Polynésie: Atteinte du syndrome Phelan-McDermid, la jeune Tehani se lance à l’assaut du Mont Temehani

Polynésie: Atteinte du syndrome Phelan-McDermid, la jeune Tehani se lance à l’assaut du Mont Temehani

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Tehani, jeune polynésiennne de 5 ans, est atteinte d’une maladie rare: le syndrome Phelan-McDermid. Afin de « faire connaître cette maladie qui n’est pas assez détectée dans le Monde », Tehani, ses parents, l’association Tehani et les Enfants Phelan-McDermid qu’ils ont crée, ainsi que l’association Tuihana, se lanceront à l’assaut du Mont Temehani (île de Ra’iatea), le 22 août prochain.

« Tehani, âgée de 5 ans, est notre fille. Elle est atteinte d’une maladie rare: le syndrome Phelan-McDermid », expliquent Nadège et Tama Burns, parents et fondateurs de l’association Tehani et les enfants Phelan-McDermid. « Ce syndrome se traduit par un spectre autistique, et un manque de tonus musculaire (hypotonie) », poursuivent-ils, « Tehani surpasse la maladie chaque jour et montre à tous qu’avec de la ténacité et persévérance, elle arrive maintenant à  faire ses premiers pas ».

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C’est donc déterminée que la jeune famille, soutenue par l’association Tuihana, se lancent à l’assaut du Mont Temehani, situé sur l’île de Ra’iatea. « Nous avons pour objectif de monter au sommet du Mont Temehani pour passer un triple message: qu’un enfant handicapé peut aussi accéder à ce qui parait impossible avec de l’entraide humaine, faire connaitre le syndrome Phelan-McDermid, et sensibiliser à la fleur Tiare Apetahi ». Cette fleur, qui apparaît d’ailleurs dans le logo de l’association Tehani et les enfants Phelan-McDermid, est rare, endémique de l’île de Ra’iatea et fortement menacée d’extinction (voir encadré).

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C’est exclusivement sur le Mont Temehani, à gauche sur la photo, que pousse la Tiare Apetahi ©Travel Boulevard

« Notre fille est complètement dépendante d’une tierce personne », racontent Nadège et Tama Burns. « Elle a 5 ans et a fait ses tous premiers pas en septembre dernier mais Tehani a encore besoin du fauteuil roulant car elle se fatigue vite. Elle ne sait pas encore se laver seule, manger, jouer avec d’autres enfants. Elle mordille beaucoup les choses, mais mange encore mixée. On doit, au quotidien, être très vigilant car elle n’a aucune conscience du danger ».

Pour remplir ce défi, l’association Tehani et les enfants Phelan-McDermid ont notamment besoin de soutiens, et de sponsors. « Pour l’instant nous avons eu une réponse très positive de l’entreprise Air Tahiti, qui nous offre le billet pour Raiatea. Nous cherchons encore des sponsors pour financer l’hébergement sur place à Uturoa ». En attendant et pour en savoir plus, Nadège et Tama Burns organisent, le mardi 15 août, une journée d’information de 9h à 18h, au Jardin de Paofai, dans la ville de Papeete. D’autres journées d’informations sont prévues à Ra’iatea, juste avant l’ascension du Mont Temehani.

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 Qu’est-ce que le syndrome Phelan-McDermid ?

Ce sont les docteurs Kathy Phelan et Heather M.Dermid qui ont découvert le syndrome dans les années 90 et grâce à la progression de la Science avec des nouvelles techniques de décomposition de l’ADN, permettant de voir l’infiniment petit.
Le test appelé la CGH Array permet de voir ces petites délétions sur les chromosomes, car un simple caryotype ou un test FISH permet de voir que des délétions d’une certaine taille mais pas les plus petites. On parle aussi de test « micro puces » permettant de déceler ce syndrome. Pour rappel l’être humain possède 22 paires de chromosomes plus une paire de chromosome XY.
Le syndrome Phelan-McDermid est une micro-délétion, c’est à dire une perte sur l’extrémité du bras long(q) du chromosome 22, avec la perte d’une partie du matériel génétique dont le gène Shank3 (aussi appelé PROSAP2), qui joue un rôle important pour la connexion des neurones dans le cerveau, car le gène SHANK3 code pour une protéine intervenant dans le fonctionnement des synapses du cortex cérébral et du cervelet.
La grande majorité des patients sont de novo, c’est à dire sans hérédité des parents.

