Rétention des étrangers: Les associations dénoncent « des pratiques démesurées »

Rétention des étrangers: Les associations dénoncent « des pratiques démesurées »

 Près de 48.000 étrangers en situation irrégulière ont été placés en rétention administrative en 2015, selon les associations qui déplorent mardi « des pratiques démesurées« , notamment lorsqu’elles ont servi à désengorger la « Jungle » de Calais.
L’an dernier, 47.565 personnes ont été placées en rétention administrative, soulignent dans leur rapport annuel les associations habilitées à intervenir en centre de rétention administrative (CRA). C’est un peu moins qu’en 2014, qui s’était soldé par 49.537 mesures. Mais « ces cinq dernières années, la France s’est distinguée par un usage massif de l’enfermement des personnes étrangères en vue de leur éloignement« , avec 230.000 enfermements sur cette période, souligne le rapport. La rétention administrative permet de retenir un étranger faisant l’objet d’une décision d’éloignement, dans l’attente de son renvoi forcé. L’an dernier la majorité des placements en rétention (27.947) s’est faite en métropole, et 19.618 en Outre-mer, précisent ces organisations (Assfam, Forum-Réfugiés-Cosi, France Terre d’Asile, Cimade, Ordre de Malte), qui dénoncent « une privation de liberté banalisée, alors que trop souvent l’enfermement est inutile voire abusif et illégal« .
Enfants dans la Jungle de Calais ©Philippe Huguen / AFP

Enfants dans la Jungle de Calais ©Philippe Huguen / AFP

Concernant les mineurs, le rapport souligne le nombre « toujours massif » des placements en rétention en Outre-mer, notamment à Mayotte où ces mesures ont concerné 4.378 enfants, « dont beaucoup rattachés illégalement à un adulte n’ayant aucune autorité parentale« . L’Outre-mer a représenté la quasi-totalité des 4.822 mesures visant des mineurs, même si en métropole le nombre d’enfants placés en rétention avec leurs parents « a plus que doublé, passant de 45 en 2014 à 105 en 2015« . Les associations s’alarment plus généralement de la situation à Mayotte où « le recours systématique au placement en rétention » s’accompagne selon elles « de défaillances particulièrement marquées dans le respect des droits des personnes« . Au bout du compte les observations réalisées dans les CRA « remettent profondément en question la finalité de la rétention« , affirment les associations, car en métropole, « seules 46% des personnes retenues ont été éloignées en 2015« , dont près de la moitié vers un pays de l’Union européenne.
Centre de rétention administrative à Pamandzi, Mayotte ©DR

Centre de rétention administrative à Pamandzi, Mayotte ©DR

Ce rapport est publié alors que le Parlement a adopté en février une loi sur le droit des étrangers prévoyant notamment une réforme de la rétention, avec intervention du juge des libertés et de la détention au bout de 48 heures (au lieu de cinq jours) et priorité à l’assignation à résidence sur la rétention, sauf en cas de risque de fuite. Mais cette loi « ne marque pas de rupture avec une politique d’éloignement basée sur un système d’enfermement à grande échelle qui s’accompagne de violations des droits« , estime le rapport, notamment parce que les préfets conserveront « une grande latitude » pour choisir entre rétention et assignation à résidence. Aussi les associations appellent-elles à « la mise en oeuvre de véritables alternatives à la rétention« , en rappelant que la privation de liberté « ne doit en aucun cas devenir banale« .
Avec AFP