©Kenzo Tribouillard / AFP
Le Président de la Polynésie française est actuellement à Paris. Au programme de cette nouvelle mission: les Accords de Papeete et la révision du décret indemnisant les victimes des essais nucléaires.
Début juin, le Président de la Polynésie française Edouard Fritch, avait dévoilé aux élus polynésiens l’ossature des Accords de Papeete: un préambule, une déclinaison des engagements du président de la République et une liaison avec la loi sur l’égalité réelle. Dans ces accords, l’épineux volet des essais nucléaires y sera repris et également traité dans le cadre de la modification du statut d’autonomie polynésien, en chantier à Paris auprès du ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas. Les principaux grands engagements annoncés par François Hollande lors de sa visite en février dernier y figureront: la reconnaissance du fait nucléaire, la sanctuarisation de la Dotation globale d’autonomie (DGA) à 90 millions d’euros, la dotation annuelle de service oncologie du centre hospitalier de Polynésie française, le mémorial d’archives, d’information et de documentation sur le nucléaire et la dépollution de l’atoll de Hao, qui a servi de base militaire lors des trente années d’essais.
Le point le plus important reste la modification du décret qui indemnise les victimes des essais nucléaires. Votée en 2010, la loi d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, autrement appelée Loi Morin, n’a été que très peu efficace. Seuls une dizaine de dossiers ont abouti à l’indemnisation alors que l’on compte plus d’un millier de demandes à ce jour. Edouard Fritch assistera ce mercredi à la deuxième réunion du Coscen (Comité de suivi des conséquences des essais nucléaires) pendant laquelle les modifications apportées au décret indemnisant les victimes des essais nucléaires seront présentées. Il y sera accompagné par le président de l’Assemblée de la Polynésie française Marcel Tuihani, du président-fondateur de l’association Moruroa e Tatou Roland Oldham et d’un représentant de l’association Tamarii Moruroa. A noter que les polynésiens ont commémoré, ce samedi 2 juillet, le cinquantenaire du premier tir nucléaire, Aldebaran.
Dans les Accords de Papeete figureront également d’autres points importants concernant l’économie numérique, le développement et la culture. Notamment le second câble sous-marin international qui reliera la Polynésie à ses voisins du Pacifique et le câble domestique qui apportera du haut-débit aux îles Marquises et Tuamotu ou encore, la mise à niveau de l’aéroport international de Tahiti-Faaa. Dans le volet culturel; l’inscription du Marae de Taputapuatea au Patrimoine mondial de l’Humanité, la construction d’un centre culturel aux abords du Marae et la réalisation d’un autre centre culturel en lieu et place de l’ancien Hôpital de Vaiami à Papeete. Ces Accords de Papeete devraient passer devant le Parlement en octobre prochain et le Président de la Polynésie française espère les signer avant la fin de l’année.
Loi Morin: Quelles modifications ?
L’Etat devrait proposer de baisser le seuil d’acceptation d’une causalité entre maladie radio-induite et rayonnements ionisants actuellement utilisé par le Civen (Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires). Un point risque de faire débat puisque les associations demandent à ce que ce « risque négligeable » soit effacé de la loi.
Le nouveau décret devrait aussi prévoir de prendre en compte les éléments de jurisprudence contenus dans la position du Conseil d’Etat sur ce sujet, la révision de la méthodologie du Civen, la reprise des anciens dossiers rejetés par le Civen et la possibilité pour les demandeurs de recourir à de la visio-conférence pour ceux qui n’ont pas la possibilité de se rendre en métropole pour défendre leur dossier d’indemnisation.
Le gouvernement polynésien souhaite aussi remettre en service le comité de suivi des conséquences des essais nucléaires. Créé à l’arrivée au pouvoir de l’indépendantiste Oscar Temaru en 2004, ce comité a été supprimé en 2013, lorsque Gaston Flosse fait son retour à la tête de l’exécutif polynésien. Sèchement remercié à ce moment là, Bruno Barrillot qui dirigeait ce comité devrait reprendre du service. Véritable mémoire vivante des essais nucléaires en Polynésie française, le retour de Bruno Barrillot est vu comme une aide à « objectiver et à dépassionner » le débat, a confirmé le ministre polynésien de la Santé, Patrick Howell.