Il existe trois sortes de cas:
– perte de l’extrémité du bras long
– perte des deux extrémités qui se rejoignent en anneau
– dernier cas en plus d’avoir perdu du matériel génétique sur le bras long certains présentent du matériel génétique supplémentaire venant d’un autre chromosome (translocation).

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Suivant la grandeur de la délétion sur le chromosome 22 et la position exacte de ce manque par sa taille on peut savoir quels sont les gènes manquants, par contre la recherche n’est pas suffisamment avancée pour connaître toutes les fonctions de ces gènes.
Signes caractéristiques:

– Retard de développement moteur et capacité d’apprentissage.
– Retard ou absence d’acquisition du langage
– Baisse ou absence du tonus musculaire
– Croissance de normale à rapide
– 80% des personnes atteintes du syndrome ont un trouble de spectre autistique.
– Un mouvement de mastication ou de mordillement permanent

Après, chaque enfant est différent mais la plupart ont un trouble d’apprentissage. Des crises d’épilepsie peuvent survenir avec l’âge avec des signes parfois subtils.

 

 

La Tiare Apetahi: endémique, rare et menacée

Ce n’est pas par hasard que l’association Tehani et les enfants Phelan-McDermid a choisi la Tiare Apetahi comme logo et symbole du combat de la jeune Tehani. Comme cette fleur au destin singulier, le syndrome Phelan-McDermid est rare, et peu connu du grand public.

De nombreuses légendes entourent la Tiare Apetahi. La plus connue raconte l’amour entre Tiaitau et le roi Tamatoa de Ra’iatea, parti rejoindre le roi Pomare II de Tahiti pour prendre part à la bataille de Fei Pi (guerre qui opposa les troupes de Opuhara, polynésiens contre le protectorat français, et celles de Pomare II, aidé par les missionnaires). Tiaitau, afin de guetter le retour de son bien aimé, décida de monter sur le Mont Temehani, avec une noix de coco: « Je mettrai cette noix de coco dans le trou de Apo’o hihi ura. La noix de coco effectuera un voyage sous la terre et émergera près de la mer, à la source Piha ura. De là, la noix de coco dérivera pour telle ou telle île et te suivra. Si tu as soif, prends la noix de coco, fais un trou et bois son eau de telle manière que lorsque tu colleras ta bouche au coco, tu m’embrasseras…», dit-elle au roi Tamatoa.

Tiaitau continua son escalade jusqu’au point dit de Apoo hihi ura; mit sa noix de coco dans le trou, se tînt du coté droit, regarda encore une fois en direction du Marae Taputapuatea (également situé sur l’île de Ra’iatea) et vit la pirogue double de son bien-aimé : « Ah mon amour, ta rame brille au soleil dans l’écume des vagues ; ta pirogue double plonge et replonge dans les vagues ; Ah ! mon cœur a mal très mal, mon amour !  Je plante mon bras dans le sol de ma montagne ; puis il fleurira et sa fleur sera et aura l’aspect visuel de ma main ouverte. Ce sera cette main, qui est une fleur à présent, qui te fera signe ô mon amour. Va mon amour et reviens-moi – Va ô mon amour et reviens-moi ».

©Emilie & Nico / Blogspot.fr

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Puis, elle regarda le trou de Apoo Hihi Ura, se laissa tomber à l’intérieur pour mourir tant son chagrin était si grand qu’elle ne pouvait supporter d’apprendre la mort de son roi qu’elle adorait tant. [source: Tahiti Heritage / Félix Faaeva]

De nos jours, la protégée Tiare Apetahi, qui pousse toujours exclusivement sur le Mont Temehani, est en grand danger d’extinction. Chercheurs, scientifiques et associations tentent de sauver cet arbuste de la famille des Campanulaceae. Toutes les tentatives de replantation, dans d’autres îles des Îles-sous-le-vent ont échoué. Aussi fragile que rare, la Tiare Apetahi éclot une fois par jour, très tôt le matin.