Desserte aérienne : Air Tahiti Nui accueille « Tupaia », son deuxième 787-9 Dreamliner

Desserte aérienne : Air Tahiti Nui accueille « Tupaia », son deuxième 787-9 Dreamliner

©Aviation Geeks Tahiti

C’est ce jeudi 17 janvier, dans les environs de 15h (heure locale), que la compagnie Air Tahiti Nui a reçu son second Boeing 787-9 Dreamliner, baptisé Tupaia et immatriculé F-ONUI. 

Deux sur quatre. Après le « Fakarava » en octobre dernier, pour marquer les 20 ans de la compagnie au Tiare, Air Tahiti Nui, son PDG Michel Monvoisin ainsi que le Président de la Polynésie française Édouard Fritch et plusieurs parlementaires, ont accueilli le second appareil qui marque le renouvellement complet de la flotte composée jusqu’ici d’Airbus A340. Habillé de la nouvelle livrée de la compagnie, ce deuxième Dreamliner porte surtout le nom du navigateur tahitien qui jadis, guida James Cook dans le Pacifique à bord de l’Endeavour. « En Nouvelle Zélande notamment, sa capacité à communiquer avec les Maoris permet d’éviter plusieurs conflits (avec l’équipage de James Cook, ndlr). Les Maoris l’ont en grande estime et apprécient particulièrement ses évocations de la société tahitienne qui leur rappellent des souvenirs lointains transmis par leurs ancêtres », a raconté Édouard Fritch dans son discours (voir ci-dessous).

Parrainé par la sénatrice Lana Tetuanui et le marin Jacques Wong, dit Papa Ahsoy, le nouvel appareil d’Air Tahiti Nui débutera ses rotations le 30 janvier vers Auckland, puis le 2 février vers Tokyo-Narita et le 23 mars pour Paris-CDG. En mai prochain, la compagnie recevra son troisième Boeing qui portera le nom de « Bora Bora », à l’instar de la célèbre perle du Pacifique mais surtout en hommage au premier appareil de la compagnie, un A340-200 reçu en 1998 après avoir volé pour Air France. Enfin, en août 2019, la compagnie polynésienne recevra son dernier 787-9 Dreamliner qui sera baptisé « Tetiaroa », nom de l’atoll appartenant à la famille Brando, qui autrefois fut le lieu de villégiature de la famille royale tahitienne.

Ces deux derniers appareils sont achetés par la compagnie qui espère obtenir la défiscalisation nationale. « Nous avons répondu au dernier jeu de questions le 24 décembre, maintenant nous attendons la réponse définitive dans les semaines qui viennent », a indiqué Michel Monvoisin.

Qui est Tupaia ? Extrait du discours d’Édouard Fritch 

« Écoutez ce que disait le capitaine Cook de lui : « Tupaia…nous l’avons trouvé très intelligent, et il en savait plus sur la géographie des îles situées dans ces mers, sur leurs produits, sur la religion, les lois et les coutumes de leurs habitants, qu’aucun de ceux à qui nous avions eu affaire jusque-là… » c’était le 13 juillet 1769, Endeavour.

Tupaia est né entre 1725 et 1730 à Raiatea. Il était tahu’a, prêtre, ari’i (chef, ndlr) et propriétaire terrien. Il est le descendant d’une lignée de navigateurs rattachée au marae Tainu’u, situé à Tevaitoa dans la commune de Tumaraa (île de Raiatea, ndlr). Mais c’est à Taputapuatea, à ‘Opoa, qu’à l’adolescence il approfondit ses connaissances en histoire, généalogie et astronomie. Ainsi formé, il devient le navigateur attitré des ‘arioi, la confrérie d’artistes voyageurs associée au marae Taputapuatea dédié au culte de ‘Oro.

La formation des ‘arioi incluait la mémorisation des narrations et la connaissance des traditions ancestrales, la maitrise des arts du spectacle vivant et des jeux et sports traditionnels. L’ensemble de ces talents leur assure leur renommée. Leur compagnie était appréciée et surtout recherchée. Tupaia, encore jeune homme, avait l’habitude de sillonner les îles, que Cook nommera plus tard « de la Société », à la tête de la flottille des pirogues ‘arioi. Jeune il était déjà navigateur.

Vers 1760, Raiatea est envahie par les guerriers de Puni, grand chef de Bora Bora. Grièvement blessé, dépossédé de ses biens, Tupaia s’enfuit avec le maro’ura de Taputapuatea pour se réfugier à Tahiti ou il s’installe en qualité de tahu’a, prêtre du culte de ‘Oro. Il devient rapidement le favori et le conseiller politique de Purea, la grande cheffesse de Papara du clan des Teva. En juin et juillet 1767, l’incompréhension et les malentendus du premier contact entre les autochtones et l’équipage anglais du Dolphin commandé par Samuel Wallis, donnent lieu à un bain de sang. A Matavai, les Tahitiens subissent le feu des armes et canons des Occidentaux.

