2020 en Outre-mer: « La délégation doit demeurer une voix forte pour la préservation des intérêts des ultramarins» Olivier Serva, président de la délégation Outre-mer à l’Assemblée nationale

2020 en Outre-mer: « La délégation doit demeurer une voix forte pour la préservation des intérêts des ultramarins» Olivier Serva, président de la délégation Outre-mer à l’Assemblée nationale

Après Jacques Lallié, président de l’Assemblée des îles Loyauté, Sonia Backès, présidente de la province Sud en Nouvelle-Calédonie, Eric Leung président de la CPME Réunion et Jean-Pierre Philibert, président de la Fedom, c’est au tour du Président de la délégation Outre-mer à l’Assemblée nationale Olivier Serva de se confier sur sa rétrospective de l’année 2019 et ses perspectives pour 2020. Pour Olivier Serva, l’année 2019 a été « une année d’engagements  au service des Outre-mer» et l’année 2020 sera placée sous le signe de l’engagement climatique.

Outremers 360: Quel bilan de l’année 2019  dressez-vous à la Délégation Outre-mer de l’Assemblée nationale

Olivier Serva: L’année 2019 aura été pour la Délégation aux Outre-mer une année de plus d’engagements au service des Outre-mer. J’irai même plus loin, c’était une année de plus pour les engagements tenus !

L’année 2019 a été d’abord celle de l’engagement écologique pour la Délégation aux Outre-mer qui s’était engagée l’année précédente aux côtés de la mission d’information risque climatique majeurs pour une meilleure prise en considération de la vulnérabilité de nos territoires au changement climatique.

La première audition de l’année dernière était ainsi celle de François De Rugy, alors, ministre d’Etat, ministre de la Transition Ecologique et Solidaire. Alors des engagements forts avaient été pris et devraient être tenus dans le texte à venir sur les risques climatiques en Outre-mer, porté par Annick Girardin, ministre des Outre-mer.

A la suite de cette première audition, nous avions mené un travail conséquent avec la Commission du développement durable sur un développement économique durable en Guyane. Nous avions alors, entendu et relayé les réclamations des associations de protection de l’environnement et des peuples autochtones face au très controversé projet de Montagne d’Or. C’était un bel engagement qui a permis au Gouvernement de prendre une position claire défavorable à cette ambition anti écologique.

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Audition de M. Didier Livio, associé responsable de Deloitte Développement Durable, par Olivier Serva et Barbara Pompili sur la présentation de l’étude sur le potentiel de développement économique durable de la Guyane

C’était une manière pour nous d’inscrire résolument l’action de la Délégation dans la trajectoire 5.0 voulue par le ministère des Outre-mer et porté par Annick Girardin.

Parallèlement, de grands chantiers ont été ouverts l’année précédente et ont trouvé leur achèvement en 2019. Il en va ainsi notamment du Grand Livre sur les discriminations pour lequel les collègues Rapporteures ont apporté un second tome relatif aux discriminations dont les ultramarins sont victimes dans leur territoire et dans l’hexagone. La présentation de ce rapport par Mesdames, Maud Petit, Cécile Rilhac et Josette Manin aura été l’occasion de faire la lumière sur de nombreuses injustices et j’ai à cœur que leurs conclusions soient rappelées régulièrement à l’exécutif.

Au titre de la lutte contre les injustices, la Délégation aux Outre-mer a aussi pris sa part sur des dossiers ô combien importants comme le projet de loi relatif à l’organisation du système de santé mais aussi et surtout sur l’analyse du fonctionnement des hôpitaux en Outre-mer.

A ce propos, j’insiste sur les péripéties endurées par le CHU de la Guadeloupe et son personnel qui doivent plus que jamais, faire l’objet d’une attention de tous les instants afin qu’aucun produit ne vienne de nouveau à manquer au personnel soignant ni aux patients.

  « Il a fallu une mobilisation permanente de la Délégation aux Outre-mer» 

Les combats des députés ultramarins sont aussi nombreux qu’ils sont variés comme vous le savez.

Je pourrais en énumérer un certain nombre : le Chlordécone, les enjeux liés aux Universités, l’eau, les délais de paiement des collectivités locales, le logement social, la redynamisation de l’économie, l’orpaillage illégal ou encore la continuité territoriale… Ce dernier dossier a fait l’objet d’un rapport particulièrement édifiant notamment quant aux difficultés rencontrées sur des territoires aussi variés que peuvent l’être la Guyane, la Polynésie française ou encore la Guadeloupe.

Sur l’ensemble de ces dossiers il a fallu une mobilisation permanente de la Délégation aux Outre-mer pour rappeler à l’exécutif l’ampleur des enjeux et les difficultés rencontrées par la population ou encore les socio-professionnels.

présentation du rapport d’information des Députés Maud PETIT (Val-de-Marne) et Jean-Philippe NILOR (Martinique) sur le sport et la santé dans les Outre-mer © Olivier Serva Facebook

présentation du rapport d’information des Députés Maud PETIT (Val-de-Marne) et Jean-Philippe NILOR (Martinique) sur le sport et la santé dans les Outre-mer © Olivier Serva Facebook

 Outremers 360: Quels sont les dossiers qui ont été les plus marquants en 2019 pour vous ?

Je prendrai deux exemples récents sur lesquels mon engagement et celui de l’ensemble des ultramarins a permis de convaincre le Gouvernement et la majorité des nécessaires adaptations aux réalités locales dont la loi doit faire l’objet : le duty free dans les Antilles et le dépistage de la chlordéconémie dans le sang. On peut s’en douter, ces amendements rompaient quelque peu avec l’orthodoxie fiscale et sociale française mais répondait tout particulièrement à des enjeux de compétitivité économiques ou de protection sanitaires dans nos territoires.

