Marine Le Pen à Mayotte: Immigration et insécurité, le FN en terrain conquis ?

Marine Le Pen à Mayotte: Immigration et insécurité, le FN en terrain conquis ?

©DR

En déplacement à La Réunion depuis dimanche puis à Mayotte depuis ce mercredi, Marine Le Pen est venue évoquer la lutte contre l’immigration et l’insécurité à Mt’sahara, village côtier du nord-est de Mayotte, marqué par l’arrivée massive de migrants des Comores voisines. Sur le 101ème département français, Marine Le Pen compte bien surfer sur le « sentiment d’abandon ».

Sur la place centrale de Mt’sahara (environ 2.500 habitants), des dizaines de femmes en saluvas colorés (vêtement traditionnel des femmes mahoraises), tendent des banderoles: « Bienvenue Mme Marine Le Pen, Mayotte a besoin de vous », « Non à l’immigration clandestine, et vous avez la solution ». D’autres banderoles proclament que « Mayotte ne peut pas accueillir toute la misère du monde, plus de 60% d’immigrés sur un territoire, c’est du jamais vu » ou « les Mahorais sont fatigués des enfants de la mer », une allusion aux migrants, dont de nombreux enfants, qui arrivent illégalement par kwassa-kwassa, ces bateaux de pêche comoriens. Marine Le Pen est dans le « fief du FN », comme le dit la fédération locale, où son père était déjà venu.

Le 101e département français (depuis 2011 seulement) est confronté à une forte pression migratoire venue de l’archipel des Comores, à seulement 70 km. La population mahoraise est estimée à 220.000 habitants (chiffres de 2012, que beaucoup, localement, estiment très en dessous de la réalité) et compterait environ 40% d’étrangers. En 2015, il y a eu plus de 19.000 reconduites à la frontières à Mayotte contre environ 20.000 sur le territoire métropolitain. Sur la route qui mène à Mt’sahara, des gendarmes en faction scrutent l’horizon avec des jumelles. Objet de leur attention, l’îlot de Mt’zamboro, à trois kilomètres au large: c’est ici que les passeurs comoriens font débarquer les clandestins, qui y restent parfois plusieurs jours avant de trouver des pêcheurs mahorais qui acceptent contre forte rémunération de les amener à Mayotte.

« Lumière de Mayotte »

« Les clandestins envahissent les bancs de nos écoles, les hôpitaux, les emplois, les rues des villages », expose Soiderdine Madi, président de la fédération, prêt à « reprendre le combat » contre les Comores. Pour lui, Marine Le Pen est « l’espoir de Mayotte, la lumière de Mayotte, la seule personne attendue pour sauver le 101e département », dit-il devant les quelque 150 personnes (200 selon le Journal de Mayotte) venues accueillir la candidate à la présidentielle. Pour précision, Mayotte compte 83 adhérents du FN. Marine Le Pen, qui a fait sensation à son arrivée à l’aéroport de Dzaoudzi, en débarquant elle-même vêtue d’un saluva orange (vite enlevé à cause de la chaleur), les a appelés à « entrer en résistance ». Selon elle, il est pourtant « simple et facile » d’arrêter « ce drame ». « On va dans l’espace et on n’est pas capable d’arrêter des bateaux de clandestins ? », ironise la dirigeante frontiste.

Elle rappelle son programme: « supprimer le droit du sol », « supprimer les aides sociales accordées aux clandestins », « supprimer la possibilité d’être régularisé quand on est en situation clandestine. Nous ne leur donnerons rien, ni argent, ni subvention, ni aide sociale, ni papiers », poursuit-elle. Elle souhaite également arrêter « l’immigration légale » sur ce territoire, « alors que vous êtes en train de vous débattre dans la pauvreté ». « La moitié de Mayotte est habitée par des étrangers. Pas un seul département français ne supporterait des chiffres comme ceux-là », ajoute la candidate, sans accuser « ceux qui viennent » et parfois meurent dans les naufrages, a-t-elle rappelé, mais « les responsables français qui les laissent venir ».

Elle promet aussi de régler « le problème de l’insécurité », conséquence selon elle « de l’immigration clandestine », et qui empêche investisseurs, hôteliers et compagnies aériennes de prendre pied à Mayotte. Dans le public, Madi Toibati, en saluva fleuri, est conquise: « C’est elle qui va nous sauver. Les étrangers tuent nos enfants en vendant de la drogue. On est étouffés », affirme-t-elle. A Mayotte, Marine Le Pen avait recueilli 2,77% des voix à la présidentielle de 2012.

Le Front national veut séduire les Outre-mer

Mais alors que Marine Le Pen sillonne l’Océan Indien, son compagnon et Vice-président du parti Louis Aliot, est actuellement en Nouvelle-Calédonie pour une autre mission séduction sur des thèmes autres que l’immigration et l’abandon. Louis Aliot y a notamment évoqué les Accords de Nouméa de 1998, « c’est un contrat, il a été signé par plusieurs parties, ça engage la France. Si Marine Le Pen est élue, elle respectera l’accord et nous irons au référendum », a-t-il assuré en précisant qu’indépendante, la Nouvelle-Calédonie aurait « les plus grandes difficultés à maintenir un même niveau de vie sans l’appui d’une puissance comme la France ». En 2012, Marine Le Pen avait obtenu 11,6% du suffrage en Nouvelle-Calédonie. Plus globalement, les scores du Front national dans les Outre-mer restent très bas, entre 2% et 15% (en 2012) et les élections régionales de 2015 ont confirmé cette tendance. Néanmoins, la Présidente du Front a décidé de commencer sa campagne pour la Présidentielle de 2017 par les Outre-mer, qui sont par définition, les territoires les plus difficiles à convaincre pour le FN.

Marine Le Pen, Présidente du Front national, entame sa campagne par les Outre-mer ©DR

Marine Le Pen, Présidente du Front national, entame sa campagne par les Outre-mer ©DR

Avec AFP.