COP 21 : A-t-on basculé vers un nouveau monde ?

COP 21 : A-t-on basculé vers un nouveau monde ?

Les 193 pays ont validé et signé l’accord de Paris présenté par Laurent Fabius dans la journée. Quels sont les nouveaux changements apportés par ce texte ? Marque-t-il un  nouveau tournant dans la lutte contre le réchauffement climatique ? Décryptage de cet accord par Dominique Martin-Ferrari.

Comme nous l’avions pressenti, l’accord de Paris adopté dans la nuit de samedi 12 décembre à dimanche 13, est un événement dans la mesure où il a réussi à rassembler dans le même bateau, un monde de plus en plus éclaté. C’est important pour la planète de signifier un intérêt et une responsabilité partagée par tous aujourd’hui. C’est important pour le monde de demain de se donner une responsabilité historique et de poursuivre le chemin engagé en 1992. Enfin, et c’est sans doute le plus important encore, le monde des  états souverains vient d’accepter de reconnaître la société civile, lui assignant même un rôle. Comme le souligne Corinne Lepage. « A la société civile, d’obliger son gouvernement à appliquer ses promesses via les procédures propres à chacun ». Et d’évoquer le récent procès qui vient de se tenir aux Pays Bas, où une ONG a réussi à faire ordonner par un tribunal l’obligation pour l’Etat de remonter la réduction de ses émissions à 25% . « C’est la première fois qu’un gouvernement est ordonné de relever ses ambitions climatiques par un tribunal. » Un pas vers la construction de la justice climat. Yannick Jadot député européen EELV précise : « plus de 10.000 engagements ont été pris par la société civile. Elle est la deuxième jambe de l’accord de Paris ». Les associations de villes et d’élus ont d’ailleurs confirmé leur engagement de renforcer l’agenda d’action Paris Lima sur les financements territoriaux. Parmi les « parties » (acteurs au sens onusiens, ndlr) également reconnues, celle des peuples premiers et des savoirs traditionnels comme élément important des démarches d’adaptation sur les territoires (art 5)

accord de Paris, COP 21

Le Ministre des Affaires étrangères a présenté ce 12 décembre le texte d l’accord de Paris

Rien n’est vraiment contraignant

Outre l’engagement de ne surtout pas dépasser les 2° et même de viser les +1°5, rien ne s’impose.  Comme nous l’évoquions précédemment l’unique avantage de ce texte est de mettre le monde en ordre de bataille , avec une mission claire, et de laisser sur le bord de la route les climatosceptiques. Contrairement à l’accord de Kyoto, ce texte n’invente guère de nouveaux outils. Il s’agit davantage d’une déclaration d’intention qu’une procédure de droit international. Contrairement à l’OMC (Organisation ondiale du commerce) par exemple, l’accord de Paris n’a ni pouvoir fiscal, ni pouvoir économique pour l’instant. Cela va-t-il inciter les pays qui veulent aller plus vite à créer un cercle autour du prix du carbone ? À suivre, mais tout le travail reste à faire.

Le fossé maintenu

La communauté internationale a failli sur plusieurs grandes questions: le prix du carbone n’est pas retenu. Or, c’est cette mesure seule, qui pouvait permettre de croire en la possibilité des financements promis. Les transports maritimes et aériens qui représentent plus de 30% des émissions ne sont pas touchés. Les subventions aux énergies fossiles ne sont pas actées dans le texte et encore plus de 800 plans de subventions subsistent dans ce secteur. On ne se dirige donc pas expressément vers la sortie du pétrole. La question de l’océan au sein de cette COP 21 qui avait pourtant progressé au cours des négociations est simplement abordée dans le préambule du texte (non contraignant). Là aussi, on attend des progrès. Comment pourra-t-on tenir les promesses faites aux pays en développement gravement touchés?

La « revoyure »

Il faut saluer l’outil qui va permettre d’avancer : l’obligation faite à la COP de se réunir tous les cinq ans pour analyser et réviser ses engagements. Il est clair que la COP 22 de Marrakech en Décembre 2016 fixera davantage le rôle de chacun. Cette obligation est importante puisqu’elle va permettre aux pays qui veulent aller plus vite de le faire. Annick Girardin, ministre de la francophonie l’a bien mesuré.  » Notre premier rendez vous est désormais 2016 pour 2019. Pour être utile lors de ce rendez vous il nous faut  aller plus loin dans nos ambitions. La France se mobilisera ». Mais cette  » revoyure  » est un outil à double tranchant puisqu’il peut instaurer un monde à deux vitesses et d’une certaine manière, briser le caractère universel de l’accord en accentuant le fossé entre pauvres et riches, détenteurs de technologies et assistés.

Par Dominique Martin-Ferrari, Outremers Métamorphoses.

Faire plus : Dans le cadre de son club , métamorphose outremers se donne pour mission de relever d’ici fin Janvier dans les textes adoptés tout ce qui peut permettre aux outremers de s’inscrire dans cette dynamique . Pour tous ceux qui veulent participer à ce groupe d e travail merci de nous le signaler : dmf@gaia-network.com