Polynésie française – Essais Nucléaires: L’Association 193 veut accompagner les victimes

Polynésie française – Essais Nucléaires: L’Association 193 veut accompagner les victimes

©Tahiti-infos

L’Association 193, autour de son fondateur le père Auguste Carlson, a annoncé la création d’une cellule d’accompagnement des victimes polynésiennes des essais nucléaires souhaitant entamer une démarche d’indemnisation dans le cadre de la loi Morin. Cette cellule devrait être effective en janvier 2017.

Après le référendum, l’accompagnement. L’Association 193 a annoncé la création d’une cellule d’accompagnement des victimes des essais nucléaires, dans toute la Polynésie française. L’Association souhaite ainsi faciliter les procédures des demandes d’indemnisations. En juillet dernier, Roland Oldham, président de l’association Moruroa e Tatou expliquait les démarches compliquées que devaient entreprendre les potentielles victimes: « Elles doivent se rendre en France, à leurs frais, pour accéder aux documents, en français. La plupart, ce sont des populations des îles qui ne parlent pas et ne lisent pas le français. C’est à la victime elle-même de prouver qu’elle a une maladie radio-induite. Elles doivent aussi payer elles-mêmes les experts. Et il faut savoir que l’indemnisation est de 40 000 euros, dont la moitié par pour la Caisse de Prévoyance Sociale (CPS, équivalent de la Sécurité sociale en France) ».

Pour atteindre ses objectifs, l’Association 193 compte s’appuyer sur ses sections mises en place dans les communes et les îles de Polynésie française. Celles-ci entameront un recensement des malades atteints d’au moins une des 21 maladies radio-induites reconnues par la loi Morin (voir encadré), ou de leur ayants-droit en cas de décès. Pour le président de l’association, il s’agit d’ « une autre étape, très importante » de son action, après la pétition pour la mise en place d’un référendum local sur les conséquences et les réparations des essais nucléaires. L’Association 193 a demandé une aide financière de 4 millions de francs pacifique, soit environ 33 520 euros, au gouvernement polynésien. « Si elle ne nous est pas accordée, nous ferons quand même », a toutefois affirmé le père Auguste.

La loi Morin: 1 043 demandes, 7 indemnisations

Depuis 2010, la loi d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, dite loi Morin, a indemnisé 7 polynésiens sur près de 1 043 dossiers de demande soumis au Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen). Entre 1992 et 2015, la Caisse de prévoyance sociale (CPS) a recensé 7 489 personnes atteintes d’au moins un des 21 cancers reconnus comme potentiellement radio-induits par le décret d’application de la loi Morin, pour l’indemnisation des victimes du nucléaire, soit 54,6 milliards de francs pacifique (environ 457 millions d’euros) de dépenses engagées pour le traitement de ces personnes. Parmi ces 7 489 personnes, les deux tiers sont aujourd’hui décédées.

En juillet dernier, le Civen a ouvert l’indemnisation à une personne ayant vécue entre la commune de Papara, côte Ouest de Tahiti, et l’île de Raiatea. Première victime de ce genre, elle n’a jamais mis les pieds sur les atolls de Moruroa, Fangataufa ou encore Hao, base arrière des essais. Atteinte d’un cancer en 1994 et décédée en 2004, elle n’a en outre, jamais travaillé dans un environnement directement lié au Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP). Néanmoins, les experts et médecins ayant suivi le dossier ont clairement identifié son cancer comme étant radio-induit, obligeant l’Etat a le reconnaître et indemniser ses ayants-droit.

Liste des 21 maladies radio-induites reconnues par le décret du 30 avril 2012 pris en application de la loi Morin:

Leucémies (sauf leucémie lymphoïde chronique car considérée comme non radio-induite).
Myélodysplasies.
Cancer du sein.
Cancer du corps thyroïde pour une exposition pendant la période de croissance.
Cancer cutané sauf mélanome malin.
Cancer du poumon.
Cancer du côlon.
Cancer des glandes salivaires.
Cancer de l’œsophage.
Cancer de l’estomac.
Cancer du foie.
Cancer de la vessie.
Cancer de l’ovaire.
Cancer du cerveau et système nerveux central.
Cancer des os et du tissu conjonctif.
Cancer de l’utérus.
Cancer de l’intestin grêle.
Cancer du rectum.
Cancer du rein.
Lymphomes non hodgkiniens.
Myélomes.

Zone géographiques et dates prises en compte:

La loi Morin n’ouvre l’indemnisation que dans des zones géographiques précises et limitées dans le temps:

Sahara : Reggane-plateau et Hammoudia pour la période allant du 13 février 1960 au 31 décembre 1967 et pour le Centre d’expérimentations militaires des Oasis (CEMO) dont la délimitation sera difficile à établir: la montagne Taourirt Tan Afela, un site pour les expériences complémentaires au Tan Ataram, une base militaire à In Amguel, un centre civil Oasis 2…, pour la période allant du 7 novembre 1961 au 31 décembre 1967.

Polynésie française: Les atolls de Moruroa entre le 2 juillet 1966 et le 31 décembre 1998. L’atoll de Hao (certaines zones) et la presqu’île de Tahiti du 19 juillet au 31 décembre 1974. Le « secteur angulaire » (îles Gambier et les atolls de Tureia, Pukarua et Reao) du 2 juillet 1966 au 31 décembre 1974 (période des essais aériens). De source officielle, plus de 200 retombées radioactives des essais aériens ont affecté tous les archipels polynésiens, dont 31 retombées radioactives qui ont affecté Tahiti entre 1966 et 1974.

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PH1102-Les retombées de Centaure sur Tahiti 1974