Trois mois après l’adoption de ce texte à l’Assemblée Nationale, le projet de loi Egalité Réelle en Outre-mer est actuellement discuté au Sénat, sous une forme amoindrie et y provoquant les critiques de visées électoralistes.
« On aura certainement un débat musclé » a affirmé la Ministre des Outre-mer Ericka Bareigts lors d’un point presse ce 17 janvier avant l’examen par le Sénat du projet de loi Egalité réelle en Outre-mer. Devant les sénateurs, Ericka Bareigts a d’abord dénoncé l’attitude de certains parlementaires face à ce texte. «Je regrette que certains considèrent encore le sort des Outre-mer avec désinvolture, trouvant l’examen de ce projet de loi « amusant ». La situation des Outre-mer n’est-elle pas un motif de mobilisation pour nous tous, quelle que soit notre appartenance politique, nous, les enfants de la République ? Comment ne pas unir nos forces pour agir contre des écarts si insensés au sein même de notre pays ? » a-t-elle lancé. Ericka Bareigts s’est ensuite attachée à défendre certaines mesures-phares de la loi Egalité Réelle distinguant « des mesures d’immédiateté » d’une part et » des mesures structurantes pour les 20 ans à venir » d’autre-part. Elle cite par exemple l’alignement progressif de l’Assurance Vieillesse pour les Parents au Foyer (AVPF), l’augmentation du plafond de ressources du complément familial.
Dans l’hémicycle, les sénateurs ont unanimement critiqué l’arrivée tardive d’un texte dit fondamental pour le développement des Outre-mer, ainsi que le concept « d’égalité réelle ». À l’instar de Mathieu Darnaud, rapporteur de la Commission des Lois qui mentionne un texte qui a perdu « son souffle lors de son adoption à l’Assemblée Nationale. « Le fort enrichissement de ce texte par l’Assemblée nationale a affaibli la portée initiale de ce projet de loi en y intégrant des cosmétiques législatives souvent sans portée normative, d’autres ajouts sont déjà couverts par le droit en vigueur. Enfin, certaines dispositions soulèvent d’importantes questions juridiques, souvent d’ordre constitutionnel », souligne Mathieu Darnaud. En effet, la Commission sénatoriale des Lois a supprimé 47 articles composant cette loi, fixant ainsi à 88 le nombre total d’articles (au lieu de 116 à l’Assemblée Nationale)
« Les Outre-mer ne quémandent rien. Ils n’exigent que l’égalité » #directSénat #PJL #égalitéréelle #outremer pic.twitter.com/11S8vbePv5
— Ericka Bareigts (@ebareigts) 17 janvier 2017
Une loi de pur affichage pour Didier Robert
Plus tard, ce sera au tour du Sénateur de la Réunion Didier Robert de surenchérir parlant même de loi « fourre-tout » et « bricolée ». « Je ne serai pas complice d’une loi de pur affichage qui, sous couvert de définir une stratégie ambitieuse pour les outre-mer, ne pourra avoir aucun autre effet que celui de les maintenir dans une situation d’inégalité et de précarité bien plus réelles que cette soi-disant égalité que vous vous obstinez à défendre. Cette notion d’égalité réelle vous sert en réalité d’écran de fumée pour masquer le vide et l’indigence de vos propositions, qui ne répondent en rien à la situation d’urgence à laquelle font face la plupart des territoires ultramarins » avance Didier Robert.
Ainsi à la notion d’égalité, le sénateur réunionnais oppose celle de la liberté. « Le nouveau modèle de développement que nous sommes un certain nombre à revendiquer aujourd’hui repose non pas sur plus d’égalité mais sur une plus grande liberté laissée aux acteurs locaux, ceux du secteur privé comme aux collectivités locales », précise-t-il.
« Il faut arrêter d’être dans des postures politiciennes. Je veux que nous puissions travailler, que nous puissions avancer… Vous dîtes que vous préférez la liberté à l’égalité, bien sûr parce qu’elle coûte moins cher que l’égalité! Moi, je veux les deux, la liberté et l’égalité. Je veux même les trois, la liberté, l’égalité et la fraternité, lui a répondu Ericka Bareigts.
Au total, 250 amendements ont été déposés par le gouvernement. Les sénateurs ont jusqu’au vendredi 20 février pour discuter du projet de loi Egalité Réelle en Outre-mer. Le Gouvernement ayant engagé la procédure accélérée le 3 août 2016, le texte pourrait ne faire l’objet que d’une seule lecture au Parlement. En cas de désaccord sur le texte, une commission mixte paritaire devrait être mise en place le 6 février prochain. Si la Commission mixte paritaire échoue, le projet de loi retournerait en ultime lecture à l’Assemblée Nationale.