Statut de la Polynésie : Le Sénat adopte « la reconnaissance » du « fait nucléaire »

Statut de la Polynésie : Le Sénat adopte « la reconnaissance » du « fait nucléaire »

©Gregory Boissy / AFP

Le Sénat a adopté mercredi en première lecture, lors de l’examen du projet de réforme du statut d’autonomie de la Polynésie, « la reconnaissance », par l’État français, du rôle joué par la Polynésie française dans le développement de sa politique de dissuasion nucléaire.

« La reconnaissance du fait nucléaire répond à une attente très forte de la population et des élus de la Polynésie française », a déclaré la ministre des Outre-mer Annick Girardin. De 1966 à 1996, les atolls de Mururoa et Fangataufa ont été le théâtre de 193 essais nucléaires, qui ont eu des effets sur la santé et l’environnement des populations.La réforme du statut d’autonomie passe par deux projets de loi (l’un organique, l’autre ordinaire) dont le Sénat a terminé l’examen mercredi en fin d’après-midi. Le vote sur l’ensemble des textes aura lieu mardi prochain.

Ces textes comportent « quelques symboles forts et une multitude de dispositions techniques », a résumé le rapporteur LR de la commission des Lois Mathieu Darnaud.La mesure phare du projet de loi organique confirme, dans son article premier, « la reconnaissance de la contribution de la Polynésie française à la construction de la capacité de dissuasion nucléaire et à la défense de la Nation » et rappelle que les conséquences « doivent être prises en compte dans tous les domaines ».

« Inscrire le fait nucléaire dans cet article 1er de la loi organique c’est orner l’oreille de Marianne de la fleur de tiaré » (symbole de la Polynésie, ndlr), a déclaré le sénateur de Wallis et Futuna Robert Laufoaulu (Indépendants). »Les déclarations de reconnaissance symboliques sont nécessaires », a souligné Guillaume Arnell (RDSE à majorité radicale). Les orateurs ont salué dans ces textes « un nouveau pas en avant » (Jean-Pierre Sueur, PS), des dispositions « qui vont dans le bons sens » (Esther Benbassa, CRCE à majorité communiste).

Mais ils ont été nombreux à regretter qu’ils n’aillent pas assez loin. « La reconnaissance est un vœu pieu dépourvu de toute portée normative », a souligné Esther Benbassa. « On est un peu frustré », a reconnu la sénatrice de Polynésie Lana Tetuanui (centriste), sur la dotation globale d’autonomie (DGA) notamment. Instaurée en 1996 et considérée comme une « dette nucléaire », celle-ci avait été plusieurs fois rabotée avant que François Hollande promette de la « sanctuariser » en 2016. La ministre des Outre-mer Annick Girardin a indiqué que cette DGA sera retirée du budget des Outre-mer pour intégrer le projet de loi de Finances de 2020. « Nous sollicitons des garanties du gouvernement » a-t-elle poursuivi, soulignant que l’ensemble des élus de Polynésie souhaitent « graver dans le marbre » cette dette nucléaire.

La Polynésie française est une collectivité d’outre-mer régie par l’article 74 de la Constitution. Elle bénéficie d’une large autonomie politique, dispose d’une Assemblée territoriale qui adopte des « lois du pays », d’un gouvernement et d’un président, actuellement Édouard Fritch. Ce dernier, comme le président de l’Assemblée territoriale, Gaston Tong Sang, ont assisté aux débats, étant actuellement en mission à Paris pour sensibiliser les parlementaires hexagonaux et ultramarins sur ce projet de réforme.

Avec AFP.