Union Europénne: « Le FED PTOM est le principal instrument financier pour nos collectivités du Pacifique », Maurice Ponga

Union Europénne: « Le FED PTOM est le principal instrument financier pour nos collectivités du Pacifique », Maurice Ponga

©PPE

Alors que la Polynésie française s’est vue accorder un montant d’un peu plus de 30 millions d’euros pour son 11ème Fond européen de développement (FED), Outremers360 a rencontré le député européen des PTOM à Bruxelles, Maurice Ponga. Il nous explique les implications de l’Union Européenne dans les PTOM et les outils financiers qui leur sont mis à disposition.

Avec un montant de 30,2 millions d’euros pour la période 2014-2020, le 11ème FED accordé à la Polynésie française est en hausse de 30%. Ce 11ème FED sera versé en 3 ou 4 tranches au budget de la Polynésie à partir de l’année prochaine et selon l’avancée de plusieurs indicateurs, précise Radio 1 Tahiti. Avec une enveloppe supplémentaire de 36 millions d’euros, l’Europe a augmenté son aide aux quatre PTOM du Pacifique: Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis et Futuna et Pitcairn. En parallèle, l’Union Européenne consacre une enveloppe de 745 830 890 millions d’euros pour toute la région Pacifique.

Je souhaite que le FED PTOM soit remplacé dès 2020 par un instrument spécifique et adapté aux spécificités des PTOM. Cet instrument devrait être flexible afin de répondre aux défis que doivent relever les PTOM.

Maurice Ponga, député européen pour les PTOM du Pacifique, a reçu la rédaction d’Outremers360 au cœur de l’Europe, à la Commission européenne de Bruxelles. Il nous explique quelles sont les implications de l’Europe pour les PTOM, les différents outils financiers mis à leur disposition et ceux en cours de réflexion ou encore, les relations que les deux régions entretiennent. Interview.

Quelles sont concrètement les missions d’un député européen ? Pour les Outre-mer notamment ?

Le travail d’un Député européen est d’élaborer les lois européennes et de voter le budget. En tant que Député de l’outre-mer, il me tient à cœur de défendre les intérêts ultramarins au niveau européen tant au niveau de l’adoption des lois que lors des votes budgétaires, mais également dans le cadre de résolutions politiques et de conférences internationales.

Quels sont les grands dossiers sur lesquels vous vous penchez, par rapport aux Outre-mer du Pacifique notamment ?

En raison de leur statut de PTOM, les 3 collectivités françaises du Pacifique ne sont pas soumises au droit européen. La réglementation européenne ne s’y applique pas. Néanmoins, il y a des liens étroits avec l’Union européen, liens que je souhaite renforcer. Je travaille donc actuellement sur l’avenir des relations entre l’UE et les PTOM (quelle association après 2020) et souhaite proposer une relation rénovée axée autour d’un instrument spécifique dédié.

Maurice Ponga au Parlement européen de Bruxelles ©T. Faatau / Outremers360

Maurice Ponga au Parlement européen de Bruxelles ©T. Faatau / Outremers360

Concrètement, qu’est-ce que le FED apporte aux Outre-mer du Pacifique ? Des exemples de projets menés à bien ? Et comment est-il réparti sur les trois Outre-mer du Pacifique ?

Le FED PTOM est le principal instrument financier pour nos collectivités du Pacifique, mais ce n’est pas le seul. Grace au travail que j’ai mené ces dernières années, nos collectivités ont accès aux programmes horizontaux tels qu’ERASMUS, LIFE +, HORIZON 2020. Pour la période 2014 -2020, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie se sont vu dotées d’une enveloppe territoriale d’environ 30 millions d’euros, et Wallis et Futuna de 20 millions d’euros. Il revient à chaque collectivité en collaboration avec la Commission européenne de définir les priorités politiques pour utiliser ces fonds. A ces enveloppes territoriales s’ajoute une enveloppe pour la région Pacifique de 36 millions d’euros.

Nous avions pu comprendre que la Polynésie française et Wallis et Futuna n’arrivent pas à débloquer le FED, pourquoi selon vous ?

La Polynésie française et Wallis et Futuna sont actuellement en train de programmer le 11ème FED qui couvre la période 2014 – 2020. Les fonds du 10ème FED sont en cours de décaissement. S’il y a des retards, cela résulte des lourdeurs parfois excessives de la Commission européenne, mais la volonté des deux côtés est d’avancer ensemble pour le développement des territoires.

Au niveau de la pêche, est-ce que la Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna et la Polynésie française ont conclu des accords de pêche avec un des Etats de l’Union européenne ? Quel est le rôle de l’Union européenne par rapport à ces accords de pêche ?

