Six mois après l’ouragan Irma, le tourisme repart peu à peu sur l’île de Saint-Barthélemy. Mais la crise du logement perdure et la vie des habitants reste très compliquée.
Tous les visiteurs qui posent le pied à Saint-Barthélemy sont surpris de la belle allure du port de Gustavia et des abords de l’aéroport. Toutefois, en poussant la balade dans certains quartiers, les stigmates d’Irma sont bien présents. Des toits arrachés, des maisons branlantes dont il ne reste que les murs…
Dans le quartier de Saline, il reste plusieurs centaines de tonnes de déchets à évacuer. Ce seul poste budgétaire a déjà coûté 7 millions d’euros à la Collectivité de Saint-Barthélemy, et ce n’est pas fini. Au centre de propreté, les équipes sont débordées. Même constat du côté des artisans, trop peu nombreux pour répondre à toutes les demandes de reconstruction. Ils travaillent d’arrache-pied, de chantier en chantier, dans une volonté générale sur l’île de rebâtir le plus vite possible.
« On est débordés d’appels, de devis, on a tous reporté nos vacances et on travaille six jours sur sept », relate un frigoriste. Toutefois, ils sont freinés par un autre problème : l’acheminement des matériaux, qui fonctionne au ralenti.
A Saint-Barthélemy, où Johnny Hallyday a été inhumé fin 2017, le tout petit port de commerce n’arrive pas à traiter tous les containers qui arrivent. Il a fallu rattraper les retards liés à Irma, gérer l’afflux de marchandises. La houle de l’ouragan a bougé les fonds marins, et plusieurs mètres cubes de sable dans le chenal ont créé un haut-fond qui empêche certains cargos d’approcher avec toute leur capacité de chargement. Ainsi, pour les matériaux de construction, comme les pièces de réparation des voitures, sans oublier l’approvisionnement des magasins, toute l’île attend ses colis.
Et bientôt la saison cyclonique
Entre les habitations toujours sinistrées et la main d’oeuvre que les entreprises font venir, Saint-Barthélemy connaît une rude crise du logement. Le marché locatif, déjà très tendu, est devenu un champ de bataille. Les entrepreneurs font monter les prix des loyers, les conflits entre propriétaires et locataires explosent. « Si je ne trouve pas en juillet, je vais devoir partir », s’inquiète Sophie. En un mois de recherche, elle n’a visité aucun logement, reçu aucun appel, trouvé aucune piste. « Ma vie est ici, je vis là depuis sept ans… ». Sur une île où le prix d’un loyer est d’environ 2.500 euros mensuels pour un 2-3 pièces, beaucoup de résidents ont jeté l’éponge et sont partis, notamment des familles.
Parallèlement, les professionnels du tourisme s’activent pour faire venir les visiteurs, sans qui l’économie de l’île toute entière est menacée. Ainsi, le port, l’aéroport, les plages et Gustavia, le quartier-capitale de Saint-Barth, ont retrouvé leur cachet. La Bucket Regatta, événement nautique de luxe qui se tenait mi-mars, a permis de revoir débarquer des dizaines d’Américains fortunés sur l’île. Pas assez, toutefois, pour les boutiques et restaurants.
La saison cyclonique, qui débute dans deux mois, hante les esprits. Le traumatisme Irma est encore bien présent. La Collectivité et EDF travaillent sur un programme serré de travaux pour enfouir le maximum de réseaux, au plus vite. Ceux dont les maisons sont endommagées s’angoissent à l’idée de ne pas pouvoir réparer à temps.
Le centre équestre, qui a perdu plusieurs chevaux dans le cyclone, cherche un endroit sûr pour ses équidés survivants, et tente de rapatrier le maximum d’animaux vers la métropole. Début mars, une coupure généralisée du réseau téléphonique et internet a ramené les habitants six mois en arrière, au lendemain d’Irma. « Certains habitants ont paniqué », confie une travailleuse sociale. « Là, si on se prend ne serait-ce qu’un cyclone de niveau 2, ça va être très dur. »
Avec AFP