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Le gouvernement haïtien a appelé samedi au calme et à la « patience » après les violences qui ont paralysé la capitale et fait au moins un mort, suite à une importante hausse des prix des produits pétroliers dans ce pays où la majorité de la population vit dans une pauvreté extrême.
Beaucoup de rues à Port-au-Prince étaient encore obstruées samedi matin par les barricades dressées la veille. A plusieurs endroits dans la région de Port-au-Prince, des manifestants ont de nouveau mis le feu à des pneus, certains en appelant à la révolution.
Des tirs sporadiques se faisaient encore entendre dans certains quartiers alors que la présence des forces de police restait très limitée, a pu observer une journaliste de l’AFP. Des mouvements similaires de colère ont été enregistrés au Cap-Haïtien, la deuxième ville du pays, ainsi que dans les communes des Cayes et de Jacmel et de Petit-Goave. Vendredi soir, un policier assigné à la sécurité d’un dirigeant d’un parti politique d’opposition a été tué dans une altercation avec un groupe de manifestants au cœur de la capitale haïtienne. Il a été lynché alors qu’il cherchait à forcer le passage, et son corps a ensuite été brûlé sur la chaussée.
Tension à Pétionville : une des cibles actuelles de la colère des manifestants contre la hausse des tarifs des produits pétroliers, l'hôtel Best Western où au moins une voiture a été incendiée. #Haiti
— Amélie Baron (@Ameliebaron) 7 juillet 2018
L'allocution du président @moisejovenel, accompagnée de son épouse Martine Moïse, aura duré plus de 23 minutes. Appel aux manifestants pour qu'ils laissent la rue. Aucune annonce concrète. #Haiti pic.twitter.com/GgkJpDHddg
— Amélie Baron (@Ameliebaron) 8 juillet 2018
Plusieurs compagnies aériennes comme American Airlines et Air France ont annulé leurs vols jusqu’à la mi-journée pour l’instant, et au moins un avion a été redirigé vers Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe.
Face aux contestations, le Premier ministre Jack Guy Lafontant a appelé samedi la population à la « patience ». « Je vous demande de la patience parce que notre administration a une vision, un programme clair », a déclaré le chef du gouvernement dans une allocution diffusée sur la télévision d’État.
« Ne détruisez pas car, à chaque fois, c’est Haïti qui devient plus pauvre (…). Le pays est en chantier mais si à chaque fois on détruit, on restera toujours à la traîne », a-t-il ajouté, alors que la majorité des vitrines des bâtiments et vitres de véhicules ont été brisées dans les quartiers aisés de l’aire métropolitaine. Le directeur de la police nationale a de son côté lancé un appel au calme.
« On comprend votre droit (à) protester, (à) revendiquer mais on ne comprend pas la violence » a déclaré Michel-Ange Gédéon, en regrettant la mort du policier et en faisant état de l’incendie d’au moins deux commissariats et de plusieurs voitures de police.
Le Gouvernement condamne vigoureusement les actes de violences et de vandalismes perpétrés suite à l’annonce de l’ajustement des prix des produits pétroliers.
— Jack Guy Lafontant (@LafontantGuy) 7 juillet 2018
Il demande aux autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires afin de sécuriser les vies et les biens sur toute l’étendue du territoire et que justice soit rendue aux victimes.
— Jack Guy Lafontant (@LafontantGuy) 7 juillet 2018
Hausse insupportable
En début d’après-midi vendredi, les ministères de l’Économie, des Finances, du Commerce et de l’Industrie ont annoncé l’augmentation des prix de l’essence de 38%, celui du diesel de 47% et celui du kérosène de 51%, à compter du samedi 7 juillet à minuit.
Le nouveau cadre de référence entre le Fonds monétaire international (FMI) et Haïti, signé en février, impliquait la cessation de la subvention publique des produits pétroliers, source conséquente du déficit budgétaire de l’État.
Cette importante hausse est perçue comme insupportable par la majorité de la population qui fait face à une pauvreté extrême, un chômage de masse et une inflation supérieure à 13% pour la troisième année consécutive. Le gouvernement tente de persuader les citoyens qu’il est obligé de réviser les prix des produits pétroliers, en prenant ses précautions dans le choix du vocabulaire.
« On ne parle pas d’augmentation mais plutôt de mettre les carburants aux prix auxquels ils doivent être », a souligné le Premier ministre dans son message télévisé samedi. « De 2010 à 2018, Haïti a subventionné les carburants à hauteur de 50 milliards de gourdes, soit environ un milliard de dollars. Ce montant aurait pu nous permettre de construire beaucoup de kilomètres de route (…), beaucoup de salles de classe (…), beaucoup de centres de santé », a détaillé le chef du gouvernement pour justifier la mesure impopulaire.
Le gouvernement défend également la diminution de ces subvention du fait qu’elles privilégiaient injustement selon lui l’économie de la République dominicaine voisine, où les tarifs à la pompe sont plus élevés.
Depuis l’annonce des nouveaux tarifs, les stations-service des principales villes du pays ont suspendu la distribution de carburants.
Rappelant que violences et démocratie sont foncièrement incompatibles, le Gouvernement annonce la suspension de la mesure d’ajustement des prix des produits pétroliers jusqu’à nouvel ordre.
— Jack Guy Lafontant (@LafontantGuy) 7 juillet 2018
Avec AFP