Solidarité nationale et plan de relance : Après un 1er PGE, « une deuxième étape doit s’ouvrir » pour la Polynésie

Solidarité nationale et plan de relance : Après un 1er PGE, « une deuxième étape doit s’ouvrir » pour la Polynésie

©Assemblée nationale (archives)

Alors que l’État a inscrit un PGE de 240 millions d’euros pour la Polynésie dans le cadre du 3ème projet de loi de finances rectificative (PLFR3), une « deuxième étape » de la solidarité nationale est « en cours de discussion » pour la Collectivité d’Outre-mer, nous a assuré la députée Maina Sage, qui mène depuis plusieurs semaines une campagne de sensibilisation pour répondre aux urgences et besoins de la Polynésie. 

Initialement, la Polynésie française avait fait une demande de PGE de 470 millions d’euros, dont 160 pour sa Caisse de prévoyance sociale, équivalent de la Sécurité sociale hexagonale. Cette estimation avait été faite après expertise par les structures locales de l’État. Alors afin d’obtenir un meilleur soutien de l’État, la députée de Polynésie Maina Sage a été chargée de mener une campagne de sensibilisation sur les besoins et urgences de la Collectivité, une campagne qu’elle a mené par le biais de différentes rencontres auprès des cabinets ministériels et sur le front législatif, à travers des amendements d’appel lors de l’examen du PLFR3, « pour ouvrir le débat, expliquer où sont les urgences, mettre en lumière les difficultés », nous explique-t-elle.

« Le résultat est positif », assure Maina Sage, « l’État a compris que les besoins exprimés sont urgents et importants, que l’analyse qui a été faite localement est sérieuse et faite avec des compétences fiables à la fois polynésiennes et de l’État ». Par conséquent, ce PGE de 240 millions d’euros est une première étape de la solidarité nationale et une deuxième étape est en cours de définition et pas forcément sous la forme d’un PGE. « Cette deuxième phase doit s’organiser avec l’État qui va l’ouvrir avec la Polynésie », poursuit la députée.

« L’État comprend ces besoins, est prêt à les étudier et à trouver les moyens de nous inclure dans son plan de relance pour la rentrée. Tout notre travail aujourd’hui est d’intégrer ce plan de relance pour qu’une part soit aussi réservée à la Polynésie ». Un plan de relance « qui tienne compte des spécificités des Outre-mer », s’était par ailleurs engagé le ministre des Outre-mer lors de sa première QAG devant l’Assemblée nationale. Une « réponse adaptée et sur-mesure à chaque territoire », résume Maina Sage.

La Polynésie et la Nouvelle-Calédonie au comité national de suivi

« Sébastien Lecornu connait nos sujets, comprend les difficultés qu’on rencontre, les spécificités de notre territoire grand comme l’Europe avec des zones très différentes : des zones urbaines, des zones isolées, des atolls, des îles hautes… », assure la députée. « Il a conscience de cette diversité, de ces spécificités et des difficultés. Il a conscience aussi de la grandeur du territoire à couvrir et que doit s’exprimer aussi une solidarité pour assurer une continuité territoriale dans tous les domaines, services publics et transports, pour garder un territoire désenclavé ».

Toujours dans le cadre du PLFR3, la députée de Polynésie a également déposé un amendement de fonds concernant le suivi du PGE. « Cet amendement, depuis son origine en commission, a pour seul objet d’assurer au niveau national un suivi spécifique qui soit plus à l’écoute des besoins évalués par le comité d’expertise locale conjointe État-Pays », avait-elle détaillé dans un communiqué. Il « permet en outre de détailler les moyens exceptionnels consacrés par la Polynésie sur ses fonds propres, ainsi que ceux de l’État pour les entreprises » et « explicite les besoins de financements prévisionnels évalués localement à 470 millions d’euros ».

« Nous avons proposé deux options : soit un rattachement au comité de suivi national des PGE d’entreprises, soit la création d’un comité ad hoc ». Jeudi soir à Paris, Maina Sage a obtenu de la commission des finances examinant le PLFR3 « qu’un représentant des territoires d’outre-mer siège au sein » du comité de suivi national des PGE. « Cela me paraît tout à fait justifié » a reconnu le rapporteur général de la commission, Laurent Saint-Martin. Ainsi, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie seront représentées au comité de suivi, par leurs parlementaires respectifs, leurs élus locaux voire même, les acteurs de l’économie. Pour rappel, ces deux territoires du Pacifique sont les seules collectivités d’Outre-mer à avoir bénéficié d’un PGE.

