Pour le pape François, pas d’exception au célibat des prêtres en Amazonie

Pour le pape François, pas d’exception au célibat des prêtres en Amazonie

Dans un plaidoyer très attendu sur l’Amazonie, et publié mercredi, le pape François ferme la porte à l’ouverture de la prêtrise aux hommes mariés et l’ordination de femmes diacres. Il s’est néanmoins exprimé sur la destruction de l’Amazonie, et les crimes et injustices envers les peuples amérindiens.

Ces propositions avaient été formulées après un « synode » régional en octobre par des évêques d’Amazonie pour les régions reculées de cette région d’Amérique du Sud. Sur la question la plus controversée pour l’Église, permettre à des hommes pieux ayant une vie maritale stable de devenir prêtres, le pape de 83 ans n’a pas modifié, mercredi, sa conviction profonde selon laquelle la prêtrise doit être un appel de Dieu, un « don ».

Nommer des laïcs pour combler des problèmes d’effectifs ne rentrant pas dans sa logique, même s’il a encouragé un débat, le premier pape jésuite de l’histoire a préféré « exhorter tous les évêques, en particulier ceux de l’Amérique latine », à envoyer plus de missionnaires en Amazonie. L’Église est confrontée à un manque criant de prêtres itinérants, les seuls en mesure de donner la communion, sacrement essentiel de la doctrine chrétienne.

Le pape a par ailleurs réitéré son attachement à la règle générale du célibat des prêtres, dans un livre-entretien paru mardi en Italie, consacré au pape polonais Jean-Paul II (Saint Jean-Paul le grand). « Je suis convaincu que le célibat est un don », y souligne-t-il. « Cheminant dans le sillon de Paul VI, puis celui de Jean-Paul II et Benoît XVI, je ressens avec force le devoir de penser au célibat comme une grâce décisive qui caractérise l’Église catholique latine. Je le répète : c’est une grâce, pas une limite ».

En janvier 2019, il avait déjà précisé n’être « pas d’accord pour permettre que le célibat soit optionnel », tout en envisageant « quelques possibilités pour des endroits très reculés » comme les îles du Pacifique ou l’Amazonie, en manque criant de prêtres. Le célibat des prêtres, qui ne figure pas dans la doctrine de l’Église catholique romaine, est une règle disciplinaire devenue obligatoire au XIe siècle.

François encourage néanmoins les laïcs, hommes et femmes, à travers des formations, à continuer à accomplir des services ecclésiaux cruciaux. Il a rendu hommage au rôle essentiel des femmes laïques pour transmettre la foi dans les communautés d’Amazonie. « Elles devraient pouvoir accéder à des fonctions, y compris des services ecclésiaux », écrit François, sans être plus spécifique.

Dans son texte, le pape insiste sur la beauté des rites amazoniens avec leur « mystique d’admiration sacrée devant la nature », raillés durant le synode par certains traditionalistes catholiques. Un groupuscule avait même volé dans une église des statues amazoniennes sacrées pour les jeter dans le Tibre. « Ne nous précipitons pas pour qualifier de superstition ou de paganisme certaines expressions religieuses qui surgissent de la vie des peuples », a-t-il prévenu. Cependant, la suggestion du synode d’un « rite » amazonien (officiellement reconnu par l’Église) est uniquement mentionnée dans une note de bas de page.

Dans son document, François a des accents bien plus passionnés pour dénoncer « les entreprises, nationales et internationales, qui détruisent l’Amazonie et ne respectent pas le droit des peuples autochtones ». « Les noms qui leur correspondent : injustice et crime », a-t-il ajouté. « Le recours à des moyens éloignés de toute éthique est fréquent, comme le fait de sanctionner des protestations, y compris en ôtant la vie aux autochtones qui s’opposent aux projets », a-t-il déploré. Les relations économiques deviennent « un instrument qui tue » lorsque « les autorités donnent un accès libre aux industries du bois, aux projets miniers et pétroliers, et à d’autres activités qui dévastent les forêts et polluent l’environnement », selon lui.

Le pape a rappelé que « la protection des personnes et celle des écosystèmes sont inséparables », une notion qu’il résume par l’expression d’écologie « intégrale ». Dans son texte, truffé de références à des documents des églises locales amazoniennes mais aussi de nombreux poèmes, il s’approprie ce commentaire venant de Colombie : « Nous demandons que cessent les mauvais traitements et les destructions de la Mère terre (nom donné par les autochtones à la planète). La terre a du sang et elle saigne, les multinationales ont coupé les veines à notre Mère terre ».

Face à l’injustice, le pape François appelle en outre à « s’indigner » et à « demander pardon » pour un « passé honteux » d’exactions contre les indigènes. Citant par exemple leurs souffrances à l’époque de l’exploitation du caoutchouc en Amazonie vénézuélienne. Il faut « construire des réseaux de solidarité et de développement », plaide Jorge Bergoglio (nom de naissance du pape) en appelant tout le monde à s’engager, y compris les dirigeants politiques.

Avec AFP.