Covid-19: « Les gens sont dans l’incertitude et la panique», témoigne Guillaume Hoareau vivant aux Etats-Unis

Covid-19: « Les gens sont dans l’incertitude et la panique», témoigne Guillaume Hoareau vivant aux Etats-Unis

© Réunionnais du Monde

Docteur vétérinaire dans l’Utah, ce Dyonisien s’inquiète du manque de matériel et d’organisation face à l’épidémie. «Beaucoup de gens sont morts déjà ou ont perdu leur travail. Une fraction non-négligeable de la population ne réalise toujours pas l’ampleur du problème ou refuse même d’y croire» a confié ce Réunionnais dans une interview réalisée par notre partenaire Réunionnais du monde.

Pouvez-vous vous présenter ?

Guillaume Hoareau, 35 ans, vétérinaire, enseignant chercheur en réanimation à la Faculté de Médecine de Salt Lake City – Service d’Urgences Réanimation. Entouré d’animaux pendant mon enfance, mon parcours m’a mené à l’école vétérinaire de Toulouse en 2008, l’internat de l’université de Pennsylvanie en 2009, la résidence Urgences / Réanimation de l’université de Californie Davis en 2015. J’ai passé une thèse à l’université de Californie Davis de l’armée de l’Air américaine en 2017.

Quelle est la situation de l’épidémie Coronavirus aux Etats-Unis ?

Aujourd’hui, le nombre de cas dépasse de loin le nombre de cas en Chine. Il n’y a pas suffisamment de tests pour avoir une idée précise de l’étendue du problème. Les hôpitaux dans certaines régions sont dépassés.

Quelles sont les mesures prises par les autorités pour contrer l’épidémie ?

Chaque état est d’une certaine façon indépendant mais doit quand même suivre les recommandations fédérales, parfois absentes. Les mesures prises dans l‘état de New York par exemple sont beaucoup plus drastiques que celles prises dans d’autres états. Au jour d’aujourd’hui les états de New York et de Californie sont les plus touchés, mais aussi les plus proactifs à mon sens. Certains états sont en confinement, d’autres ne font que recommander de maintenir une distance sociale, ce qui malheureusement ne veut pas dire la même chose pour tout le monde. Il y a un manque de matériel pour le personnel soignant (masques, gants, ventilateurs, etc) qui sur le long terme va poser de sérieux problèmes pour le soin aux patients.

En quoi sont-elles différentes des mesures prises en France ?

Les mesures sont similaires à mon sens. Il semble que le monde entier fait face au même problème et il n’y a pas de solution miracle. L’administration fédérale a proposé un groupe de mesures pour stimuler l’économie. Je ne suis pas sûr que cela sera suffisant pour survenir aux besoins du pays jusqu’à la fin de cette crise.

Quelle est la situation dans votre ville / quartier ?

L’Utah n’est pas aussi affecté que d’autres états. Ici il y a plus d’espace et moins de gens. Nous attendons le pic de l’épidémie ici pour la semaine du 12 mai d’après les prévisions des épidémiologistes. Tout comme à la Réunion, les gens sont dans l’incertitude et la panique. Les supermarchés sont pris d’assaut pour du papier toilette, des boites de conserves, de l’eau… Les fruits et légumes restent en abondance ! Un nombre incroyable de gens meurent, il est très décevant de voir les gens ne pas respecter les consignes d’isolation.

Comment êtes-vous personnellement affecté par cette crise ?

Tous les déplacements de travail sont annulés et les rendez-vous sont passés en téléconférence. Nous évitons au maximum de sortir. Les seules sorties de la maison sont pour le travail ou les courses. Comme beaucoup de gens dans le monde, le confinement a un coût émotionnel. La lassitude au quotidien est parfois pénible.

Constatez-vous que votre entourage est inquiet ?

Une partie des gens semble s’inquiéter pendant que l’autre ignore le fait que de très nombreuses vies sont, et seront, perdues chaque jour. Malheureusement une fraction non-négligeable de la population ne réalise pas l’ampleur du problème ou refuse même d’y croire. Beaucoup de gens sont morts ou ont perdu leur travail. Le système de solidarité sociale ici n’est pas comparable au modèle français, les conséquences sur le long termes risques d’être dévastatrices.

Est-ce que vous suivez l’état d’avancement de la situation à la Réunion ?

Il est difficile de voir les gens ne pas prendre au sérieux la crise qui nous attend. La Réunion, de par sa nature insulaire, a une capacité de soins très limitée. Nous voyons ici les conséquences de l’épidémie avec des services d’urgences et de soins intensifs pleins et des patients qui ne reçoivent pas les soins adéquats et finissent par mourir. Rest zot case !