Illustration ©Port autonome de Papeete
Les paquebots avaient déjà mauvaise presse en raison de leur impact sur l’environnement et plus particulièrement les lagons. Mais depuis l’émergence du Covid-19, l’industrie du tourisme de croisière tangue entre la défiance des populations et l’inquiétude générale qui se sont installées depuis l’apparition du nouveau coronavirus.
« Le gouvernement prend toutes les mesures pour empêcher sa propagation au plan national comme dans les Outre-mer », a tenté de rassuré la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, rappelant qu’aucun cas n’est pour l’heure recensé dans les territoires ultramarins. Des territoires qui sont généralement des îles de quelques centaines de milliers d’habitants au maximum, et où les rumeurs, la désinformation et la panique se propagent plus rapidement que le Covid-19. « La crainte est légitime », reconnait toutefois la ministre, « la peur est la première des réactions et communiquer sa peur avec les réseaux sociaux c’est extrêmement facile ».
Nouvelle-Calédonie : Trois îles interdites aux paquebots
Cette peur, elle se traduit essentiellement sur le plan touristique, première manne économique de la grande majorité des Outre-mer. Et parmi les différents types de tourisme, le tourisme de croisière prend un sérieux coup face à la défiance grandissante des populations locales. En Nouvelle-Calédonie, plus aucun paquebot n’est autorisé à se rendre sur trois îles : l’île des Pins, Lifou et Maré. « Il s’agit d’une mesure de précaution prise par les coutumiers », a déclaré Christian Kaateu, représentant de l’un des clans de la grande chefferie de l’Île des Pins.
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« Nous manquons d’informations sur cette épidémie (…). Est-ce que l’on peut garantir qu’il n’y a aucun danger à manipuler les pièces de monnaie et les billets de banque provenant de ces bateaux ? », a-t-il poursuivi, demandant également que l’accès à Nouméa soit interdit. « Tous nos paquebots viennent d’Australie, où les contrôles sont extrêmement rigoureux », assure pourtant Elodie Jaunay, la directrice de l’agence Kenua, chargée de la logistique pour les navires de croisière dans l’archipel. « La plupart des paquebots que nous refusons sont redirigés vers le Vanuatu, qui continue d’accepter des croisiéristes, tout comme Fidji et la Nouvelle-Zélande », précise-t-elle.
En Nouvelle-Calédonie, la défiance est accentuée par le cas des époux Vittori, des passagers calédoniens du Diamond Princess, paquebot de plus de 3 000 passagers qui avait été mis en quarantaine au Japon. Michel Vittori avait été diagnostiqué positif au coronavirus, tout comme plus de 200 autres passagers.
Présélection des passagers
En Polynésie, les navires de croisières continuent d’affluer au port autonome de Papeete, malgré une méfiance de plus en plus importante de la part de la population. Et cette crainte du coronavirus gagne même certains prestataires comme Heiana qui a préféré accueillir les passagers du MSC Magnifica munie de gants et d’un masque. « C’est le seul bateau pour lequel je me protège parce qu’il a quitté l’Italie le 4 janvier », explique-t-elle, interrogée par Radio 1 Tahiti. Principal foyer en Europe, l’Italie a recensé son premier cas de coronavirus le 31 janvier, soit bien après le départ du navire.
« Nous sommes passés par des pays qui ne sont pas des pays à risque » confie un passager. « On nous demande simplement de nous laver les mains régulièrement et de ne pas se serrer la main », poursuit-il, reconnaissant que le navire devra passer par des pays qui « probablement risque de ne pas nous accueillir ». « Aucun bateau de croisière n’est venu directement des zones contaminées jusqu’en Polynésie française. De nombreux navires opérant dans cette région se trouvent dans les eaux océaniennes depuis déjà un certain temps », a rassuré le gouvernement polynésien dans un communiqué.
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« Les compagnies de croisières ont introduit des mesures strictes depuis début février, notamment des processus de présélection pour déterminer les antécédents de voyage et de contact d’une personne. Elles refusent l’embarquement à toute personne susceptible de présenter un risque accru », ajoute-t-on. « Ces restrictions s’ajoutent à celles introduites par le gouvernement de la Polynésie française (…). Depuis plus de 2 semaines désormais, les escales prévues en Asie du Sud-Est sont annulées par les compagnies de croisière qui modifient progressivement leurs itinéraires vers des zones exemptes de toute contamination ».
Sainte-Lucie refoule un paquebot, inquiétudes en Martinique
En Martinique, c’est le navire Costa Magica qui a suscité l’inquiétude. Parti de la Barbade avec à son bord 300 Martiniquais, le navire a été refoulé à Sainte-Lucie suite à « des restrictions à l’entrée dans le pays », a informé la compagnie. Sainte-Lucie demandait notamment que soient interdits de débarquer les passagers venant de zones à risques. Avec ses 3 000 croisiéristes, dont 600 Italiens, le navire a donc fait cap vers Fort-de-France en Martinique où là également, un accueil glacial les attendait. Après plusieurs négociations avec les associations qui protestaient contre la descente des passagers, le Grand Port Maritime a finalement mis en place des contrôles de températures ce 27 février. Le navire a finalement rejoint la Guadeloupe.
Ce vendredi, un avion en provenance d’Italie devait atterrir avec des passagers du croisiériste MSC. Mais face à la mobilisation de la population, MSC a pris la décision de ne pas embarquer les passagers italiens forçant l’avion à atterrir sans passagers. Dans les deux îles antillaises, les élus locaux et parlementaires ont fait pression auprès de l’État et de l’Agence régionale de santé pour renforcer les contrôles et notamment, empêcher les vols en provenance d’Italie, sensés remplir les navires de croisière, à atterrir à Pôle-Caraïbes et Aimé Césaire.
Masques de protection et prospectus
À La Réunion, deux maires, notamment celui du Port, ont fait part de leurs inquiétudes face à l’arrivée de paquebots, en pleine saison. Cette semaine, le Costa Mediterranea, en provenance de Tamatave à Madagascar, a accosté à La Réunion avec à son bord 2 700 passagers. « Des agents de l’Agence régionale de santé ont arpenté le palace flottant à son arrivée afin d’informer les passagers sur les mesures de vigilance à tenir selon son état de santé. Des prospectus et des masques de protection étaient mis à disposition des passagers », a rapporté le site Zinfos974.
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« Les agents de l’ARS informent les voyageurs à leur arrivée, distribuent des flyers d’information et proposent des masques de protection aux personnes en provenance d’une zone à circulation virale » a en effet rappelé l’ARS et la Préfecture lors d’une présentation du dispositif de protection contre l’arrivée de l’épidémie sur l’île. Le Costa Mediterranea a finalement poursuivi sa route vers l’île Maurice.