Logement en Outre-mer : Le  député guyanais Gabriel Serville dépose une proposition de loi pour lutter contre le développement de l’habitat informel en Outre-mer

Logement en Outre-mer : Le député guyanais Gabriel Serville dépose une proposition de loi pour lutter contre le développement de l’habitat informel en Outre-mer

© Aziza Ezzedgui

En instaurant une procédure d’expulsion accélérée par voie de décision administrative, le député guyanais Gabriel Serville souhaite lutter contre le phénomène de « bidonvilisation » que connaissent les territoires d’Outre-mer depuis plusieurs décennies.

« L’objectif de cette proposition de loi est d’améliorer les garanties au droit imprescriptible des propriétaires sur leurs biens immobiliers mais également protéger la vie humaine des occupants de ces lieux. Ces derniers vivent souvent dans des habitats insalubres, implantés dans des zones à risques » souligne Gabriel Serville à Outremers 360.Cette proposition de loi  s’inscrit dans la continuité d’un rapport de la Commission nationale d’évaluation des politiques d’Etat Outre-mer (Cnépéom) sur ce thème précis de l’habitat indigne, et dont Gabriel Serville est le rapporteur-pilote de cette thématique.

On estime aujourd’hui que l’habitat informel représente  80  à 90% de l’habitat précaire Outre-mer, est constitué de locaux auto-construits, sans permis de construire, et dans 85% des cas, sans droits, ni titre sur le terrain d’autrui. Ainsi, depuis plusieurs décennies se  forment des zones de « bidonvilisation » dépourvues d’assainissement, eau potable ou autres équipements publics dans les périphéries urbaines des territoires d’Outre-mer.  « Une situation inacceptable pour des territoires qui relèvent de la République Française » poursuit Gabriel Serville.

La Guyane et Mayotte en situation d’urgence

Malgré des avancées en matière de mobilisation de vastes plans de résorption de l’habitat insalubre, le problème de l’habitat informel reste toujours prégnant. Les départements de Guyane et Mayotte sont les deux départements les plus impactés par ce phénomène. Ces deux territoires se caractérisent par une poussée démographique importante et une forte pression migratoire des pays voisins dans ces régions. « A cela s’ajoutent comme autres facteurs en Guyane, des familles disposant de revenus très faibles rendant difficile l’accession à la propriété ou à un habitat digne, et un coût foncier fixé par l’opérateur très fluctuant », précise Gabriel Serville. Il cite pour exemple le cas du quartier Balata qui a vu son prix du mètre carré multiplier par 4 après une opération de résorption de l’habitat insalubre, passant ainsi de 7€ le mètre carré à 30€ le mètre carré. « Une augmentation substantielle pour certaines familles qui ne sont pas en capacité de répondre à ce prix de vente car leurs moyens financiers ne leur permettent pas ». En Guyane, 20% des logements procéderaient de l’habitat informel et précaire. A Mayotte, selon une estimation de l’INSEE datant de 2007, plus de 40% des logements étaient précaires ou insalubres.

Ainsi, l’estimation du nombre global de logements indignes outre-mer est portée à 83 000 unités abritant environ 200 000 personnes, « soit l’équivalent de la population de la Guyane », indique le rapport de la CNÉPÉOM.

Manquements et carences de l’Etat

Si la poussée démographique et la pression migratoire constituent des facteurs majeurs de la prolifération d’habitats informels, Gabriel Serville dénonce également les conséquences néfastes des carences de l’Etat et du manquement de ses obligations en matière de production de logements même s’il reconnaît que la Guyane a été bien aidée dans les cadres des programmes de l’Agence Nationale de la Rénovation urbaine (ANRU) et du Nouveau programme de Rénovation urbaine (NPRU). « Actuellement en Guyane, on produit 500 à 600 logements par année, alors qu’il en faudrait 3600 en moyenne ». Gabriel Serville constate également un délai trop court entre la constatation d’une habitation occupée illégale et la prise de décision d’expulsion des occupants par la justice, d’où la formulation dans sa proposition d’instaurer une procédure d’expulsion accélérée par voie administrative. « A Matoury par exemple,on a laissé des habitants construire des bicoques sur pilotis dans une zone qualifiée à risques par le plan de prévention des risques d’inondation ».

Quelles solutions ?

Dans son rapport de la CNÉPÉOM, Gabriel Serville a dressé 12 recommandations pour lutter contre l’habitat indigne en Outre-mer. Parmi celles-ci, on note entre autres l’ amélioration de l’accompagnement des familles dans l’accès au financement, clarifier et redéfinir les critères de répartition des crédits de la ligne budgétaire unique pour mieux tenir compte des besoins des territoires, réinvestir les centres urbains et les centres bourgs aux Antilles. Mais pour Gabriel Serville, il faut surtout accentuer les campagnes de sensibilisation sur la législation en matière d’occupation du domaine privé. « Beaucoup de personnes sont facilement bernées par les marchands de sommeil du fait d’une méconnaissance de la réglementation. La proposition  de loi a donc pour finalité d’agir fermement sur ces squats, en permettant que la loi accorde à la force publique la possibilité d’opérer une expulsion accélérée par la procédure administrative, évitant ainsi de rentrer dans une procédure judiciaire qui prend du temps, fait perdre de l’argent et de l’énergie, et qui bien souvent n’aboutit pas toujours favorablement », conclut Gabriel Serville.