Le PGE de 240 millions d’euros accordé par l’État par le biais de l’AFD « doit permettre à la collectivité de faire face aux différentes dépenses liées au covid-19, afin de préserver son autofinancement », expliquait en séance la députée Stéphanie Atger. « Destinée à maintenir les compétences et la protection sociale, ainsi qu’à compenser la perte de recettes et le report de cotisations sociales, cette aide participera à la sauvegarde de l’économie du territoire. Malgré la très bonne réactivité du gouvernement polynésien, la violence de la crise et la singularité de l’archipel rendent nécessaire l’octroi d’un tel montant, alors que le tourisme, très durement touché, représente près de 15 % du PIB et que, selon le ministère du tourisme et de l’emploi, 15 000 à 20 000 emplois de ce secteur sont menacés ».

Les trois amendements d’appel de la députée Maina Sage

Ceux-ci visent surtout à interpeller l’État et sensibiliser le Parlement sur des sujets prioritaires (ils ont vocation ensuite à être retiré après débat). A ce titre, parmi des centaines d’amendements d’appel de mes collègues sur l’article 9 du budget, trois amendements d’appel ont été déposés pour ma part :

Le premier portait sur la situation des compagnies aériennes ultramarines dont Air Tahiti Nui et Air Tahiti qui vivent des moments particulièrement difficiles. Cet amendement pose la problématique de distorsion de concurrence avec Air France, du fait que cette dernière dispose de soutiens exceptionnels de l’État au titre de l’intérêt stratégique qu’elle représente pour la France. Il est donc proposé de dédier aux outremers 3% du fonds de 20 milliards d’euros, actuellement réservé aux entreprises d’intérêt national comme Air France ou Renault.

Cet amendement vise surtout à rappeler que chaque outremer dispose aussi d’entreprises d’intérêt stratégique qu’il faut absolument préserver. C’est le cas, pour la Polynésie, de nos compagnies aériennes. Le rapporteur général a été ouvert à cette réflexion que nous devrions poursuivre dans le cadre du prochain plan de relance : « Je comprends très bien cet amendement d’appel, il faudra avoir une réflexion pour l’après ! Pour l’outre-mer et la Polynésie au niveau des investissements stratégiques » précisant que « la Banque des territoires (…) doit aussi jouer son rôle dans l’ensemble des territoires métropolitain et ultramarins et pouvoir être en capacité de financer, soit par de la dette, soit par de l’investissement, avec l’ensemble des acteurs et des parties prenantes, du développement économique public, comme ce genre de projets ».

Et de conclure : « Vous citez notamment les liaisons aériennes entre les archipels, ça peut faire partie des pistes de développement économique à financer ». Reste à consolider cette piste en vue du prochain collectif budgétaire ou PLF 21.

Le second concernait le soutien à la diffusion des médias en outremers qui ont dû rester en pleine activité pour relayer l’information en continu pendant la crise, tout en accusant une forte baisse des recettes publicitaires. Cet amendement découle des travaux menés avec mon collègue Stéphane Claireaux sur la réforme de l’audiovisuel et des auditions au sein de la Délégation aux outremers le 25 mai dernier. Il s’est ajouté aux nombreux autres amendements d’appel en faveur des médias et du monde culturel.

L’ancien ministre de la Culture, Franck Riester a entendu nos demandes et y a en partie répondu par la voie d’un amendement gouvernemental de 70 millions d’euros à destination pour moitié d’un « soutien spécifique à la diffusion hertzienne et numérique des radios privées et des télévisions locales présentes dans l’hexagone et en outre-mer », et pour l’autre « en faveur des acteurs les plus fragiles de la filière presse », qui sera d’ailleurs auditionnée par la Délégation Outre-mer le 15 juillet prochain. C’est en tout un budget exceptionnel de 5 milliards d’euros qui sera déployé pour la culture.

Le troisième, relatif à la prise en charge des coûts des mesures sanitaires, est aussi un amendement d’appel pour indiquer que le gouvernement polynésien a déjà engagé près de 10 millions d’euros pour faire face aux différents coûts d’achat de matériel (masques et test), mais aussi aux frais de mise en quarantaine (transports, hébergement, etc.). Il prévoit un complément de 7,3 millions d’euros pour le reste de l’année. Or cette dépense n’a pas été retenue dans le cadre du prochain PGE.

Tout comme pour le secteur de l’aérien, le rapporteur général a marqué une ouverture pour le prochain PLF, tout comme le ministre Dussopt qui rappelle que ce premier PGE répond à l’urgence, tout comme le budget de 4 millions d’euros sur la continuité territoriale qui est « une première participation » à cet élan de solidarité.