Au Quai Branly, Emmanuel Kasarhérou veut faire connaître l’histoire des œuvres au visiteur

Au Quai Branly, Emmanuel Kasarhérou veut faire connaître l’histoire des œuvres au visiteur

©Musée du Quay Branly – Jacques Chirac

Pour que les visiteurs puissent appréhender une « histoire parfois difficile », Emmanuel Kasarhérou, le nouveau président du Quai Branly, table sur des témoignages et une mise en contexte des œuvres dans le haut lieu consacré aux arts premiers.

« Le visiteur pourra avoir accès à l’information qui lui donne un rapport avec une histoire parfois difficile mais qu’il faut absolument raconter en toute transparence », explique l’ancien directeur du Centre Tjibaou de Nouméa, très sensibilisé à la question de l’histoire des œuvres et de leur identité.

« Il faut qu’on puisse mettre l’accent sur les acteurs de cette temporalité, sur les circonstances de la venue, du choix de ces objets », il s’agit d’ « éclairer depuis le départ de la société d’origine », les étapes dans différentes collections, puis « l’arrivée en collection publique », déclare cet homme à la voix calme, dont la nomination en 2020 à la tête du Quai Branly a été saluée par le monde de l’art et des musées.

Il est parfois reproché au Musée du quai Branly de privilégier l’esthétique à la compréhension dans la présentation de ses milliers d’objets. Le plan de longue haleine du nouveau président prévoit d’accompagner les œuvres avec des cartels et des notices documentaires via des QR codes. Ce projet « commencera l’année prochaine, sur quelques objets particuliers », précise celui qui a été responsable de la coordination scientifique des collections du musée.

Le ressenti des témoins 

En amont, « il faut effectuer un gros travail de recherche et cela n’a pas été forcément une question qui était première dans les histoires des musées. Depuis 2019, on a mis en place un programme sur les provenances visant à éclairer de manière scientifique l’origine et la trajectoire de ces objets », explique le directeur, né à Nouméa en 1960 et de père kanak.

« Ce qui m’intéresse aussi, c’est de recueillir le ressenti des gens qui culturellement ont un rapport avec ces objets. On fait déjà ce travail au Cameroun avec les chefferies Bamiléké. Cela pourrait être aussi des artistes d’aujourd’hui attachés à ces cultures, des témoins divers, des gens qui sont citoyens français aujourd’hui et qui ont un lien particulier avec ces cultures parce qu’elles sont celles de leurs grands-parents ».

Le Quai Branly rouvre ses portes avec Emmanuel Kasarhérou à sa tête

Emmanuel Kasarhérou juge qu’« un mouvement a été donné » par le rapport Sarr-Savoy sur les restitutions. Il y a notamment « un certain nombre de projets sur lesquels je travaille avec mes confrères d’Afrique ». « Ce qui m’intéresse, dans le rapport Sarr-Savoy, c’est qu’il nous a enjoints à une sorte d’examen de conscience ».

Mais « les restitutions sont l’une des réponses qui doivent être apportées à la question plus large sur la manière dont les objets du patrimoine peuvent permettre aujourd’hui une meilleure compréhension entre les différentes cultures, de par leur circulation, leur étude, leur valorisation ».

Il juge contre-productives les actions spectaculaires, telles que l’irruption en juin d’activistes au Quai Branly pour protester contre « le pillage de l’Afrique ». « La question sous-jacente est légitime, je comprends qu’on puisse la poser. L’action utilisée pour la donner à voir me paraît complètement contestable et peut agir de manière inverse à ce qui est souhaitée par ces personnes ».

Avec AFP.