Tour à 360° – épisode 6 : Comment les médias des Outre-mer s’adaptent durant la crise ?

Tour à 360° – épisode 6 : Comment les médias des Outre-mer s’adaptent durant la crise ?

En cette période de crise, Outremers360 est parti faire un tour (virtuel !) chez ses confrères situés dans les bassins indien, atlantique et pacifique. Après RCI, Radio 1, nous avons interviewé Mayia Le Texier, directrice générale d’Antenne Réunion.

Outremers360 : Comment l’équipe a-t-elle réagi dès la mise en place du confinement ?

Mayia Le Texier : Le management du groupe Antenne Réunion a très vite pris la mesure de la crise Covid avec deux objectifs principaux : en premier lieu, protéger nos collaborateurs et en second, maintenir nos activités essentielles pour notre territoire. Nous avons ainsi organisé le travail en télétravail et pour les besoins de continuité de notre activité d’information et d’antenne, nous avons mis en place des rotations d’équipes sur site en préservant des mesures de prévention et de sécurité strictes. Les équipes Antenne Réunion ont œuvré et continuent à œuvrer chaque jour pour être aux côtés des Réunionnais et des acteurs économiques et publics du territoire. Je suis particulièrement fière de mes équipes et des actions qu’elles portent chaque jour avec sang-froid et de belles valeurs sous-jacentes durant cette période compliquée. J’ai vu un profond engagement et une grande solidarité interne et à destination des Réunionnais.

Quelle organisation interne avez-vous mis en place ?

Nous avons dès début mars, revu en profondeur notre organisation, nos process, nos offres, et nos métiers. À partir du 16 mars, nos collaborateurs « à risque » et également ceux vivant avec un profil « à risque » ont été mis en travail à distance ou arrêtés. Nous avons également déployé de nombreuses mesures que nous avons renforcées et ajustées dans le temps pour protéger nos collaborateurs sur site ainsi que nos journalistes sur le terrain. Nous avons repensé l’ensemble de nos méthodes et fonctionnement. À titre d’exemple, nous avons créé des espaces virtuels pour que les collaborateurs puissent maintenir le lien et échanger, ou bien encore innové en termes de production avec de nouveaux modes de tournage à distance.

Quels dispositifs de couverture médiatique avez-vous déployés dès le début de la crise du covid-19 ?

Nous avons densifié notre information avec des JT renforcés et des éditions spéciales, avec des reportages, directs ou encore des invités exceptionnels. Nous avions initié au début de la crise le 3030, un numéro par lequel les Réunionnais posent leurs questions à des invités du JT. Plus de 15 000 questions nous ont été adressées. Egalement, les journalistes de Linfo.re ont initié une démarche solidaire en créant le groupe RéSo #RestNoutKaz sur Facebook pour rassembler et mettre en lumière les nombreuses initiatives solidaires des Réunionnais. Nous avons également suivi de près le déconfinement avec des éditions spéciales les 11 et 18 mai. Nous avons aussi retravaillé intégralement notre grille pour l’adapter au contexte de crise. Nous avons en outre, imaginé de nouveaux programmes dédiés à la situation tels que Tous à la Maison, Kanal La Blague Fondker, Histoires de Médecins Spécial Covid-19 ou encore La Réunion Solidaire. Nous avons également noué des accords avec d’autres médias comme KTO et Vatican Media pour offrir la messe du Pape François aux Réunionnais à l’occasion de Pâques. Avec l’aide du rectorat, nous avons pu offrir aux enfants des programmes éducatifs et ludiques, en plus d’une nouvelle case de dessins-animés que nous avons installée.

Logo programme covid

Quels dispositifs d’interactivité avec la population avez-vous enclenchés ? Les avez-vous pérennisés ?

Nous avions innové avec le 3030 qui a très bien fonctionné et que nous réactivons selon l’actualité. Le groupe RéSo a également suscité beaucoup d’engouement avec plus d’un millier de vidéos reçues. Il est toujours actif aujourd’hui avec ReSo #RestPrudent. Aussi, nous poursuivons les interactions via skype au sein de nos JT. En ce qui concerne le divertissement, les Réunionnais pouvaient envoyer à Christophe Bégert leurs vidéos via Whatsapp afin de passer des messages à leurs proches dans « Tous à la Maison » ou encore casser la blague avec les poupettes de « Kanal La Blague » via messenger. Dans « La Réunion Solidaire », les téléspectateurs pouvaient aussi envoyer par mail leurs initiatives pour être mis en lumière par Yolande Calichiama. Nous avons même lancé du karaoké au travers de notre programme musical Génération Run Star. Avec le confinement, les équipes ont confirmé leur capacité de s’adapter, d’être agile et d’innover. Evidemment, nous allons garder les bonnes pratiques et capitaliser sur ce que nous avons su développer.

La crise peut aussi être un révélateur de points positifs, est-ce le cas pour vous ?

Cette crise sanitaire sans précédent a brutalement et profondément affecté notre quotidien que ce soit à titre professionnel mais également personnel. Nous avons dû apprendre à travailler dans deux espaces temps et les coordonner. Avec d’une part, des équipes sur site et d’autre part, des équipes qui travaillent de chez eux. Cette crise a effectivement pu mettre en lumière la solidarité des équipes entre elles, mais également leur engagement pour leur métier et leur territoire, leur capacité à être agile et créatif.

Quels sont les enjeux à court et moyen terme d’Antenne Réunion aujourd’hui ?

Nous travaillons actuellement sur la reprise de nos activités post-Covid. Il est selon nous primordial de tirer des enseignements de l’ensemble de ces changements et mutations que cette crise a engendré. Notre organisation mais aussi notre positionnement et nos missions évolueront nécessairement, ils ont déjà évolué. Et il ne faut pas se le cacher, nous avons également un enjeu financier puisque la crise a entrainé une forte baisse des revenus médias, sans que nous puissions bénéficier des dispositifs mis en place par l’Etat, notamment le chômage partiel puisque nos équipes étaient sur le pont, alors que dans le même temps nos charges se sont accrues, afin d’assurer une couverture journalistique indispensable pour lutter contre le virus. Au travers d’ATOM (l’Association des télévisions des Outre-Mer), Antenne Réunion a d’ailleurs alerté le gouvernement sur la situation extrêmement inquiétante dans laquelle se trouvent les médias audiovisuels des Outre-Mer depuis le début de la crise sanitaire.

Propos recueillis par Amélie Rigollet