Montagne d’Or en Guyane : La jeunesse autochtone guyanaise cherche un soutien à Paris

Montagne d’Or en Guyane : La jeunesse autochtone guyanaise cherche un soutien à Paris

©Outremers360

A la veille de la Journée internationale de solidarité avec les Peuples amérindiens, les députés Moetai Brotherson (Polynésie française) et Jean-Paul Lecoq (Seine-Maritime) ont organisé à l’Assemblée nationale une Conférence des Peuples autochtones amérindiens, ce vendredi 13 octobre. Présents à cette conférence, de nombreux représentants des peuples amérindiens tels que Tara Houska, proche Conseillère de Bernie Sanders, mais aussi Christophe, Ludovic et Gernaud Pierre, amérindiens Kali’na de Guyane et membres de l’association Jeunesse Autochtone de Guyane.  

« On mène des combats au niveau des revendications autochtones en Guyane et nous avons énormément besoin de soutien », confie Christophe Pierre, qui, pendant la Conférence des Peuples autochtones amérindiens, s’est exprimé au nom de l’association Jeunesse Autochtone de Guyane. « La majorité des choses pour la Guyane se décident à Paris donc on a besoin de soutien ici car c’est ici que les choses se jouent », reconnait-il.

Les trois membres Kali’ina de l’association sont venus s’exprimer plus particulièrement sur deux problématiques : l’orpaillage illégal et le projet Montagne d’Or. Sur le premier thème, Christophe Pierre a souligné la pollution au mercure issue de l’orpaillage : « Il ne reste qu’un seul fleuve non-pollué en Guyane » a-t-il souligné, rappelant que la Guyane est la 2ème réserve d’eau douce au monde derrière le Groenland. Les taux de mercure entraînent notamment une malformation des nouveau-nés au sein d’une population habituée à se nourrir des poissons vivants dans les fleuves. L’orpaillage illégal entraîne également des affrontements parfois violents entre autochtones et orpailleurs et les membres de l’association constatent une radicalisation des jeunes amérindiens.

Plusieurs représentants de Peuples amérindiens (Canada, Etats-Unis, Guyane) mais aussi des représentants Corses, étaient réunis autour des députés Moetai Brotherson et Jean-Paul Lecoq pour cette Conférence des Peuples amérindiens à l'Assemblée nationale ©Outremers360

Plusieurs représentants de Peuples amérindiens (Canada, Etats-Unis, Guyane) mais aussi des représentants Corses, étaient réunis autour des députés Moetai Brotherson et Jean-Paul Lecoq pour cette Conférence des Peuples amérindiens à l’Assemblée nationale. La députée polynésienne Maina Sage, sensible à ces sujets, était représentée par ses collaborateurs ©Outremers360

Le combat de l’Association Jeunesse Autochtone de Guyane s’avère plus compliqué dans le volet de la Montagne d’Or. En effet, le projet, éminemment économique et présenté comme pourvoyeur d’emplois, est soutenu par une grande partie des élus guyanais. Par conséquent, l’association est venue chercher une oreille attentive chez d’autres députés. « Les députés (Moetai Brotherson et Jean-Paul Lecoq, ndlr) ont été très réceptifs au message et nous ont donné leur soutien pour toutes nos démarches et à tous les niveaux. Ils nous ont donné des pistes à creuser concernant des recours juridiques possibles au niveau de la France et de l’Europe », explique Christophe Pierre. L’association a notamment l’intention de saisir le Tribunal international de la Nature, mis en place à l’issue de la COP 21.

Condamner le projet de Montagne d’Or au Tribunal international de la Nature

« La nature, ce n’est pas l’environnement. La nature est une personne morale, physique et donc, porter atteinte à la nature est un crime. Sur cette base-là et avec France Liberté, on aura un créneau au Tribunal international de la Nature pendant la COP23 et on plaidera pour la condamnation de la Montagne d’Or en tant que projet », assure Christophe Pierre. « La Guyane dans sa totalité, se sont des terres ancestrales amérindiennes et porter atteinte à ces terres, ça ne peut pas se passer comme ça », déclare-t-il, souhaitant « des outils juridiques contraignants ». Les membres de l’associations ont notamment mis en avant que ce projet ne polluera pas uniquement les amérindiens, mais aussi les Bushinengués et la population guyanaise dans son ensemble.

Emmanuel Macron attendu « de pied ferme »

Du 25 au 27 octobre, le Président de la République se rendra en Guyane, accompagné d’une Délégation gouvernementale, dans le cadre de la Conférence des RUP. « L’ensemble de la Guyane et pas uniquement les amérindiens attendent de pied ferme la visite du Président parce qu’il y a pas mal de choses à faire avancer. Lors des mouvements sociaux, nous amérindiens avons demandé à ce qu’il y ait des avancées par rapport à la ratification de la Convention 169 de l’Organisation internationale du Travail ». Convention relative aux peuples indigènes et tribaux, « elle reconnait leurs réalités, leurs spécificités, leurs organisations politiques, spirituelles, économiques. C’est un champ qui permet le droit à l’autodétermination des peuples ».

« L’ancienne Ministre des Outre-mer (Ericka Bareigts, ndlr) s’était engagée à saisir le Conseil d’Etat », pour la ratification par la France de cette Convention, « ce qui n’a pas été fait », regrette Christophe Pierre. « Il faut relancer le Président là-dessus. Il n’y a que lui qui peut s’engager sur la ratification de la Convention 169. Ça prendra énormément de temps mais il faut s’acharner, continuer et ne pas lâcher », assure-t-il. « L’année dernière, le CNCDH a émis un avis favorable et souligné que la ratification de la Convention 169 n’est pas anticonstitutionnelle. C’est cet avis là qu’on avait demandé à la Ministre qu’elle transmette au Conseil d’Etat et au Conseil Constitutionnel pour trancher. Depuis toujours la France a évité ces questions et aujourd’hui, on veut un oui ou un non. Si c’est oui, tant mieux, si c’est non, on fera du forcing », conclut-il.

Lors de cette conférence, plusieurs représentants de peuples amérindiens étaient venus s’exprimer, notamment:

– Mme. Tara HOUSKA, nation Anishinaabe (USA)
– Mme. Kanahus MANUEL (Amanda SOPER), nations Secwepemc et Ktunaxa (Canada)
– Mr. Cannupa Hanska LUGER, nation Hunkpapa Lakota de la réserve de Standing Rock (USA)
– Mr. Christophe PIERRE, nation Kali'na (Guyane)
– Mr. Ludovic PIERRE, nation Kali'na (Guyane)
– Mr. Gernaud PIERRE (Kali'na, Guyane)
– Mr. Cedar GEORGE ( nationTsleil-Waututh)
– Mme. Edith PATROUILLEAU, Co-fondatrice et Présidente du CSIA-Nitassinan
– Mr. Sylvain DUEZ-ALESANDRINI, nation Corse, vice-président du CSIA-Nitassinan
– Mme. Aurélie JOURNÉE, ethnologue, membre du CSIA-Nitassinan
– Mme. Juliette RENAUD, Chargée de campagne RSEE et Industries extractives à Les Amis de la Terre

La députée Maina Sage, sensible au sujet, était représentée par ses collaborateurs.