Aucune collectivité du Pacifique n’a conclu d’accord de pêche avec l’Union européenne. En matière de pêche, l’Union européenne dispose d’une compétence exclusive, c’est-à-dire que c’est la Commission européenne qui négocie les accords de pêche sur le mandat donné par le Conseil. Les accords sont ensuite ratifiés par le Parlement européen. Dans ces accords de pêche, l’Union européenne défend une pêche durable et promeut la bonne gouvernance, ce qui fait de l’Union européenne un partenaire responsable en matière de pêche.

©T. Faatau / Outremers360

« Ce qui est important, c’est que l’Union européenne travaille en étroite collaboration avec les PTOM du Pacifique et fasse de ces derniers des ambassadeurs de l’Union européenne dans la région » ©T. Faatau / Outremers360

Comment l’Europe fait-elle pour articuler ses compétences avec les compétences des PTOM du Pacifique ? Y’a-t-il des confusions ou des blocages ?

Les PTOM du Pacifique sont des territoires non européens associés à l’Union européenne. Ainsi, il n’y a pas de conflit de compétences. Ce qui est important, c’est que l’Union européenne travaille en étroite collaboration avec les PTOM du Pacifique et fasse de ces derniers des ambassadeurs de l’Union européenne dans la région.

Vous militez en faveur d’un Fonds stratégique spécifique aux PTOM: où est-ce que ce projet en est ? Comment sera-t-il mis en oeuvre ?

Je souhaite effectivement que le FED PTOM soit remplacé dès 2020 par un instrument spécifique et adapté aux spécificités des PTOM. Cet instrument devrait être flexible afin de répondre aux défis que doivent relever les PTOM.

En 2015 et après la COP 21, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie ont demandé un accès au Fonds vert ou la création d’un Fonds bleu. Pensez-vous que l’Europe serait d’accord et si oui, sauriez-vous où en est ce projet ?

Il existe au niveau européen, un programme dédié à l’environnement : le programme LIFE +. Les PTOM sont éligibles à ce fonds. En outre, il existe dans le cadre de l’ICD, un programme BEST2.0 dédié aux biens publics mondiaux et à la biodiversité spécifiquement pour les PTOM. Des financements européens existent donc pour protéger la biodiversité de nos territoires, mais il est vrai qu’il est crucial de réfléchir à des financements supplémentaires eu égard les défis que les PTOM doivent relever et à la richesse extraordinaire de leur biodiversité.

L’Europe parait lointaine pour le Pacifique, et réciproquement. Comment faire pour rapprocher ces deux continents ? Quels sont leurs apports mutuels ?

Il est vrai que l’Europe est loin du Pacifique. Mais les liens existent et il convient de les renforcer. Pour cela, il faut expliquer ce qu’est l’Union européenne à nos concitoyens et mieux informer l’Union européenne de la richesse du Pacifique. Chaque année je reçois plus d’une centaine d’ultramarins au Parlement européen et organise régulièrement des conférences sur l’outre-mer.

Début décembre, Maurice Ponga a reçu une délégation du Collectif Siapo, un collectif d'artistes originaires de Wallis et Futuna, de Nouvelle-Calédonie ou encore de Polynésie française ©T. Faatau / Outremers360

Début décembre, Maurice Ponga a reçu une délégation du Collectif Siapo, un collectif d’artistes originaires de Wallis et Futuna, de Nouvelle-Calédonie ou encore de Polynésie française ©T. Faatau / Outremers360

En même temps qu’Outremers360, Maurice Ponga recevait d’ailleurs le Collectif Siapo, un collectif culturel basé à Paris pour les artistes de Wallis et Futuna, de Nouvelle-Calédonie et aussi de Polynésie française.

Enfin, quelle est votre vision de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie après 2018 ?

Je crois en des liens forts qui continueront entre la Nouvelle-Calédonie et la République française. La Nouvelle-Calédonie fait partie de la France et il est important qu’elle y reste.

Maurice Ponga : de l’enseignement à l’Union

Né le 5 juin 1947 à Kouaoua, un village minier de la côte est calédonienne, Maurice Ponga est instituteur de formation. Il a entrepris son parcours professionnel au sein de la FELP en devenant cadre-formateur. C’est en 1996 qu’il entre en politique. Il devient alors membre de l’Assemblée de la Province Nord et du Congrès de la Nouvelle-Calédonie sur la liste du Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR) de Maurice Nénou. En 1999, il rejoint le premier gouvernement de la Nouvelle-Calédonie mené par Jean Lèques, en tant que membre en charge des secteurs de l’Agriculture et de l’Élevage. Il fera par la suite partie des différents gouvernements calédoniens jusqu’en 2009, où il devient le premier député européen des PTOM. En effet, ce n’est qu’en 2009 qu’un siège est créé pour les Collectivités du Pacifique. Il sera réélu en mai 2014. Pendant ses deux mandats, Maurice Ponga intègre les rangs de la droite européenne: le Parti populaire européen (PPE).

 

Eline Ulysse et Tenahe Faatau