BBC Nigeria lance son 1er site d’information en créole pidgin

BBC Nigeria lance son 1er site d’information en créole pidgin

Le site internet en pidgin de la BBC, sur un ordinateur à Lagos le 18 août 2017 ©Pius Utomi Ekpei / AFP

Ce lundi 21 août, la British Broadcasting Corporation (BBC) Nigeria lance son nouveau portail internet en créole « pidgin », parlé et compris par plus de 75 millions de personnes au Nigeria et plus globalement dans toute l’Afrique de l’ouest.

Le site proposera des bulletins d’informations radio en ligne, mais aussi des dépêches et articles des confrères du monde entier traduits en créole ainsi que des forums de discussion autour des sujets d’actualité. « C’est une expérimentation formidable », s’enthousiasme Bilkisu Labaran, rédactrice en chef, dans son bureau de Lagos, la bouillonnante capitale économique du Nigeria.

Bilikisu Labaran rédactrice en chef du site internet de la BBC en pidgin, à Lagos le 18 août 2017 ©Pius Utomi Ekpei / AFP

Bilikisu Labaran rédactrice en chef du site internet de la BBC en pidgin, à Lagos le 18 août 2017 ©Pius Utomi Ekpei / AFP

Bilkisu Labaran et son équipe (une quinzaine de journalistes, web designers, spécialistes de réseaux sociaux) se rêvent en « pionniers »: « On essaie de transformer cette langue orale en langue écrite. On teste, on attend aussi de voir ce que nos lecteurs vont nous suggérer… », explique la journaliste nigériane, dans un anglais parfait. « C’est comme mettre le pied dans un monde inconnu ».

« Un tournant important dans l’histoire de cette langue »

Il y a encore quelques années, ce « créole » était considéré comme la langue des pauvres, des gens peu éduqués. Inspirée du portugais (les premiers européens arrivés sur les côtes d’Afrique de l’Ouest), de l’anglais (langue des colons), mais aussi du patois jamaïcain (des anciens esclaves revenus sur le continent), le pidgin a évolué au gré de l’histoire et des modes. Le pidgin n’a en effet ni grammaire, ni orthographe, ni dictionnaire et se réinvente chaque jour en fonction de l’imagination de ses interlocuteurs.

Princess Igho Williams, présentatrice de la BBC en pidgin, à Lagos le 18 août 2017 ©Pius Utomi Ekpei / AFP

Princess Igho Williams, présentatrice de la BBC en pidgin, à Lagos le 18 août 2017 ©Pius Utomi Ekpei / AFP

Aujourd’hui, il est parlé à travers tout le pays -divisé en d’innombrables ethnies et plus de 500 langues locales-, mais aussi au Cameroun, en Sierra Leone et au Ghana. « C’est une langue qui n’appartient à personne et en même temps, qui appartient à tout le monde », explique Bernard Caron, linguiste au CNRS, grand spécialiste du Nigeria. « C’est, je pense, ce qui va permettre d’unir ce pays si divisé. C’est aussi une manière de se réapproprier l’anglais et son identité ». Bilkisu Labaran, qui n’avait pas le droit de le parler à la maison, a un peu le sentiment aujourd’hui de « marquer un tournant important dans l’histoire de cette langue », depuis son studio de la BBC.

Avec AFP.