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A l’issue d’une récente rencontre entre Rodolphe Alexandre et Monseigneur Alexandre Laffont, la collectivité continue à rémunérer les membres du clergé catholique, avant un retour au droit commun dans les deux ans, a promis l’exécutif territorial.
La nouvelle collectivité territoriale présidée par Rodolphe Alexandre et le diocèse de Guyane ont pu trouvé un terrain d’entente sur la question des rétributions des prêtres, un conflit entre les deux institutions qui dure depuis deux ans. Lors d’une rencontre entre les deux hommes le 17 février dernier, il a été conclu que la collectivité unique continuera de payer 26 des 38 prêtres que compte le diocèse. Toutefois, le président de la CTG, Rodolphe Alexandre a précisé à l’AFP que cette prise en charge par la collectivité sera limité à une durée de deux ans, « afin de permettre à l’institution qu’est l’Église de préparer l’avenir », l’exécutif territorial « trouvera une issue définitive à ce dossier dans les deux ans », pour « un retour au droit commun ». La Guyane est l’un des derniers départements avec l’Alsace-Moselle, où les prêtres sont payés par l’Etat, malgré la loi de 1905 proclamant la séparation de l’Eglise et de l’Etat.
Toujours régi par une ordonnance de 1828
Pour les départements d’Outre-mer à l’exception de la Guyane, il faut attendre un décret de 1911 pour que ce principe de séparation soit appliqué en Guadeloupe, Martinique et à la Réunion. La rétribution des membres du clergé guyanais est toujours régie par une ordonnance royale de Charles X de 1828, qui incluait à l’époque dans les attributions de l’Etat le paiement des ministres du culte. Avec la départementalisation de 1946, la question de l’application du principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat s’est posée. Mais le ministre de l’Intérieur de l’époque, Jules Moch s’y est opposé à cette modification, « en raison de la pauvreté des habitants de la Guyane et de la nécessité de les soustraire aux influences étrangères que favoriserait un départ des missionnaires catholiques ». La Guyane, explique-t-il en 1948 dans une lettre à son collègue des Finances René Mayer, « a toujours été considérée comme pays de missions parmi les infidèles dont les frais de culte ont été assumés à l’origine par le ministère de la Marine, puis par le ministère des Colonies ». Le ministre de l’Intérieur conseille toutefois de « maintenir les pratiques actuelles de la rétribution ecclésiastique par le département de la Guyane et non par le budget de l’Etat ».
Coup de force administratif, saisie de la justice par la mission catholique
En mai 2014, le président du Département, Alain Tien-Liong, avait annoncé qu’il n’entendait plus verser de salaire aux représentants de l’Église catholique. Il a tenté d’interrompre cette « anomalie » coûtant près « d’un million d’euros par an » en signant 26 arrêtés mettant fin à la rémunération mensuelle desdits prêtres. Mais le tribunal administratif de Cayenne, saisi par la mission catholique de Guyane et les prêtres, lui a donné tort en décembre 2014, ordonnant de « rétablir sans délai » la rétribution des prêtres, arguant que l’élu n’avait pas « compétence » en la matière. Le préfet avait alors dû faire appliquer cette décision par « mandatement d’office » sur le budget du conseil général, son président refusant de s’y plier. Une affaire qui a permis une montée au créneau de certains élus guyanais. À l’instar du sénateur Antoine Karam a déposé une proposition de loi en mars 2015 visant à abroger l’ordonnance de Charles X. « J’ai demandé instamment à ce que ce texte soit examiné avant la fin de l’année », a-t-il précisé jeudi dernier à l’AFP. Mais en Guyane,la rétribution des prêtres par la collectivité n’est pas unique. Des chefs coutumiers (amérindiens et descendants de Noirs marrons) sont aussi rémunérés par la collectivité.
Avec AFP