Dopage : La Guadeloupéenne Ysaora Thibus auditionnée ce lundi par le tribunal disciplinaire de la Fédération internationale d’escrime

Dopage : La Guadeloupéenne Ysaora Thibus auditionnée ce lundi par le tribunal disciplinaire de la Fédération internationale d’escrime

Un rendez-vous capital pour ses JO de Paris : l'escrimeuse guadeloupéenne Ysaora Thibus, suspendue provisoirement en raison d'un contrôle antidopage positif à l'ostarine, se défend lundi en visioconférence devant le tribunal disciplinaire de la Fédération internationale d'escrime (FIE), qui rendra sa décision plus tard.

Pour échapper à une suspension la privant des Jeux olympiques, la fleurettiste, immense chance de médaille, espère démontrer une transmission via son compagnon Race Imboden grâce à des expertises toxicologiques.

L'ostarine, l'agent anabolisant détecté le 14 janvier lors de l'étape de Coupe du monde à Paris, aurait fait son entrée dans l'organisme d'Ysaora Thibus à la suite d'une « contamination par fluide corporel », selon l'équipe de la vice-championne olympique par équipes (2021) et championne du monde en individuel (2022).

Cette défense avait déjà permis de blanchir en 2009 Richard Gasquet, contrôlé positif à la cocaïne, mais aussi, plus récemment, la vice-championne olympique de canoë en ligne canadienne Laurence Vincent-Lapointe et la joueuse américaine de softball Madilyn Nickles en 2020. Les échantillons de ces dernières avaient fait apparaître du ligandrol, un agent anabolisant de la famille des SARM, comme l'ostarine.

Pour essayer de prouver la contamination, Ysaora Thibus s'est notamment entourée du professeur Jean-Claude Alvarez, directeur du laboratoire de toxicologie du CHU de Garches. Le toxicologue était déjà à l'œuvre dans la défense de la joueuse de tennis Simona Halep, dont la sanction avait été réduite en appel de quatre ans à neuf mois de suspension.

 Analyse des cheveux et des ongles

Un article scientifique, publié le mois dernier dans la revue Clinica Chimica Acta et repéré par le quotidien L'Équipe, détaille la méthode du professeur Jean-Claude Alvarez se basant notamment sur l'analyse comparative des cheveux et des ongles du couple.

Ainsi, les mèches de l'escrimeuse « présentaient des concentrations entre 22 et 26 fois plus faibles, selon les segments, que ceux de son petit ami », explique l'article. A savoir une « concentration très faible de 2 pg/mg » pour la portion « correspondant à la période du contrôle positif ». Bien moins que les 65 pg/mg retrouvés chez Race Imboden, qui à la suite de l'annonce de la suspension le 8 février, a « admis prendre en secret du MK2866 (autre nom de l'ostarine, NDLR) pour développer ses muscles qui n'étaient plus stimulés depuis un an et sa retraite », lit-on dans l'article.

Pour tenter de démontrer un mécanisme de contamination, l'équipe du professeur Alvarez a également répété le déroulé de la journée du contrôle. Race Imboden a repris 1 mL de MK2866 et « ils se sont embrassés régulièrement, comme ils l'avaient fait le 14 janvier lors de la compétition, entre chaque match ». Une concentration de 13 ng/mL a alors été mesurée dans un échantillon d'Ysaroa Thibus, soit la même que celle estimée par son équipe lors du contrôle positif (13 ng/mL, « d'après les chromatogrammes de l'analyse »), alors qu'au matin de l'expérience, rien n'était détectable dans son échantillon.

Délais peu compatibles avec un appel

Hasard du calendrier, un athlète américain Aldrich Bailey Jr a été innocenté il y a moins d'un mois après avoir « été testé positif à des traces d'ostarine provenant de jambières en néoprène destinés aux ischio-jambiers qui étaient contaminées », a expliqué l'agence antidopage américaine, l'Usada. L'athlète qui lui avait prêté ces vêtements, Jaron Flournoy, a lui écopé d'une suspension de trois ans. 

Reste que chaque cas est difficilement comparable. Les échantillons d'urine d'Aldrich Bailey Jr présentaient par exemple des traces infimes : moins de 0,1 ng/mL, selon un article scientifique publié dans Clinica Chimica Acta, par Laurie Gheddar et Pascal Kintz, toxicologue qui avait participé à la défense de Richard Gasquet en 2009.

Mais même si elle était innocentée, Ysaora Thibus resterait elle sous la menace d'un appel. La FIE, l'agence antidopage française (AFLD), le Comité international olympique (CIO) ou encore l'agence mondiale antidopage (AMA) auraient 21 jours, à compter de la communication de la décision, pour faire appel de la décision devant le Tribunal arbitral du sport (TAS).

Une perspective inquiétante pour la tireuse : la sélection des fleurettistes françaises pour les Jeux olympiques, déjà repoussée le plus possible par la Fédération française, doit être annoncée dans moins de deux mois, le 5 juillet. Les délais seraient très difficiles à tenir en cas d'appel, y compris s'il émanait d'Ysaora Thibus elle-même après une sanction en première instance.

Avec AFP