Journée des Peuples autochtones: Pourquoi est-il important de célébrer ces Journées en Guyane ?

Journée des Peuples autochtones: Pourquoi est-il important de célébrer ces Journées en Guyane ?

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A l’occasion de ce 9 août où l’on célèbre la journée internationale des populations autochtones par les Nations Unies, quelle est la situation des peuples autochtones et plus particulièrement des peuples amérindiens en Guyane. Projet minier de la Montagne d’Or, biopiraterie, vague de suicides, les Amérindiens ont été régulièrement au coeur de l’actualité ces derniers mois. Outremers 360 vous propose de revenir sur les différentes revendications de ces peuples premiers en Guyane avec ce descriptif de Dominique Martin-Ferrari de Métamorphoses Outre-mer.

Les amérindiens sont 13.000 natifs en Guyane Française , souvent dans une grande pauvreté, confrontés aux chercheurs d’or illégaux en quête d’une reconnaissance de leurs droits. Cette journée est une excellente occasion de les soutenir et de rappeler leurs revendications. Nous n’oublions pas qu’une nouvelle vague de suicide vient de toucher cette jeune population perdue comme le disait l’ancienne députée Chantal Berthelot « entre tradition et trop rapide progrès ».

Une journée internationale

C’est en 1994, que le 9 août a été déclaré Journée internationale des populations autochtones par les Nations unies. Les peuples autochtones, comptent environ 370 millions de personnes et vivent dans 90 pays (5% de la population mondiale). Ils sont les héritiers d’une grande diversité linguistique et culturelle, ainsi que de coutumes et de traditions ancestrales, dont nous avons beaucoup à apprendre en ces temps où la terre est malmenée. Ils comptent pas moins de 5 000 cultures différentes Les peuples autochtones, (ou indigènes, aborigènes, Premières Nations, peuples premiers, natifs, peuples originaires) sont les descendants des premiers habitants d’une zone géographique à l’époque où des groupes de populations de cultures et d’origines ethniques différents sont arrivés et sont devenus prédominants par la conquête, l’occupation ou la colonisation.

Les responsabilités françaises

La France a des responsabilités à leur endroit. Elle ne leur reconnaît pas le droit d’être peuple. Ce serait contraire à notre Constitution dont le peuple est « un et indivisible » Elle a signé cependant le droit à la réparation et à l’autodétermination (cf : la déclaration des droits des peuples autochtones adoptée à l’ONU le 13 septembre 2007).
Les amérindiens réclament que leur soient restituées les terres qui leur permettraient de maintenir leur mode de vie et leur culture. Suite aux graves incidents sociaux de 2017, le gouvernement français s‘était engagé à une restitution de 400.000 ha (moins de 5% du territoire guyanais). Un engagement pour l’instant en « stand bye » (ils ont droit d’usage mais non de propriétés sur 9% du territoire). Certes, la notion de propriété privée de la terre est une notion occidentale qui n’a rien de commun avec la propriété collective d’une terre mère. Le conflit juridique rend complexe le travail de définition des espaces par le grand conseil coutumier.

Une situation locale peu propice

Depuis quelques temps à Cayenne, ces journées réveillent des dissensions entre le président Rodolphe Alexandre de la Collectivité territoriale Guyanaise, et les Amérindiens. On se souvient encore de la petite phrase prononcée par ses soins à Paris en 2018 au sujet de la mine de la montagne d’or « Aujourd’hui ce sont les écologistes qui décident pour la Guyane. Ils sont allés chercher les Amérindiens pour dire que la question minière était amérindienne, mais sur le site de la Montagne d’or, il n’y a aucune communauté de vie amérindienne! ». Petite phrase très mal reçue par les amérindiens. Résultat, en 2018 la journée festive avait été annulée au profit de rencontres décentralisées sur les lieux coutumiers.

Cette année, c’est une programmation aussi riche que variée, entièrement élaborée par des associations œuvrant en faveur de la culture amérindienne, avec l’accompagnement des équipes de la collectivité, qui sera proposée à la population, au cœur de la capitale : un concours de construction de carbets, qui se tiendra du lundi 5 au vendredi 9 août,des concours de chants… On renoue avec la tradition avec quelques précautions. Les journées s’articuleront autour de la question des langues autochtones, de l’engagement des femmes et de la jeunesse.

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Mais alors que le Collectivité Territoriale de Guyane organise une grande soirée culturelle à la place des Palmistes à Cayenne, à l’appel de la Fédération des Organisations Autochtones de Guyane (FOAG), un rassemblement se tiendra à Sepelu (Fort Ceperou), et de son côté, le village Pierre à Saint-Laurent-du-Maroni, véritable bastion de la révolte amérindienne contre le projet minier de la Montagne d’Or, organisera ses propres Journées des Peuples Autochtones les 11 et 12 août, rappelant ainsi que le projet n’est toujours pas officiellement enterré.

La question boomerang de l’APA

La collectivité créole qui détient la gouvernance du territoire a du mal à s’entendre avec sa minorité amérindienne. Outre la Montagne d’or, une autre question pourrit les relations. La question de l’APA ( Accès et partages des avantages) n’est pas réglée et va reprendre toute son acuité à l’approche de la grande rencontre sur la biodiversité prévue en Chine l’an prochain.C’est seulement en 2015, qu’enfin Nord et sud trouvent un accord sur ce qui avait retardé durant vingt ans l’entrée en vigueur de la Convention sur la biodiversité signée en 92 à Rio.

L’APA, accès et partage des avantages permet de lutter contre la biopiraterie en encadrant lorsque des chercheurs, des organismes, des entreprises pharmaceutiques, cosmétiques ou autres s’intéressent aux ressources génétiques d’un territoire. Les dispositions prévues par la loi de biodiversité devaient entrer en vigueur au 1er juillet 2017. La loi prévoyait qu’en Guadeloupe, à la Martinique, à la Réunion, à Mayotte et en Guyane, les collectivités territoriales puissent exercer par délégation le rôle du ministère de l’Environnement et devenir autorité compétente pour recevoir les déclarations et donner les autorisations d’accès aux ressources génétiques sur leur territoire. Mais en Guyane, la CTG, afin de s’éviter les conflits et tensions entre instituts de recherches et autochtones,n’a pas souhaité assumer cette mission d’encadrement de la recherche et de valorisation des ressources naturelles.

Les journées internationales des droits des peuples indigènes restent en France d’une brulante actualité. Tant que tous ces dossiers restent en suspend nous avons besoin de les célébrer.

Dominique Martin-Ferrari, Métamorphose Outremer