Barrage au Brésil : 34 morts et 300 disparus, et les comptes de Vale bloqués

Barrage au Brésil : 34 morts et 300 disparus, et les comptes de Vale bloqués

©Douglas Magno / AFP

Les pompiers brésiliens ont suspendu samedi pour la nuit la recherche de survivants à la coulée de boue provoquée par la rupture d’un barrage du géant minier Vale, catastrophe qui a fait 34 morts et près de 300 disparus.

L’un des barrages du site de Mina Feijão, à Brumadinho (État de Minas Gerais, sud-est), près de Belo Horizonte, avait cédé vendredi matin, pour une raison qui reste à déterminer. Les espoirs de retrouver les disparus étaient minces. Et la pluie a rendu les recherches encore plus difficiles au lendemain de la catastrophe. Sur plus de 150 mètres de large s’étendait un fleuve noirâtre de boue, qui par endroit dévalait la pente comme le font les rapides. Des habitants indiquaient les endroits où se trouvaient des maisons, balayées dans le désastre. Les pompiers ont fait état en fin de journée de 34 morts, dont huit ont été identifiés, 23 blessés, et 366 rescapés. Le bilan de 296 disparus n’a pas été modifié. Vale disait être sans nouvelles de 252 salariés et sous-traitants.

Ajouté au bilan humain, le bilan environnemental : selon les pronostics de l’Agence nationale de l’eau, la boue chargée de déchets miniers qui s’est déversée dans le fleuve Paraopeba pourrait atteindre dans les prochains jours le fleuve São Francisco, à 300 km de là, rapporte Le Monde.  Les secouristes ont retrouvé un autocar destiné aux salariés totalement englouti, avec plusieurs corps sans vie à l’intérieur, qui n’ont pas pu être extraits et n’ont pas encore été comptabilisés officiellement. Des dizaines d’hélicoptères ont sillonné le lieu de la catastrophe toute la journée pour repérer le moindre signe de vie parmi les restes de bâtiments ou de véhicules.

Emerson dos Santos, habitant de Brumadinho (Brésil), sur le toit de sa maison effondrée en raison d'une coulée de boue ©Mauro Pimentel / AFP

Emerson dos Santos, habitant de Brumadinho (Brésil), sur le toit de sa maison effondrée en raison d’une coulée de boue ©Mauro Pimentel / AFP

Après la rupture du barrage, « tout tremblait et j’ai vu de grands arbres et des personnes disparaître sous la boue », a raconté Emerson dos Santos, 30 ans, assis sur le toit de sa maison effondrée pour empêcher un pillage. « Il y avait des gens ici, des maisons… Je suis dévastée par cette tragédie », a dit une riveraine, Rosilene Aganetti. Des personnes parcouraient les abords du périmètre de sécurité avec des photos de proches disparus. D’autres se proposaient aux sauveteurs pour chercher les habitations enfouies, se déplaçant entre les décombres mélangés avec la boue. À la recherche de son mari, Suely de Oliveira Costa était retenue par des agents de sécurité, qui l’empêchaient d’accéder au site et lui demandaient de « se calmer ». « Comment voulez-vous que je sois calme s’il est déjà mort ? », s’écriait-elle.

Amende pour Vale 

Le drame de vendredi plonge le pays et l’État de Minas Gerais trois ans en arrière lorsqu’en novembre 2015, un barrage du même géant minier Vale (également producteur de nickel en Nouvelle-Calédonie, ndlr), cède près de la ville de Mariana, à quelques 125 km de Brumadinho. Il y avait eu 19 morts et d’énormes dégâts environnementaux. À l’époque, des centaines de kilomètres carrés avaient été submergés par un tsunami de boue, qui avait traversé deux États brésiliens et s’était répandu sur 650 kilomètres jusqu’à l’océan Atlantique à travers le lit du fleuve Rio Doce, l’un des plus importants du Brésil.

Le site internet d’informations G1 a affirmé que la justice du Minas Gerais a ordonné de bloquer des comptes bancaires de l’entreprise totalisant un milliard de réais (233 millions d’euros) en prévision de l’indemnisation des victimes. L’agence gouvernementale Ibama, qui dépend du ministère de l’environnement, a par ailleurs infligé à Vale une amende de 250 millions de réais (58 millions d’euros). « Trois ans après le grave crime contre l’environnement perpétré à Mariana, avec une enquête toujours pas terminée, l’histoire se répète de manière tragique à Brumadinho. Il est inadmissible que les pouvoirs publics et les compagnies minières n’aient tiré aucune leçon », a déploré l’ancienne ministre de l’Environnement (PT, opposition) Marina Silva.

©Washington Alves / Reuters

©Washington Alves / Reuters

Selon Le Monde, l’Agence nationale des mines, responsable au Brésil de l’octroi de permis et du contrôle d’une partie des installations, a confirmé dans un communiqué que Vale avait bien réalisé « un contrôle de ce barrage par une entité indépendante en septembre dernier ». Selon ce diagnostic, le barrage présentait un « risque faible de rupture » mais un « fort impact » sur l’environnement en cas d’accident. Or l’ « entité indépendante » mentionné par l’entreprise est un bureau d’étude, travaillant souvent exclusivement pour Vale, dont l’indépendance est régulièrement remise en question par les scientifiques. Et une récente étude de l’Université du Minas Gerais indique qu’au moins 20 barrages, sur les 450 que compte l’État du Minas Gerais, présenteraient des risques sérieux de rupture.

Avec AFP.