Ô tour de la santé avec François Klein, chef de la mission Outre-mer de la DGS : « Dans l’ensemble des territoires d’Outre-mer, plus ils sont isolés, éloignés, plus c’est une chance pendant une pandémie»

Ô tour de la santé avec François Klein, chef de la mission Outre-mer de la DGS : « Dans l’ensemble des territoires d’Outre-mer, plus ils sont isolés, éloignés, plus c’est une chance pendant une pandémie»

Outremers 360, en partenariat avec Sciences Ô, donne la parole aux jeunes des Outre-mer, qui interroge des acteurs de la santé dans une série d’interview « Ô tour de la santé», diffusée sur notre site et notre page Youtube. Après un premier épisode consacré au mal-être et au suicide des étudiants, avec l’association Nightline France, Sciences Ô nous emmène dans ce second épisode dans les bureaux de la Direction générale de la santé du ministère de la santé. L’invité,  François Klein, chef de la mission Outre-mer de la Direction Générale de la Santé, nous dresse une analyse générale des défis sanitaires dans les différents territoires et revient sur la gestion de la crise de la Covid-19 depuis le premier confinement.

Ingénieur généraliste de formation, François Klein a travaillé pendant une dizaine d’années dans les systèmes d’information des Hôpitaux de Paris et se retrouve par la suite à travailler dans les systèmes d’information du ministère de la santé. Depuis deux ans et demi, il dirige la mission pour les outre-mer de la DGS. Cette petite cellule de travail coopère avec les autres ministères et notamment celui des Outre-mer et déploie son action sur deux volets : un aspect juridique et un aspect de coordination dans la mise en place des politiques de santé publique. La coordination est le maître mot pour la mission outre-mer puisque selon le statut du territoire, les compétences en matière de santé sont allouées de manière différente.

« Dans l’ensemble des territoires d’Outre-mer, plus ils sont isolés, éloignés, plus c’est une chance pendant une pandémie comme celle-là. » En effet, face à la crise de la Covid-19, du fait de l’éloignement géographique, des besoins préexistants et des statuts juridiques particuliers, les DROM, COM et TOM ont connu une évolution et une gestion différente de la crise. François Klein explique que les départements et régions d’outremer ont eu une gestion similaire au reste du territoire national notamment du fait du rôle central assuré par les ARS. Toutefois, en raison de son récent statut de département et de son faible niveau de développement, Mayotte a manqué d’un certain nombre de dispositifs contrairement à la Guadeloupe, Guyane, Martinique ou la Réunion. Dans les collectivités d’outremer c’est-à-dire Saint-Martin, Saint-Barthélémy, Saint-Pierre-et-Miquelon, la Polynésie française et Wallis et Futuna la compétence en santé est adaptée en fonction du poids démographique et de l’éloignement mais reste du ressort de l’Etat. A contrario, la crise de la Covid a mis en exergue l’autonomie de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie en termes de santé.

Le chef de la mission Outre-mer présente l’Etat comme un appui dans ces deux territoires qui ne dispose d’aucune compétence directe en matière de santé. « On a essayé d’anticiper au mieux les besoins des territoires pour que l’épidémie, lorsqu’elle arriverait,  ait le moins d’impact possible dans les territoires où on sait que le tissu sanitaire n’est pas forcément le plus développé. On a travaillé  dès le début de la crise avec l’ensemble des acteurs, soit des ARS, soit des agences locales de santé en fonction du nombre de cas et des possibilités sur place. […] Avec des difficultés accrues dans les Outre-mer, on avait double peine; c’est-à-dire difficulté à avoir des stocks et difficulté à les envoyer parce qu’il n’y avait quasiment plus d’avions.»

Lors de la première vague, les territoires se sont vus confinés en même temps que l’Hexagone alors que les pics n’avaient pas encore été atteint. François Klein explique que cette mesure a permis de prévenir en tout cas de retarder la diffusion du virus dans les territoires initialement moins bien équipés. D’ailleurs, le chef de mission constate que ce décalage entre l’Hexagone et les territoires a permis l’envoi d’équipements et des renforts humains. Cela a notamment été le cas à Mayotte où 4 à 5 semaines après le premier confinement, un relâchement général s’est fait ressentir en raison de la période de Ramadan. Pour la Guyane, la population a été sévèrement frappée par le virus lorsque le Brésil a connu son pic de contamination. Afin de pallier le manque de personnels et de matériels, un appel national a été formulé afin d’envoyer en renfort du personnel soignant. Grâce au volontarisme de la réserve sanitaire et de l’envoi de lits de réanimation et de tests, la situation en Guyane s’est progressivement stabilisée.

Force est de constater que la crise de la Covid-19 a renforcé les particularités culturelles de ces territoires très influencés par leur environnement régional. « Les difficultés auxquelles sont confrontés les Outre-mer sont liées à la fois à leur position géographique, l’isolement, l’éloignement et puis la précarité aussi. » Le chef de la mission outremer dresse une rapide analyse: les constantes dans l’ensemble des Outre-mer qui soulèvent des enjeux de santé publique sont la malnutrition, l’accès inégal aux soins indépendamment des régions, le manque d’infrastructures pour les territoires à la démographie vieillissante, l’illettrisme qui peut fait obstacle aux messages de prévention.

Enfin, François Klein conclut ainsi : « Le message que j’aimerais faire passer, c’est que se développe cette autonomie alimentaire car la santé viendra avec et en parallèle il nous faut poursuivre la lutte contre l’illettrisme, quelle que soit la langue. ».

Association Sciences Ô