Marine Le Pen à Mayotte, lors de la campagne présidentielle. L’ancienne candidate à l’Elysée avait obtenu des résultats inédits, surfant sur les thème de l’immigration et de l’insécurité ©David Lemor / AFP
Consigne de vote ponctuelle ou rapprochement durable ? Marine Le Pen a pris une décision inédite pour elle en appelant à voter LR à l’élection législative partielle de Mayotte, en proie à une contestation contre l’insécurité et l’immigration.
La présidente du FN, qui souhaite rebaptiser son parti « Rassemblement national », avait longuement vanté la nécessité de nouer des alliances lors du congrès du parti le week-end dernier à Lille, notamment pour les élections européennes de 2019. Alors que son parti renvoyait dos à dos LR et le PS depuis des années et dénonçait « l’UMPS », elle donne un signe d’ouverture inédit en direction de la droite.
Mansour Kamardine est un collègue courageux et lucide sur la situation dramatique de son île, liée à la submersion migratoire et à l’insécurité endémique. C’est pourquoi j’ai choisi d’appeler à voter pour le candidat qu’il soutient. #Mayotte MLP
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 15 mars 2018
A Mayotte, a expliqué Marine Le Pen jeudi sur CNEWS, « nous n’avons pas réussi à trouver de candidat, ce qui d’ailleurs m’a fait prendre une décision. J’ai entendu Mansour Kamardine (député LR de Mayotte, NDLR) à la commission des Affaires Etrangères, il a pris tout à fait conscience de la gravité de la situation de l’île ». « C’est la raison pour laquelle, compte tenu de la gravité de la situation, je pense qu’il faut passer au-dessus de nos étiquette partisanes et je souhaite que les électeurs qui m’ont fait confiance à l’élection présidentielle à Mayotte se reportent sur le candidat de Mansour Kamardine », a annoncé la présidente du FN, sans mentionner explicitement le parti Les Républicains. Le candidat LR pour cette Législative partielle est Elad Chakrina, qui avait déposé le recours ayant annulé l’élection de son adversaire Ramlati Ali.
Lors de la Présidentielle de 2017, Marine Le Pen était arrivée seconde du scrutin du 1er tour à Mayotte, derrière François Fillon, avec 27,28% des suffrages exprimés. La cheffe du Front national a rassemblé 42,85% des suffrages exprimés au second tour à Mayotte. Souhaitée par certains membres de LR, comme l’ex-ministre Thierry Mariani, cette alliance a une nouvelle fois été repoussée par l’état-major du parti jeudi soir. « Comme déjà évoqué nous préférerons toujours perdre plutôt que de gagner grâce à une quelconque alliance avec le FN. Nos valeurs ne se négocient pas à travers des accords électoraux honteux ! », a prévenu sur Twitter Virginie Calmels, vice-présidente de LR.
« Reniement total », selon Philippot
L’ancien bras droit de Marine Le Pen Florian Philippot a immédiatement qualifié la position de Marince Le Pen de « reniement total ». Pour lui, « hors de question de choisir entre un mondialiste LR et un mondialiste PS ou équivalent ». Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, y a vu le « premier signe concret » de la « nouvelle ‘culture de l’alliance’ » de Marine Le Pen et dénoncé sur Twitter « une main tendue qui en dit long sur la dangereuse pente sur laquelle Laurent Wauquiez entraîne son parti ».
Premier signe concret de sa nouvelle « culture de l’alliance » : @MLP_officiel soutient le candidat @lesRepublicains à #Mayotte.
Une main tendue qui en dit long sur la dangereuse pente sur laquelle @laurentwauquiez entraîne son parti.— Benjamin Griveaux (@BGriveaux) 15 mars 2018
Sept Français sur dix ne souhaitent pas que le Front national « s’allie avec la droite » dans l’avenir, mais le pourcentage des partisans d’une telle alliance progresse, selon un sondage Odoxa diffusé jeudi et réalisé avant l’appel de Marine Le Pen. Plus d’un sympathisant FN sur deux (55%, +9) soutient une telle alliance, qui ne trouve en revanche que 33% (-2) de partisans chez les proches du parti Les Républicains, selon cette enquête avec Dentsu Consulting, pour France Info et Le Figaro.
Régulièrement accusé, notamment au sein de son propre camp, de « courir après le Front national », Laurent Wauquiez a récemment accompli une visite de plusieurs jours à Mayotte où il a dénoncé un « abandon » du gouvernement, un terme repris jeudi par la cheffe du FN. Accompagné sur place par Mansour Kamardine et Elad Chakrina, Laurent Wauquiez a prôné une remise en cause du droit du sol sur le territoire, une mesure souhaitée de longue date par Marine Le Pen, y compris pour l’Hexagone. « Mayotte et nos compatriotes mahorais valent mieux que des querelles d’appareils » a ajouté la Présidente du FN sur Twitter.
Ramlati Ali sans étiquette
Huit candidats se présentent au premier tour de cette élection législative partielle de la 1ère circonscription de Mayotte prévu dimanche, dans une île en proie à de graves tensions. Les barrages mis en place par la population pour protester contre l’insécurité et l’immigration clandestine sont restés en place jeudi. L’élection, en juin 2017, de Ramlati Ali face à Elad Chakrina avait été invalidée par le Conseil constitutionnel qui avait estimé « altérée » la « sincérité du scrutin » en raison du « faible écart de voix » entre les deux finalistes.
Première femme députée mahoraise, Ramlati Ali avait recueilli 7 992 voix contre 7 938 voix pour son adversaire. Élue sous l’étiquette PS, elle était passée dans le groupe de La République en marche (LREM). Elle a récemment été mise en examen pour complicité de fraude électorale, en protestant de son innocence. Pour cette Législative partielle, Ramlati Ali ne portera plus l’étiquette LREM.
Avec AFP.