Tour à 360° – épisode 7 : Comment les médias des Outre-mer s’adaptent pendant la crise ?

Tour à 360° – épisode 7 : Comment les médias des Outre-mer s’adaptent pendant la crise ?

En cette période de pandémie, Outremers360 est parti faire un tour (virtuel !) chez ses confrères situés dans les bassins indien, atlantique et pacifique. Pour ce septième épisode, nous avons interviewé Béryl Ziegler, rédactrice en chef d’Actu.nc, en Nouvelle-Calédonie.

Outremers360 : Pour commencer, pouvez-vous présenter votre média Actu.nc ?

Béryl Ziegler : Actu.nc est né en février 2014. Parmi les médias traditionnels calédoniens (sachant que la Nouvelle-Calédonie comptait un seul quotidien, la télévision d’État et cinq radios locales), il nous semblait qu’il y avait de la place pour un hebdomadaire d’informations locales et régionales orienté sur le Pacifique sud qui privilégierait le décryptage et l’analyse sociale, politique et économique. Notre ligne éditoriale est de tendance libérale et loyaliste. Son format est un magazine (A4). Sa distribution est confiée à une société spécialisée qui diffuse l’hebdomadaire dans 200 points de vente (marchands de journaux, supérettes, grande distributions, stations-service, boulangeries…).

Nous avons aussi un site internet et une application. Le quart de la diffusion est assuré par abonnement papier et/ou numérique. Notre cœur de cible est constitué des « décideurs », des personnes qui sont prêtes à payer l’exemplaire au tarif de 100 francs pacifique (83 centimes d’euro, ndlr) et qui cherchent de l’analyse et du décryptage.

Quel dispositif de couverture médiatique avez-vous déployé durant la crise sanitaire liée à la Covid-19 ?

Outre une diffusion papier, toutefois diminuée en pagination et en nombre de tirages, nous avons profité du confinement pour intensifier notre présence numérique sur Facebook et notre site internet www.actu.nc avec l’apport de vidéos (une nouveauté) et une augmentation de la cadence de publication de nos articles sur le net. À ce titre, nous avons davantage relayé d’informations quotidiennes.

En tant que média privé, comment ont réagi les annonceurs face à la crise ? 

Nous avons noté une baisse des campagnes de nos annonceurs, mais la reprise est progressive après notre unique mois de confinement. Notre perte de chiffre d’affaires est estimée à 6% du chiffre d’affaires annuel.

Quel est votre sentiment sur la situation actuelle de la Nouvelle-Calédonie, sur le plan politique, à moins de 3 mois du deuxième référendum sur l’accession à la pleine souveraineté ?

Des tensions sociétales se font ressentir sur fond de crise économique. Une crise présente avant le coronavirus que le confinement et la fermeture des frontières ont intensifiée. Le référendum, comme les précédents, crée de la tension entre les communautés. La crise sanitaire et économique aura peut-être une influence. Reste à savoir si cela sera en faveur des loyalistes ou pas, sachant que sans l’apport de l’État, la Nouvelle-Calédonie aurait eu du mal à s’en sortir pendant cette période délicate. Un argument qui pourrait peut-être inciter davantage d’électeurs à opter pour le Non à l’indépendance.

Quelle est votre vision sur l’avenir économique de la Nouvelle-Calédonie, alors que l’incertitude est très forte de la part des investisseurs en cette période pré-référendaire ?

L’avenir à court et moyen terme est très incertain. Entre crise du nickel, crise du tourisme et hyper-protectionnisme, la conjoncture est loin d’être au beau fixe. Les industries manquent crucialement de compétitivité, notamment dans le nickel. À cela s’ajoutent les incertitudes institutionnelles pendant au moins trois ans, sachant que le 3e référendum aura lieu dans un an et demi. Il est probable que le Non à l’indépendance l’emporte au 2e puis au 3e référendum.

Béryl Ziegler, rédactrice en chef d'Actu.nc

Béryl Ziegler, rédactrice en chef d’Actu.nc

Mais il faudra ensuite rechercher une nouvelle solution institutionnelle après avoir réuni les partenaires de l’Accord de Nouméa autour de la table : l’État, les loyalistes et les indépendantistes. Ce qui risque de prendre un certain temps. Bref, il n’y a pas de raison de voir l’avenir économique proche évoluer sensiblement en positif. Hormis peut-être la consommation intérieure du Caillou qui connaît un certain regain depuis le déconfinement.

Par la suite, en fonction de la solution institutionnelle qui sera décidée, la Nouvelle-Calédonie aura de beaux atouts (zone maritime, économie verte, économie bleue, indépendance fiscale, qualité de vie, espace…) à faire valoir et pourrait connaître à nouveau de belles perspectives, à condition de faire les bons choix, à la fois politiques et économiques.

Propos recueillis par Amélie Rigollet.