Le parti indépendantiste en conférence de presse ce 16 janvier ©Facebook / Radio Tefana
Le président de la République Emmanuel Macron doit se rendre en Polynésie française après les élections municipales, vraisemblablement à la mi-avril. En amont, le parti indépendantiste Tavini Huira’atira prépare cette visite officielle à travers ses thèmes de prédilection : les essais nucléaires et la décolonisation.
Les couteaux s’aiguisent. Sur le papier, Emmanuel Macron se rend en Polynésie pour y tenir un One Planet Summit spécial îles du Pacifique, une sorte de Sommet France-Océanie, durant lequel il veut aborder, avec les États et territoires insulaires du Pacifique, les questions environnementales. Un sujet de premier ordre pour ces îles qui, lors de la COP 21 à Paris, avaient milité pour un accord contraignant à 1,5°C. Mais durant sa visite, le président de la République sera naturellement attendu sur d’autres sujets, parmi lesquels celui des 193 essais nucléaires français qui ont eu lieu sur les atolls de Moruroa et Fangataufa de 1966 à 1996.
Et c’est le parti indépendantiste Tavini Huira’atira, mené par Oscar Temaru, qui lance l’offensive. « Nous réclamons, encore et encore, toute la vérité rien que la vérité sur cette période sombre de notre Histoire, et les conséquences précises de ces essais », a asséné le parti dans un communiqué diffusé à l’issue d’une conférence de presse, ce jeudi 16 janvier à Tahiti. Parmi ces conséquences, le parti cite celles sur « le plan sanitaire : le nombre d’enfants mort-nés, d’enfants handicapés, de cas de cancer ainsi que les coûts afférents, sans parler des nouvelles maladies de civilisation induites », sur le « plan environnementales, honteusement ignorées lors de la COP21 de Paris ! » et « sur le plan politique économique social et culturel ».
Parallèle avec les incendies en Australie
Anti-nucléaire depuis sa création en 1977, le parti indépendantiste fait un parallèle entre les fumées de particules issues des incendies en Australie qui ont traversé le Pacifique, et les retombées radioactives occasionnés par les essais nucléaires. Selon le Tavini, les fumées australiennes « sont la preuve concrète que la puissance des vents a pu transporter très loin les nuages radioactifs ». « À partir des dates précises de chacun des tirs aériens réalisés et en fonction des vents alors présents, on peut déterminer la portée de tous ces nuages radioactifs », poursuit-on. « En 1976, les syndicats australiens et néo-zélandais ont fait l’embargo sur tous les produits importés dans le Pacifique, parce que ces 2 pays ont également été contaminés, de même que l’Amérique du sud, alors n’en parlons pas de nos îles de Polynésie ».
Dépollution des atolls
Le parti indépendantiste demande également la dépollution des atolls suite aux essais souterrains français. « Le ventre de notre mère nourricière contient des tonnes et des tonnes de déchets radioactifs qui pourraient, un jour, polluer notre océan ». En octobre 2019, le député indépendantiste Moetai Brotherson (GDR), avait adressé un courrier au Premier ministre et aux ministres des Armées, de la Santé et de l’Environnement, pour demander la dépollution de ces atolls. Sans réponse, le parlementaire va réitérer son courrier en ajoutant le président de la République à sa liste de destinataire. « Je la porterai en main propre » a-t-il assuré à Tahiti-infos. « Suite à la période des tirs souterrains, il y a des puits de plusieurs centaines de mètres de profondeur et des déchets radioactifs. Il y a le fameux (…) banc Colette, avec du plutonium dans le lagon, sous le sable. Je demande à ce que tout ça soit retiré ».
Les essais nucléaires n’est pas le seul sujet sur lequel le parti indépendantiste souhaite amener le président de la République. En 2013, le parti d’Oscar Temaru avait obtenu la réinscription de la Collectivité d’Outre-mer sur la liste des territoires à décoloniser de l’ONU. « Nous ne pouvons que dire BRAVO à Monsieur Emmanuel Macron car effectivement « la colonisation est crime contre l’humanité » », dit le parti, en référence aux propos qu’avait tenu le président, alors candidat, en Algérie. « Il s’agit maintenant de joindre l’acte à la parole et d’entamer concrètement ensemble le processus de décolonisation de Maohi Nui ». En février 2016, Oscar Temaru avait aussi abordé ce sujet avec l’ancien chef de l’État François Hollande, alors en visite dans la Collectivité.