Sur le Duty Free d’abord, avec le Sénateur Dominique Théophile et la Députée Justine Bénin, mais aussi avec l’ensemble des parlementaires des Antilles, nous avons réussi à faire évoluer l’avis de la majorité à l’Assemblée Nationale sur cet amendement qui a pour objet de prévoir, à titre d’expérimentation, un régime de vente hors taxes au bénéfice des touristes arrivant dans les régions de Guadeloupe et de Martinique dans le cadre de croisières maritimes. Les magasins de centre-ville seront ainsi autorisés de vendre en exonération de TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée), d’accises et d’octroi de mer des biens à emporter dans les bagages des touristes effectuant des croisières maritimes. Cette expérimentation complètera les dispositifs existants dans les aéroports. Il est prévu pour une durée limitée de quatre années.

Ensuite, sur le dépistage gratuit du taux de chlordécone, nous avions pris l’engagement au cours de la campagne des législatives en 2017 de trouver un dispositif permettant la prise en charge de ce dépistage de la population. Nous avons alors abondé l’action du plan Chlordécone III qui finance les politiques de réduction de l’exposition des populations de Martinique et de Guadeloupe au Chlordécone de 2 millions d’euros de crédits supplémentaire. Je précise tout de même que le budget alloué à ce plan pour 2020 avait déjà été augmenté par le Gouvernement de 1 million d’euro de plus par rapport à 2019 pour répondre à une demande que j’avais faite l’an dernier. La mise en place de ce dépistage se fera dans le prolongement d’une grande campagne de sensibilisation au dépistage sur les territoires de la Guadeloupe et de la Martinique.

«Je crois que l’Etat devra continuer à prendre toute sa part

dans la lutte contre la vie chère et pour plus de pouvoir d’achat aux ultramarins»

Au-delà des dossiers spécifiques aux Outre-mer, il me semble important de revenir sur un autre dossier : celui de la modification du barème de l’IR (Impôt sur le revenu) que notre majorité a opéré lors de la discussion du dernier projet de loi de finance pour 2020. Le taux appliqué à la première tranche du barème est ainsi passé de 14% à 11%. À ce niveau d’imposition, le gain moyen pour les foyers devrait tourner autour de 350 euros par an ! Les contribuables de la deuxième tranche d’imposition devront pour leur part profiter d’un gain financier de 250 euros en moyenne.

Ainsi, nous protégeons mieux à la fois les revenus les plus faibles, mais aussi la classe moyenne qui a trop longtemps été impactée par les réformes fiscales et les réformes sociales.

La baisse de l’impôt sur le revenu était un engagement pris par le Président de la République et la majorité a rempli cet engagement. Nous devons nous en satisfaire.

Là aussi, il a fallu faire montre d’explications à l’égard de l’ensemble de la représentation nationale pour bien expliquer qu’il ne s’agit pas de jeter le trouble au sein de la population, mais de mieux maîtriser la donnée pour mieux communiquer l’information relative aux bonnes pratiques.

Dans le prolongement de cette mesure et de la nomination par le Gouvernement ainsi que de l’audition par notre Délégation du Délégué interministériel à la Concurrence, je crois que l’Etat devra continuer à prendre toute sa part dans la lutte contre la vie chère et pour plus de pouvoir d’achat aux ultramarins.

© David Lorion Twitter

© David Lorion Twitter

Outremers 360 : Quels sont les sujets ou dossiers 2020 pour la Délégation et vous concernant également compte tenu des échéances électorales à venir ?

La Délégation devra poursuivre son engagement climatique nécessaire et résolu pour la protection de l’environnement contre le changement climatique, aussi bien par des mesures d’atténuation du changement climatique que par des mesures d’adaptation des populations qui subissent les effets au premier chef. Elle doit continuer d’œuvrer pour la valorisation de cette biodiversité exceptionnelle dont nous disposons dans les Outre-mer et cette créativité collective qui nous rend fier.

Elle doit demeurer une institution politique qui déploie une voix forte sur la scène nationale pour la préservation des intérêts des ultramarins et des Outre-mer comme nous avons su le faire pour les intérêts agricoles, ceux des fonctionnaires en matière de congés bonifiés ou de prime de vie chère ou encore sur l’audiovisuel public.

Pour ma part, en tant que Député, j’ai agi à la place qui était la mienne par exemple, par mon engagement sur l’augmentation de la DGF (Dotation Globale de Fonctionnement) pour les collectivités qui a permis une augmentation du taux de majoration démographique des communes des DROM (Départements et Régions d’Outre-mer) en le fixant de 35 à 40,7 % pour l’année 2020. Ce qui représente pour 2020 une hausse du montant des dotations des communes des DROM de 11 millions d’euros.

Mais vous le savez c’est un nouveau cycle politique qui s’ouvre avec la perspective des élections municipales de mars 2020 et mon action future sera, je l’espère guidée par un objectif élémentaire : améliorer le quotidien de mes concitoyens de la Ville des Abymes. C’est également ainsi que je me suis battu au cours de mon mandat afin que, entre autres, la Ville des Abymes puisse bénéficier de l’action cœur de Ville menée par l’Etat dans les centres villes, mais aussi que nos concitoyens les plus modestes puissent de nouveau bénéficier de l’allocation logement accession. Je me suis également engagé pleinement afin que la Ville puisse bénéficier de financement d’Etat pour la rénovation du stade René Serge Nabajoth.

Dans la perspective d’une victoire, je vais donc relocaliser mon engagement dans la cité qui m’a vu naître et où je veux voir le quotidien de nos concitoyens abymiens être amélioré plus concrètement.

Propos recueillis par Marie-Christine Ponamalé