Crash d’Air Moorea: prison ferme pour plusieurs dirigeants de la compagnie, Air Moorea fait appel

Crash d’Air Moorea: prison ferme pour plusieurs dirigeants de la compagnie, Air Moorea fait appel

© AFP, Gregory BOISSY

Plusieurs dirigeants de la compagnie domestique Air Moorea ont été condamnés mardi à des peines allant jusqu’à 18 mois de prison ferme et des interdictions définitives d’exercer pour leur responsabilité dans le crash d’un avion qui avait fait 20 morts en Polynésie française en 2007.

Sept personnes étaient jugées pour « homicides involontaires », soupçonnées d’avoir commis des « omissions et négligences ».
L’ancien directeur général de la compagnie, Freddy Chanseau, a notamment été condamné à 36 mois de prison dont 18 avec sursis ainsi qu’à une interdiction d’exercer à vie. Deux autres cadres de la compagnie, dont le directeur technique Jacques Gobin, ont également écopé de 12 mois de prison ferme. Eux non plus ne pourront plus travailler dans le secteur aéronautique.

La compagnie Air Moorea a, elle, été condamnée à une amende d’un peu plus de 200.000 euros et n’est pas autorisée à reprendre son activité. Seul l’ex-représentant du Service d’État de l’aviation civile en Polynésie a bénéficié d’une relaxe. Les avocats d’Air Moorea et de ses cadres ont immédiatement annoncé qu’ils interjetaient appel.

Dans son jugement, le tribunal correctionnel a écarté, d’emblée, une défaillance du pilote, thèse soulevée par la défense, en octobre dernier, lors du procès. Il a conclu, après étude des rapports d’expertise, que la cause « directe et certaine » du drame était la rupture du câble à cabrer de l’appareil peu après le décollage.

Des croix portant le nom des victimes du crash d'un avion de Air Moorea devant le tribunal correctionnel de Papeete, le 8 octobre 2018 en Polynésie française © AFP, Gregory BOISSY

Des croix portant le nom des victimes du crash d’un avion de Air Moorea devant le tribunal correctionnel de Papeete, le 8 octobre 2018 en Polynésie française © AFP, Gregory BOISSY

La défense demande le dépaysement du procès

Les magistrats ont considéré que cette rupture était consécutive à une « multiplicité de fautes » imputables à la compagnie et à ses dirigeants, coupables d’avoir instauré une « politique de rentabilité au détriment de la sécurité ».
La défense avait tenté de démontrer que le câble de gouverne n’avait pu se rompre en vol.

Le jugement a été accueilli sobrement par les proches des 20 victimes. « Il n’y a pas de satisfaction. Il y a juste le fait que ce soit reconnu. Ce sont des fautes graves et injustifiables, donc c’est bien », a déclaré Nikolaz Fourreau, le président de l’association 9-8-7.

Il s’est notamment félicité des interdictions définitives d’exercer prononcées : « il a été mis en exergue des dysfonctionnements majeurs et graves. C’est extrêmement important qu’il y ait eu des sanctions lourdes, même si cela ne remplacera pas les personnes qui ont disparu ».

« Le tribunal a écarté des causes directes d’un revers de main pour en retenir une seule : la rupture du câble. Et pour affirmer cette cause, il se fonde sur la concordance des rapports d’expertise. Or, il n’y a aucune concordance dans ces rapports », a lancé Me Gilles Jourdainne, avocat de Jacques Gobin.

Outre l’appel, les conseils de la défense entendent saisir la cour de cassation pour obtenir le dépaysement de l’affaire car le dossier suscite trop de « passion » en Polynésie, selon eux, et « la proximité des juges avec l’opinion m’apparaît contraire à la nécessaire sérénité des débats », a argué Me François Quinquis, l’avocat d’Air Moorea et de son ancien directeur.

Le 9 août 2007, le Twin Otter F-OIQI s’était abimé en mer quelques secondes après son décollage de Moorea, île distante de 18 kilomètres de Tahiti. Son pilote et les 19 passagers y avaient perdu la vie. Cinq corps n’ont jamais été retrouvés.

Avec AFP