©Nicolas Perez / Radio 1 Tahiti
Une manifestation contre la réforme des retraites en Polynésie française a rassemblé jeudi matin à Papeete près de 4 000 personnes selon la police et une centaine de grévistes ont envahi dans l’après-midi l’Assemblée territoriale de Polynésie en pleine séance, une première dans cette Collectivité d’Outre-mer. L’intersyndicale est confiante quant à une éventuelle annonce de retrait de la réforme.
Les manifestants étaient 8 000 selon l’intersyndicale à l’origine du mouvement, une centaine d’entre eux a forcé l’une des entrées de l’hémicycle quelques heures après la marche. Des policiers en tenue anti-émeute se sont rapidement interposés entre élus et manifestants, qui sont restés plus de deux heures dans les tribunes des spectateurs, tantôt haranguant l’Assemblée au-dessus d’une vingtaine de policiers, tantôt chantant des mélodies polynésiennes. Plusieurs milliers de Polynésiens patientaient à l’extérieur, la plupart dans le calme.
L’appel à la grève générale est peu suivi selon le gouvernement, avec moins de 3% de grévistes dans l’administration locale. L’aéroport, que l’intersyndicale menaçait de bloquer, est très peu perturbé, bien que le nombre de manifestants ait quasiment doublé. Au port de Papeete, les containers ont pu être déchargés, mais aucune marchandise, en dehors des denrées périssables et des médicaments, n’a pu sortir de la zone sous douanes en raison de la grève des aconiers. « Les dockers peuvent tenir un mois sans problème », a déclaré l’un des syndicalistes les plus influents du port, Mahinui Temarii (CSTP-FO).
Selon le président de la Polynésie française Edouard Fritch, la collectivité autonome d’outre-mer ne pourra plus financer ses retraites « d’ici deux ou trois ans ». Il souhaitait donc repousser l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Après cette deuxième manifestation de la semaine, la première a eu lieu mardi et a rassemblé 2 500 personnes, Edouard Fritch a proposé le maintien de « l’âge légal de la retraite à 60 ans en 2019, et de renvoyer les modifications aux propositions que nous fera le COSR », à l’Assemblée de la Polynésie française, où devait être votée la réforme ce jeudi 8 mars.
Le Conseil d’orientation et de suivi des retraites (COSR) dans lequel siégeront des syndicalistes, devrait permettre de renvoyer ce dossier brûlant après les élections territoriales, dont le premier tour aura lieu le 22 avril. Après une réunion avec les présidents de groupes politiques à l’Assemblée, Edouard Fritch a aussi annoncé que ministres et élus de l’Assemblée polynésienne cotiseraient à la caisse de retraite locale, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Mais ses engagements n’ont pas apaisé la colère des grévistes, qui promettent des blocages si la réforme n’est pas abandonnée. Elu pour la première à l’Assemblée territoriale en 1986, Edouard Fritch a assuré n’avoir jamais vu l’hémicycle investi par des manifestants. « Ce qui s’est produit à l’Assemblée est inadmissible », a-t-il déclaré.
Qualifiant cette acte de « terrorisme », le Vice-président polynésien Teva Rohfritsch a provoqué la colère des grévistes, qui se sont rassemblés devant les portes de la Présidence du pays, en début de soirée, afin d’être reçus par le Président Edouard Fritch. Une demande qui a été acceptée puisqu’une délégation de l’intersyndicale a été reçue, en soirée, par la sénatrice Lana Tetuanui, le Vice-président de l’Assemblée territoriale René Temeharo et le Ministre polynésien de la Culture, Heremoana Maamaatuaiahutapu.
Selon l’intersyndicale, l’exécutif annoncera demain si le vote de la réforme des retraites est retiré de l’ordre du jour de l’Assemblée. « Je souhaite que l’ordre du jour (de l’Assemblée territoriale, ndlr) soit modifiée pour que le texte soit retiré et reprendre le dialogue entre le gouvernement et l’intersyndicale », a déclaré Marcel Tuihani, Président de l’Institution. Si l’intersyndicale se montre confiant sur le retrait de cette réforme, les blocages sont toutefois toujours d’actualité en attendant la réunion qui aura lieu ce vendredi à 10h (heure locale).
Avec AFP.