En Polynésie, un premier festival d’ambitions pour la filière locale du rhum

En Polynésie, un premier festival d’ambitions pour la filière locale du rhum

Ce vendredi, l’école hôtelière de Polynésie accueillera le tout premier Festival du rhum, organisé par les professionnels d’une filière en plein développement. Présentations, masterclass et dégustations de rhums locaux, aux côtés d’autres produits du terroir… Derrière les verres levés, il s’agit surtout pour le rhum polynésien, sur le point de décrocher la première IGP du Pacifique, d’asseoir sa notoriété, de s’associer durablement à l’image du territoire… Et de réaffirmer ses ambitions : devenir, avec 1 000 hectares de cannes plantée et 3 000 emplois visés, la première filière agricole du pays. Un sujet de notre partenaire Radio 1 Tahiti.

Le premier festival du rhum de Polynésie se tiendra ce vendredi 14 novembre à l’école hôtelière de Punaauia, sur l’île de Tahiti, de 11 à 18 heures. L’événement, organisé par le Syndicat de défense de l’indication géographique rhum pur jus de canne de Polynésie, réunira treize exposants liés de près ou de loin à la canne à sucre : distilleries locales, brasseries, producteurs de café aromatisé au rhum ou encore artisans de la filière, comme l’entreprise Biobase. Les visiteurs pourront aussi profiter de plateaux de charcuterie proposés par les élèves de l’école et d’un stand de spécialités asiatiques signé Kim Phat.

« Plus que l’alcool, mettre en avant la production locale »

« Plus que l’alcool, le but est de mettre en avant le terroir et la production locale », souligne Marotea Vitrac, président de ce syndicat, qui regroupe cinq distilleries -Mana’o, Manutea, T.I.E, Pari Pari, et Tamure- et près d’une centaine d’emplois directs. L’entrée est fixée à 2 000 francs, avec un verre offert. Les dégustations de rhum sont gratuites, et une vingtaine de cuvées seront à découvrir, avec des bouteilles disponibles à la vente. Des ateliers tels que le « bouturage et le pressage de jus de canne » sont aussi au programme.

Mais il ne s’agira pas seulement de lever des verres. Cinq masterclass sont au programme. Maitrise de la distillation, origine des caractères des rhums, impact du vieillissement en fût… Pendant 50 minutes « chaque producteur va mettre en avant leurs rhums, quelques cuvées exclusives » et « approfondira certaines spécificités », comme l’explique Youk Moux, vice-président du syndicat et propriétaire de la distillerie familiale Moux (Tamure Rhum). Les sessions sont limitées à vingt places, à réserver sur le site de l’événement pour 5 000 francs, entrée comprise.

Une IGP dans un mois et demi

Au-delà de la fête, cette période marque une étape importante pour la filière. « On a décidé de faire le festival du rhum à cette période parce qu’on a un dossier d’indication géographique en cours », rappelle Marotea Vitrac, aussi directeur de la distillerie Mana’o. Ce label, en préparation depuis six ans, garantit la qualité, la traçabilité et l’origine du rhum. Cette IGP, reconnue au niveau du Pays, devrait être acceptée d’ici un mois et demi, « après l’enquête publique » qui est en cours

Par la suite, « nous irons défendre à Bruxelles auprès de l’Inao (institut national de l’origine et de la qualité). C’est ce qui garantira la commercialisation et la qualité de nos produits à l’international », poursuit le président du syndicat. Pour l’heure, le rhum de Martinique est le seul rhum ultramarin labellisé par une Appellation d’origine contrôlée (AOC) depuis 1996, ce qui permet à l’île antillaise de développer une filière spiritourisme par exemple. 

Certains rhums de Guadeloupe, de Guyane ou encore de La Réunion ont, eux, obtenu l’IGP en 2015. La Polynésie pourrait ainsi être la première dans le Pacifique à obtenir tel label pour son rhum. Et la deuxième filière locale, après le monoï de Tahiti. D’autres produits emblématiques comme la vanille de Tahiti attendent toujours, le dossier a été déposé en août.

« On croit beaucoup dans le spiritourisme »

Si la production reste modeste, avec 70 hectares de canne à sucre, le syndicat ne manque pas d’ambition, une fois cette reconnaissance en poche. Et vise même à faire du rhum et des dérivés de la canne « la toute première filière agricole de Polynésie française ». Il faudrait pour ça, avant tout, faire du rhum un symbole touristique. « On voudrait que les gens, quand ils réservent un billet d’avion, pensent rhum. On croit beaucoup dans le spiritourisme », affirme Marotea Vitrac. 

L’objectif : atteindre 1 000 hectares de plantations de canne d’ici 20 ans, soit près de 3 000 emplois directs. « On deviendrait quasiment un des premiers employeurs de Polynésie française et c’est quelque chose qui ne nous semble pas inatteignable », assure le président du syndicat.

« Quand on voit qu’à La Réunion il y a près de 20 000 hectares (22 000 plus précisément), en Guadeloupe plus 9 000 (12 000), en Martinique 6 000 (4 000), on ne voit pas pourquoi, sur les 118 îles de Polynésie française, il n’y aurait pas 1 000 hectares », conclut le président du syndicat, convaincu du potentiel de la filière locale pour porter haut les couleurs du rhum polynésien.

Nanihi Laroche pour Radio 1 Tahiti