entre un cancer et les impacts des essais était inférieur à 1%, c’est-à-dire « risque négligeable ».
Cette suppression avait pour effet de considérer que toute personne ayant un cancer et ayant été présente en Polynésie entre 1966 et 1998 (après le dernier essai en 1996), devait être indemnisée, alors que son cancer pouvait aussi avoir été provoqué par d’autres causes, estimait le Civen.
Depuis janvier 2018, le Civen a retenu un nouveau seuil minimal d’exposition d’1 mSv (millisievert), adoptant une nouvelle politique d’indemnisation en principe sécurisée par un amendement porté par la sénatrice centriste Lana Tetuanui, à la loi de finances du 28 décembre 2018. Il prévoit que pour être indemnisé par le Civen, le malade doit avoir été présent en Polynésie pendant les essais, « à moins qu’il ne soit établi que la dose annuelle de rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires reçue par l’intéressé a été inférieure à 1 millisievert (mSv) », dose qui ne peut pas déclencher de maladie selon le code de la Santé publique.
Mais deux décisions du Conseil d’État, rendues fin janvier, ont considéré que l’amendement ne pouvait être rétroactif, et ne pouvait donc s’appliquer à des demandes d’indemnisation déposées avant le 29 décembre 2018. Ces décisions faisant jurisprudence, elles ouvraient ainsi la possibilité à 62 des 138 demandes d’indemnisation, portées notamment par l’association 193 pour le compte de victimes polynésiennes, d’être réexaminées après avis défavorable du Civen ou en attente d’examen par le Comité d’indemnisation.
Mais l’amendement du gouvernement voté mardi par le Sénat vise justement à pallier l’absence de dispositions transitoires, confirmant que les nouvelles dispositions de la loi d’indemnisation sont applicables aux demandes déposées devant le Civen avant comme après le 29 décembre 2018. « Je ne peux que soutenir cet amendement parce qu’il vient sécuriser le travail que j’ai présidé », a déclaré Tetuanui.
La sénatrice s’est également félicitée du maintien de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires. Le texte initial prévoyait sa suppression, mais elle a été rétablie par les sénateurs en commission. Le secrétaire d’État Olivier Dussopt a annoncé que l’État ne s’opposerait pas à son maintien.
Avec AFP.