Entreprise en Outre-mer : Le transfert du RCS bloqué

Entreprise en Outre-mer : Le transfert du RCS bloqué

Jean-Paul Tourvieille est le le Directeur général de l’Association des Chambres de Commerce et d’Industrie des Outre-mer. En ce début d’année, il a souhaité convier Outremers360 pour faire part de son exaspération face au transfert du Registre des Commerces et Sociétés, qui tarde à être mis en oeuvre. Explications.

L’Association des Chambres de Commerce et d’Industrie des Outre-mer (ACCIOM) a été créé en 2011. Le but était d’assurer la concentration entre les Chambres de Commerce et d’Industrie (CCI) d’Outre-mer avec échange d’expérience et actions sur les thèmes communs aux régions ultramarines. L’ACCIOM se veut aussi « être une force unifiée de propositions auprès des autorités pour faire évoluer l’environnement législatif, réglementaire ou administratif des économies ultramarines ». C’est Manuel Baudouin, président de la CCI de Martinique, qui préside actuellement l’ACCIOM. Et aujourd’hui, Manuel Baudouin et son directeur général Jean-Paul Tourvieille pointent du doigt le retard d’une compétence que l’ACCIOM souhaite disposer depuis ses prémisses : le Registre des Commerces et Sociétés (RCS). Pour être concis, le RCS est le registre d’état civil des entreprises, la preuve de leur existence, le Kbis en somme. L’ACCIOM souhaite effectivement en récupérer la compétence pour rendre ses actions envers les entreprises des Outre-mer plus pertinentes et cohérentes. En effet, le RCS est une compétence du Ministère de la Justice et la délivrance d’un registre d’état civil pour une entreprise ultramarine passe par des tribunaux mixtes. Et c’est là que ça coince.

Manuel Baudouin, Président de la CCI de La Martinique et Président de l'ACCIOM ©DR

Manuel Baudouin, Président de la CCI de La Martinique et Président de l’ACCIOM ©DR

Jean-Paul Tourvieille met en lumière les retards, les dysfonctionnements, le manque de formation et le trop peu de personnel chargé par le ministère de la Justice ou encore, les problèmes de transparence et le fait que le RCS est la dernière priorité des tribunaux mixtes. En Martinique, « 3000 dossiers sont en attentes à cause des formalités administratives », ce qui leur porte bien évidement préjudice. On sent également la volonté du Directeur général de l’ACCIOM de « dématérialiser » le RCS pour plus de facilités pour les entrepreneurs ultramarins. Pour l’heure, rien est fait. Le RCS est toujours géré par le ministère de la Justice. Pourtant, la loi Lurel de 2012 avait permis ce transfert, d’ores et déjà bloqué. Plus tard, la loi Macron votée en aout 2015 a prévu une disposition permettant l’expérimentation de transfert du RCS pendant trois ans et sur trois Outre-mer, « avant janvier 2016 » : la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion. Mais à cette date, la convention n’a toujours pas été signée par la Ministre de la Justice et cinq réunions ont été organisées, de juillets à novembre, pour tenter de débloquer le transfert. Sans succès. À chaque réunion, Jean-Paul Tourvieille l’assure, une « accumulation de problèmes techniques » étaient mis en exergue, une façon de justifier le retard de transfert ou peut être, une simple « mauvaise foi » de la part de la Ministre.

La Loi Macron votée le 6 aout dernier était sensée débloquer la situation. 6 mois après, le transfert du RCS n'est toujours pas d'actualité ©DR

La Loi Macron votée le 6 aout dernier était sensée débloquer la situation. 6 mois après, le transfert du RCS n’est toujours pas d’actualité ©DR

Jean-Paul Tourvieille reste confus face à ce blocage, une seule signature suffirait à rendre le transfert effectif. D’autant plus que ce transfert entraînera des embauches au plan local et qu’il va, selon lui, dans le bon sens de l’économie ultramarine. Le seul Outre-mer qui, de fait, connaît pas les lenteurs et dysfonctionnements du RCS est la Nouvelle-Calédonie, du moins en théorie. Là-bas, le registre d’état civil des entreprises est géré par un service dépendant du gouvernement calédonien. Pour le reste, la situation est, à ce jour, toujours bloquée. L’ACCIOM patientera jusqu’en février. Si passé ce mois le transfert n’est toujours pas effectif, l’ACCIOM promet de faire se entendre une nouvelle fois pour dénoncer une situation « catastrophique » pour les Outre-mer. En attendant, l’ACCIOM aura un autre projet à présenter pour les entreprises ultramarines : le code des entreprises en Outre-mer, « pour rendre les choses accessibles et lisibles ». Sa présentation est prévue le 18 février au Sénat.

Jean-Paul Tourvieille, Directeur général de l'ACCIOM, attend non sans patience que la Ministre de la Justice veuille bien signer la convention qui permettra le transfert des RCS en Outre-mer ©TF

Jean-Paul Tourvieille, Directeur général de l’ACCIOM, attend non sans patience que la Ministre de la Justice veuille bien signer la convention qui permettra le transfert des RCS en Outre-mer ©TF