En dépit du sinistre, Purea, grande cheffesse de Papara et conseillée par Tupaia, vint à la rencontre du Dolphin… Sa stature, sa prestance, son autorité et l’ascendant qu’elle exerce naturellement sur la population la désignent aux étrangers comme la monarque de l’île. Pourtant le district de Pare où se situe la baie de Matavai dépend du jeune ari’i Tu et est sous la tutelle de son oncle Tutaha qui exerce la régence. Tupaia, en fin homme politique, conseiller de Purea, a vite analysé le parti à tirer d’une alliance avec ces étrangers et leur force de frappe. Les bonnes relations évidentes entre Purea et les étrangers accroissent son prestige, sa popularité et son pouvoir de ari’i nui.

En avril 1769, l’Endeavour du capitaine Cook ancre à Matavai pour observer le passage de Vénus. Tupaia vient à sa rencontre. Son habileté à faciliter les travaux des scientifiques du bord ou de cartographie du capitaine Cook le distingue. Cook accepte sa demande d’embarquer avec son jeune assistant Taiata quand l’Endeavour quitte Tahiti en juillet 1769.

Sa science de la navigation est rapidement mise à profit par Cook, à qui Tupaia indique précisément la voie des îles sous le Vent. L’Endeavour visite Huahine, Raiatea, Tahaa et passe au large de Tupai, Maupiti et Bora Bora : tout à son ressentiment, Tupaia a dénigré les ressources de l’île et dissuadé Cook d’y relâcher. Le 14 août 1769, quand l’île se profile à l‘horizon, il annonce Eteroa, l’ancien nom de Rurutu aux Australes.

A bord, Tupaia et Taiata, parrainés par Banks responsable de l’expédition scientifique, sont logés dans les quartiers des officiers et des scientifiques. Les longues périodes en mer sont exploitées pour ranger, identifier et classer les échantillons de sciences naturelles ou ethnographiques, achever et légender les dessins esquissés à terre.

Les infinies connaissances pluridisciplinaires de Tupaia font merveille et alimentent les rapports et journaux de ses compagnons de voyage. A défaut de se comprendre dans une langue commune parfaitement maîtrisée, c’est en dessinant que les lacunes linguistiques sont comblées. Tupaia réalise ainsi une série d’aquarelles, un plan du marae de Mahaiatea, une carte détaillée des Iles Sous le Vent que l’on retrouve en Grande Bretagne et une carte d’Iles du Grand Océan dont l’original demeure introuvable.

Carte dessinée par Tupaia

Carte dessinée par Tupaia

Aux escales, le diplomate Tupaia se révèle un atout inestimable : il introduit les visiteurs selon les rituels en usage, facilite les premiers contacts et neutralise la méfiance voire l’hostilité déclarée des peuplades abordées. En Nouvelle Zélande notamment, sa capacité à communiquer avec les Maoris permet d’éviter plusieurs conflits. Les Maoris l’ont en grande estime et apprécient particulièrement ses évocations de la société tahitienne qui leur rappellent des souvenirs lointains transmis par leurs ancêtres.

Bien qu’il n’ait lui-même voyagé qu’aux Iles de la Société et visité deux îles des Australes et de l’archipel lointain des Tonga, le maître navigateur a généreusement partagé, avec Cook et ses compagnons de voyage, ses connaissances. Elles concernent un océan d’îles étiré sur 7 000 km de Rotuma à l’Ouest à Rapa Nui à l’Est et 5 000 km de Hawaii au Nord à Rapa Iti au Sud. Sa carte témoigne de l’extraordinaire connaissance des navigateurs polynésiens des courants marins, des vents, de la position des astres et de l’observation et de l’interprétation des moindres indices. Elle résulte de siècles de navigation à bord des grands pahi du peuplement de l’Océanie.

En mars 1970, Cook écrivait : « …Tupaia nous a fait un jour la description de plus de cent-trente îles et sur sa carte il en a positionné soixante-quatorze ».  mars 1770, Endeavour. En décembre 1770, à Batavia aujourd’hui Jakarta, Tupaia et Taiata décèdent de dysenterie et malaria.

Mes chers amis, en baptisant ce second Dreamliner du nom de Tupaia, j’ai voulu ressusciter le rayonnement d’un homme remarqué et remarquable par son intelligence, non seulement dans nos îles, mais aussi par Cook et nos amis Maori ».